(Chimbarongo, Chili) Les bicyclettes progressent doucement dans les allées caillouteuses, entre les sections de vignes, s’arrêtant çà et là pour quelques explications.
Le vélo est plus qu’un simple emblème affiché sur les bouteilles de la gamme Bicicleta de la maison chilienne Cono Sur. Ce vignoble offre des visites guidées sur deux roues, clin d’œil historique à l’époque où les travailleurs l’utilisaient pour se rendre sur le terrain.
C’est aussi une affirmation écologique pour l’entreprise qui fait de la production environnementalement durable son « principal pilier » et qui est le deuxième producteur de vin biologique en importance du Chili.
Les visiteurs ne s’étonneront donc pas de croiser une horde d’oies déambulant librement dans le domaine, gobant les petits insectes nuisibles pour les vignes — sauf durant les quelques mois précédant les vendanges, pour éviter que les précieux raisins finissent dans leur gosier.
« Elles sont d’une grande utilité pour une gestion écologique réussie », et leurs déjections enrichissent naturellement le sol, explique Soledad Meneses Pastén, viticultrice devenue cheffe des communications et de l’œnotourisme de l’entreprise.
Cono Sur possède neuf sites au Chili, totalisant 1400 hectares de vignes, mais c’est à celui de Chimbarongo, à quelque 150 kilomètres au sud de la capitale Santiago, qu’elle reçoit les visiteurs.
C’est « le plus beau » de tous, avec son imposante demeure construite autour de 1900, et c’est là qu’est concentrée toute la vinification de l’entreprise, raconte Mme Meneses Pastén.
Le bâtiment abrite notamment la boutique et la salle de dégustation, où sont suspendus d’imposants abat-jour en osier, une matière dont la production fait aussi la renommée de Chimbarongo.
Pinot noir à la bourguignonne
Le pinot noir occupe une part importante des 300 hectares du domaine de Cono Sur à Chimbarongo, situé à l’entrée de la petite ville, aux abords d’une gare abandonnée qui a notamment servi, jadis, à expédier la production du domaine.
« C’est notre spécialité », souligne Soledad Meneses Pastén, qui fait visiter le site à La Presse par un frais matin de septembre, alors que le domaine semble encore engourdi par l’hiver austral qui s’achève.
Pour effectuer une vinification traditionnelle comme elle se fait en Bourgogne, Cono Sur a recours à l’expertise du vigneron français Martin Prieur.
En plus de ses 300 oies, accompagnées de quelques canards et poules, Cono Sur dispose d’une petite pépinière où elle fait pousser des végétaux qui lui servent à contrôler les envahisseurs.
« On utilise des plantes, des arbres, des fleurs pour aménager des corridors biologiques afin d’attirer les bons insectes et éloigner les indésirables », explique Soledad Meneses Pastén, au pied d’un quillay.
Cet arbre sempervirent — qui ne perd pas ses feuilles en hiver — est surnommé arbre à savon, car on s’en servait anciennement pour fabriquer une concoction nettoyante, raconte-t-elle : « Ça rendait les cheveux très brillants ! »
C’est toutefois parce qu’il s’agit d’un arbre indigène au Chili, adapté à son environnement, que l’entreprise le privilégie pour rétablir un équilibre biologique sur son domaine, précise Mme Meneses Pastén.
Sécheresse
Comme pour les autres entreprises et la population du pays, la sécheresse qui touche le Chili depuis près de 15 ans complique les choses pour Cono Sur, qui appartient maintenant au géant chilien du vin Concha y Toro.
Le domaine peut toutefois compter sur un bassin aménagé permettant d’accumuler l’eau qui descend de la cordillère des Andes, notamment à la fonte des neiges.
« On est capables d’avoir assez d’eau pour nos besoins, mais on doit l’utiliser avec beaucoup, beaucoup de précautions », indique Soledad Meneses Pastén, qui précise que le système d’irrigation est notamment alimenté à l’électricité solaire.
Le domaine dispose d’une puissance solaire installée de 600 kilowatts, qui comble une partie de ses besoins en électricité, et le reste est acheté en provenance de sources renouvelables — les sources d’électricité au Chili ne le sont pas toutes —, indique l’entreprise.
Visites et accès
Les visites guidées, avec dégustation bien sûr, ont lieu du jeudi au dimanche, toute l’année ; elles se déroulent en espagnol, mais il sera possible d’en faire en anglais sur réservation à partir du mois de mai — leur prix va de 20 000 à 30 000 pesos chiliens (l’équivalent de 33 à 50 $ CAN).
La petite gare abandonnée qui jouxte le domaine n’ayant pas vu un train passer depuis quelques décennies, le moyen le plus simple de s’y rendre est en voiture.
Il est néanmoins possible de prendre le train ou l’autobus jusqu’à la ville voisine de San Fernando, puis de faire le reste du trajet à bord d’un vieux minibus usé, comme le font les habitants du coin, et comme l’a fait La Presse — pouvoir communiquer en espagnol est toutefois nécessaire.
Bon nombre des vins produits par Cono Sur sont offerts à la Société des alcools du Québec (SAQ), ainsi qu’à la Société des alcools du Nouveau-Brunswick (ANBL) et à la Régie des alcools de l’Ontario (LCBO).
Ce reportage a été réalisé avec le soutien financier du Fonds québécois en journalisme international.
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- 450 hectares
- Superficie de vignes en production biologique de la maison Cono Sur, sur un total 1400 hectares
Source : Cono Sur- 60 millions
- Nombre de bouteilles de vin produites annuellement par Cono Sur
Source : Cono Sur