(Paris) Après un choc sans précédent, le transport aérien se met en piste pour redécoller avec un arsenal anti-COVID-19, « clé » du redémarrage, qui devra être harmonisé au niveau mondial pour éviter un « patchwork » de mesures, explique Alexandre de Juniac, directeur général de l’Iata.

« Une des clés du redémarrage des voyages est un processus de contrôle des passagers qui soit robuste [...], qui redonne confiance » et permette « de convaincre les gouvernements de lever les procédures de fermeture des frontières », estime le patron de l’Association internationale du transport aérien (Iata), qui regroupe 290 compagnies aériennes, dans un entretien à l’AFP.

« On est en train de bâtir quelque chose qui soit à la fois sûr et qui permette de faire fonctionner les opérations de manière économiquement viable », déclare-t-il, écartant avec force l’idée de condamner des sièges pour permettre une distanciation physique à bord.

« Ça n’ajouterait pas davantage de sécurité d’avoir à neutraliser des sièges », assure M. de Juniac.

« En plus, l’impact économique serait absolument catastrophique » et il faudrait alors « augmenter les prix de 50 à 100 % », poursuit-il.

Des discussions sont en cours au niveau de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) et des grands États « pour essayer d’avoir une approche convergente et harmonisée sur l’ensemble de la planète sur le système de contrôle sanitaire » qui sera mis en place par les acteurs du transport aérien. Elles devraient, selon lui, aboutir d’ici « à fin mai ».

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Le contrôle de la température fait partie des mesures envisagées.

Il s’agit d’éviter « le patchwork » de mesures de sûreté qui avait suivi les attentats du 11-Septembre, notamment en matière de contrôle des passagers, commente-t-il.

Déclaration sanitaire à l’arrivée à l’aéroport, contrôle de température, port du masque dans l’aéroport et dans l’avion, distribution de nourriture préemballée pour limiter les contacts, désinfection de l’avion, limitation du nombre de bagages cabine ou encore une livraison de bagages accélérée : le secteur mise sur une superposition de mesures conjuguée à des systèmes de filtration de l’air très performants dans les avions pour créer un filet anti-Covid.

Les passagers « prêts à être reconquis »

La fermeture des frontières et les restrictions de circulation mises en place partout dans le monde pour éviter la propagation du coronavirus ont porté depuis mars un coup d’arrêt au transport aérien.

« On n’a jamais connu ça. Aucune crise précédente n’a été de ce niveau-là », constate le patron de l’Iata.

Entre 80 et 90 % de la flotte mondiale a été clouée au sol et ce n’est qu’à partir de juin que le trafic redémarrera, d’abord sur les lignes intérieures puis continentales et enfin intercontinentales, selon l’Iata qui estime qu’il ne retrouvera son niveau d’avant-crise qu’en 2023.

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Jusqu’ici, seules « trois ou quatre compagnies » ont fait faillite, selon M. de Juniac, dont le géant Virgin Australia qui a annoncé fin avril se mettre volontairement en cessation de paiements.

Mais des dizaines de milliers d’emplois ont été supprimés.

Si les compagnies survivent, c’est grâce, selon lui, à la réaction « très rapide et très forte » dont les États ont fait preuve pour soutenir, sous diverses formes, le secteur partout dans le monde « considérant que c’est un secteur absolument stratégique ».

Engagements environnements maintenus

Quant aux engagements environnementaux du secteur, qui doit réduire ses émissions de CO2 de moitié en 2050 par rapport à 2005 selon les règles définies par l’OACI, ils seront tenus, promet-il.

« On est en train d’essayer de convaincre les gouvernements de consacrer une partie de leur plan de support économique à développer les bio-fuels (bio-carburants, NDLR) ».

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La désinfection de l’avion fait partie des mesures envisagées.

« Le renouvellement des flottes (avec des avions moins polluants, NDLR) sera peut-être un peu ralenti [...], mais il y aura aussi un peu moins d’avions qui voleront et donc un peu moins d’émissions », ajoute-t-il.

Sur la question des contreparties aux aides exigées par des États, comme en France par exemple sur le plan environnemental, M. de Juniac estime qu’il est « plutôt compliqué d’alourdir un processus alors qu’on était en train de se noyer ».

« De toute façon, on allait tenir nos engagements environnementaux », affirme-t-il.