Le conflit au Darfour? Le difficile rétablissement du Soudan après 21 ans de guerre civile dans le Sud? Trois jeunes motards occidentaux en ont fait fi, convaincus que le pays est un futur paradis touristique.

Et le président soudanais Omar el-Béchir a beau être menacé d'un mandat d'arrêt international pour «génocide» et «crimes de guerre» au Darfour, les deux Canadiens et le Britannique sont sous le charme du Soudan.

Le trio a quitté Londres il y a un mois et demi pour rallier Le Cap, en Afrique du Sud, en moto.

«Je suis convaincu que dans quelques années, le Soudan sera dans le peloton de tête des autres grands pays africains en termes de tourisme», affirme Tom Smith, 25 ans, qui a pris un congé de trois mois de la Banque d'Angleterre.

«Si ça reste comme ça, je veux dire, si (le pays) garde le même pouvoir d'attraction, je pense que (les touristes) vont affluer», ajoute le jeune homme, à Khartoum pour une courte pause avant deux jours de route vers la frontière avec l'Éthiopie.

Après deux ans de préparation, le voyage de 24 000 km à travers l'Europe, le Moyen-Orient, le Soudan et maintenant l'Afrique va coûter à Tom Smith et à ses acolytes, Tyson Brust et Yarema Bezchlibnyk, la bagatelle de 38 000 euros.

Inspirés par l'acteur Ewan McGregor et son ami Charley Boorman, qui ont effectué le voyage d'Écosse en Afrique du Sud en moto pour une série de la BBC, les jeunes gens tentent aussi de lever des fonds pour les malades du sida.

Les trois hommes avouent qu'ils appréhendaient la traversée du Soudan, enlisé dans la guerre civile au Darfour, dans l'ouest du pays. Mais leurs craintes se sont dissipées dès leur arrivée en ferry depuis l'Égypte par le lac Nasser.

Pour Tyson Brust, les médias n'abordent le Soudan que sous l'angle du conflit alors que «c'est probablement l'un des endroits les plus sûrs au monde, nous l'avons découvert quand nous avons traversé (le pays)».

«Les gens sont incroyablement accueillants, tout le monde nous faisait signe de passer pour qu'on prenne notre petit-déjeuner avec eux, et ils nous offraient des boissons», ajoute cet étudiant en médecine de 30 ans, originaire de Toronto.

Des déclarations enthousiastes qui ne peuvent que réjouir les autorités d'un pays soumis à des sanctions américaines, considéré comme un État finançant le terrorisme par Washington et qui se démène sur le plan diplomatique pour riposter aux accusations contre le président Béchir.

Yarema, qui est aussi étudiant en médecine, décrit le voyage depuis le lac Nasser jusqu'à l'antique cité de Dongola comme un «trajet spectaculaire, (avec) un paysage presque lunaire».

Tout n'a cependant pas été rose: les trois jeunes gens ont été accueillis par une chaleur intense, des soucis gastriques ont marqué leur avancée depuis la Turquie, des pannes ou des crevaisons ont retardé leur périple et surtout, un accident en Égypte a laissé Yarema sonné.

Le trio, qui doit encore passer quelques jours au Soudan, tient le journal de ces péripéties sur un blogue : www.ditchthecomfortzone.com.

Armés d'un seul guide touristique, les trois jeunes hommes sont en retard d'une semaine sur leur programme et n'ont parcouru que les deux cinquièmes du trajet total. Au terme du voyage, ils doivent arriver au Cap pour attraper leur vol retour.

Bien que les trois aventuriers aient voyagé au Soudan en dehors des sentiers battus, ils ont tout de même pu constater les retombées des recettes pétrolières, notamment sur la route de Wadi Halfa à Dongola.

«On peut voir que dans quelques années, cette (nouvelle route) sera finie. On n'aura pas besoin de motos tout terrain - on pourra le faire avec n'importe quoi», affirme Tom Smith.