Véronique Beaudet a tellement mis du sien dans le rôle de la policière lesbienne de 19-2 que ses collègues la surnommaient «butch» sur le plateau de tournage. Discussion avec une tomboy assumée qui a son personnage dans la peau.

De qui t'es-tu inspirée pour interpréter une police lesbienne crédible?



Bérangère, c'est moi quand j'avais 15 ans. Je la connais, cette fille-là, parce que j'ai eu beaucoup de difficulté à accepter d'être une fille. J'ai joué au hockey jusqu'au niveau BANTAM dans les ligues de gars, je voulais être dans l'armée, je rêvais d'être une femme forte avec des muscles découpés comme Sarah Connor ou Nikita... Mais, en grattant, je me suis rendu compte que je compensais mon ultrafragilité par l'agressivité.



À quel point Bérangère te ressemble-t-elle?



Notre look est très semblable. Quand je me suis pointée à la première lecture du scénario, je revenais de la campagne et je portais de vieux jeans, ma casquette Beaver et une camisole. Claude Legault m'a dit en riant : «Tu t'es déguisée en Bérangère?» Mais non, je m'habille comme ça pour vrai! Je passe souvent pour une lesbienne à cause de mon apparence. Et depuis 19-2, les gens qui me croisent dans la rue pensent que je suis déguisée en mon personnage. Mais ça fait quatre ans que je l'ai, cette casquette-là... peut-être que je devrais la changer!



As-tu rencontré des policiers gais ou des policières lesbiennes pour t'aider à composer le rôle?



Oui, mais c'est presque par hasard, et ce n'est pas ce que je cherchais.  Pour moi, l'orientation sexuelle n'a rien à voir.  Ce qui m'importais, c'était de faire de Bérangère une excellente policière, alors c'est plus au niveau de la job sur le terrain que j'étais avide de renseignements.  Je suis quand même allée faire le tour des saunas et des bars dans le Village gai avec des policiers.  Au cours de mes nombreuses patrouilles, je me suis rendu compte qu'il y avait sans doute un plus grand ratio de policières lesbiennes dans les postes à Montréal comparativement aux régions, comme dans la vie en général, en fait. Mais, je ne crois pas qu'il existe de statistiques claires là-dessus.



Qu'est-ce qui a été le plus difficile dans ton interprétation?



La scène où Bérangère se bat avec Brouillard (Louis-Philippe Dandenault) pendant le party. Moi, dans la vie, tu ne peux pas essayer de me coucher à terre. Je vais me battre jusqu'au bout pour me défendre. Donc, quand il m'a agrippée, c'est tellement venu me chercher profondément que j'ai eu un réflexe de survie et je me suis presque battue avec lui pour vrai. Quand l'équipe nous a séparés, on braillait tous les deux et on avait des bleus. On s'est tous regardés après la prise : «Qu'est-ce qui vient de se passer?»



Penses-tu qu'en 2011, il y a encore des gens qui sont choqués de voir une lesbienne à la télé?



On en a pas vu tant que ça à la télé québécoise, des personnages de lesbiennes. Il y a eu beaucoup de gais, mais pas tellement de lesbiennes. J'ai l'impression qu'on tombe souvent dans deux tableaux : soit la «butch» à moustache, soit la jeune naïve qui ne sait pas où elle s'en va. Mais des lesbiennes ordinaires, celles qui mènent une vraie vie sans problème émotif, y en a pas tellement. C'est pourquoi j'ai voulu présenter une Bérangère forte et assumée, sans cliché.

Abonnez-vous à Urbania!

>>> https://www.urbania.ca/abonnement