C'est après la séparation avec sa femme, en 2008, que Philippe a offert sa liqueur séminale pour la première fois. Depuis, il offre ses services privés sur Internet, sous le nom de St-Joseph-de-l'Immaculée-Conception.    

Combien de fois as-tu donné du sperme jusqu'à présent?

Des centaines et des centaines de fois. En moyenne, j'en donne deux ou trois fois par semaine.

Et ça fonctionne?!

Jusqu'à maintenant, j'ai conçu plus d'une quinzaine d'enfants.

Les considères-tu comme les tiens?

Ce ne sont pas mes enfants, mais des enfants qui ont une partie de ma génétique. Je suis leur géniteur, pas leur père!

Qui est ta clientèle?

La moitié sont des couples lesbiens, 25% sont des couples hétérosexuels qui ont des problèmes d'infertilité et 25% sont des femmes seules.

Où trouves-tu tous ces gens?

Avant que ce soit proscrit, j'annonçais mes services sur Kijiji. Aujourd'hui, ça se fait beaucoup grâce au bouche à oreille de la part des clients satisfaits.

Avant de procéder au don de sperme, les futurs parents te rencontrent-ils pour une entrevue? Pour te demander une preuve de ton QI, genre?

On se donne rendez-vous à la bibliothèque pas trop loin de chez moi et je leur explique les procédures. C'est surtout moi qui parle pendant une heure. Je leur explique la procédure et je leur montre mes résultats de tests pour les MTS et le sida.

Comment peut-on s'assurer que ton sperme est de qualité?

Certains clients communiquent ensemble sur des forums : ils savent ainsi que les enfants sont en parfaite santé. Je suis aussi abstinent sexuellement et je passe des tests chaque année : si j'avais des maladies, je ne serais plus en affaires...

Comment est-ce que ça se passe lorsque tu donnes du sperme?

J'offre un «service à l'auto». Les clients viennent chez moi et je leur remets une seringue sans aiguille remplie de sperme, que la femme s'injecte ensuite dans le vagin pour procéder à l'insémination. Sinon, je vais chez les clients et je m'installe dans leur salle de bain pour remplir la seringue.

C'est pas gênant, parfois, de te masturber chez le monde?

Oui, surtout quand toute la petite famille attend sur le sofa que j'aie fini... Je me souviens des premières fois, j'étais aussi très nerveux parce que j'avais peur de ne pas viser correctement dans le pot ou de le renverser. Faut pas manquer son coup!

Apportes-tu des Playboy pour t'aider quand t'es en panne?

Non, mais si ça arrive, j'ai toujours mon iPod sous la main...

T'as jamais eu envie d'aller plutôt dans une banque de sperme?

J'ai 46 ans et, au Québec, celles-ci n'acceptent pas les hommes de plus de 40 ans, sous prétexte que le sperme est moins bon passé cet âge.

Quel est ton taux de réussite?

Pour les femmes de moins de 30 ans en bonne santé, c'est une affaire de quelques cycles. Plus les femmes sont âgées ou en mauvaise forme, plus ça prend de temps. J'ai une cliente qui a pris 12 cycles, ce qui est exceptionnellement long.

Quel est le prix de tes services?

C'est gratuit! Mais lorsque je me déplace en dehors de Montréal, je demande un dédommagement.

Si ce n'est pas l'argent, qu'est-ce qui te motive à donner ton sperme?

Je suis honoré que les gens veuillent des enfants à mon image. J'adore aussi servir ma clientèle lesbienne. Il n'y a pas de tabou, elles veulent mon sperme et je suis là pour le leur donner. Ma vocation de donneur me permet de participer au développement du Québec autant que je le puisse.

Comptes-tu voir «tes» enfants un de ces jours?

J'espère être disponible une fois, individuellement, pour chaque enfant qui aimerait me rencontrer. Je n'ai pas de problèmes à les voir pour leur expliquer que ça me fait plaisir qu'ils aient bénéficié de mon excellente génétique!