Envoyer des cartes de Noël à ses proches reste une tradition populaire. L'arrivée de l'internet avait sonné le glas des cartes en papier il y a quelques années, mais elles sont toujours là.

Les cartes de Noël exposées sur la cheminée, vous pensez que c'est révolu?

Chez Hallmark, entreprise qui vend des cartes de souhaits depuis plus de 100 ans, Noël est la période la plus achalandée de l'année (suivi de la Saint-Valentin et de la fête des Mères). Cindy Mahoney, présidente de Hallmark Canada, estime que, depuis quatre ans, il y a une légère hausse des ventes de cartes de Noël (elle ne donne pas de chiffres), et ce serait grâce aux milléniaux, surtout ceux qui commencent à être en couple et à avoir des enfants.

Elle observe que l'envoi des cartes virtuelles, qui existent depuis une vingtaine d'années, est en baisse. «Les milléniaux reprennent cette tradition et choisissent d'envoyer une carte en papier plutôt que virtuelle, certainement parce qu'ils passent toute la journée devant leurs écrans et qu'ils sont inondés de courriels», pense-t-elle.

Il y a une autre raison: ils savent qu'ils se distingueront de cette façon. Qu'on le veuille ou non, recevoir une carte par la poste fait toute la différence, et c'est une manière de se démarquer.

La présidente de Hallmark Canada observe que les milléniaux envoient leurs cartes à différents destinataires, comme les amis proches et les couples qu'ils fréquentent au quotidien. Leurs parents et grands-parents privilégiaient les membres de la famille.

Postes Canada indique qu'il y a, en décembre, une augmentation du volume du courrier mais, encore ici, pas de chiffres précis.

«Pensez-y! Vous vous souvenez de la dernière fois où vous êtes allé à la poste? Ce temps précieux que vous prenez pour transmettre vos voeux et écrire vos cartes de Noël... les gens qui les reçoivent sont vraiment très touchés», explique Julie Blais Comeau, spécialiste de l'étiquette.

«Ça se fait peut-être moins qu'avant, car on envoie des cartes virtuelles, on fait aussi de petites vidéos qu'on met sur Facebook, mais il reste que faire parvenir nos voeux de Noël avec une vraie carte, c'est une excellente façon de remercier les gens qui nous entourent. Que ce soient nos voisins, nos amis, la famille et même les relations d'affaires, on montre ainsi que notre communauté est importante à nos yeux.»

Elle ajoute qu'il est toujours agréable de recevoir une carte par la poste et d'avoir des nouvelles de nos proches ou lointains amis. «J'ai une amie que je connais depuis 50 ans. Quand je reçois sa carte de Noël, je suis contente de voir ses petits-enfants que je n'ai pas la chance de côtoyer. Je me remémore aussi tous les beaux moments passés avec elle, il y a aussi beaucoup de nostalgie qui accompagne ces cartes, et c'est ça aussi, Noël, pour les adultes. C'est la nostalgie», soutient Mme Blais Comeau.

Créer un rituel

Comme il y a de moins en moins de rituels dans notre société, pourquoi ne pas profiter de la carte de Noël pour en créer? C'est ce que suggère Chantal Dauray, fondatrice du site Nosrituels.com.

«C'est une manière de marquer le temps, année après année. On peut prendre une photographie en famille, on se prépare, on met une belle tenue et tous les ans, on crée sa carte et on garde un beau souvenir. Avec le succès de Pinterest et d'Etsy, il y a un retour à l'envie de faire des choses soi-même que l'on peut aussi fabriquer avec ses enfants. Cette tradition s'inscrit dans une volonté de créer des liens plus personnalisés, et c'est important», dit cette amoureuse des rituels.

Elle remarque que certaines familles, notamment aux États-Unis, envoient une lettre qui est une rétrospective complète de l'année de chaque membre de la famille et qui se termine par les projets et espérances pour la nouvelle année.

Un égoportrait de famille

N'est-ce pas une façon d'exhiber son bonheur familial? La famille est belle, notre sapin, majestueux, notre maison, bien décorée? «Oui, en effet, peut-être que la photo est un moyen de montrer que la famille est fière et se porte à merveille, mais ce n'est pas ce que vous allez retenir et ce qui vous touchera le plus. C'est le petit mot qui l'accompagnera. De toute façon, Facebook est là toute l'année pour faire briller les exploits de la famille!», pense Julie Blais Comeau.

Elle précise qu'il n'y a pas d'obligation de réponse à la carte, mais qu'on peut signifier que nous l'avons appréciée.

Le choix de la carte

Attention à la carte! «Elle doit correspondre à nos valeurs, notre culture et notre image», met en garde Julie Blais Comeau, fondatrice du site EtiquetteJulie.com. «Que ce soit à titre personnel ou professionnel, les cartes "made in China" peuvent choquer, surtout si vous avez des convictions écologiques», prévient-elle.

C'est le moment de soutenir des artisans et illustrateurs d'ici, ainsi que des causes comme celles d'UNICEF, d'Oxfam-Québec et d'autres organismes.

Par souci de l'environnement, les familles, mais aussi de nombreuses entreprises, choisiront d'envoyer une carte virtuelle. «Ça coûte moins cher, mais ce n'est pas seulement pour faire des économies, car il y a des compagnies qui vont investir dans une vidéo très travaillée qui servira à les faire connaître.»

Une tradition née chez les Britanniques

La tradition des cartes de Noël vient d'Angleterre. C'est en 1843 que la première carte est créée. Sir Henry Cole commande au peintre John Callcott Horsley un dessin en noir et blanc qui sera imprimé en 1000 exemplaires. «C'est une carte postale qui montre une famille qui célèbre Noël autour d'une bonne table et on voit de chaque côté des gens démunis. On exprime ici l'importance de penser aux plus pauvres à Noël», indique Sylvie Blais, historienne de l'art. Puis en 1848, la reine Victoria, mariée au prince Albert, va faire paraître une lithographie dans les journaux. C'est à partir de ce moment que l'envoi de cartes prend de l'ampleur et, vers 1860, les Américains vont développer le marché des cartes. Les années 60 ont constitué l'âge d'or des cartes de Noël. «Une famille québécoise moyenne envoyait environ 80 cartes par Noël», rappelle Mme Blais, qui a écrit le livre La Fête de Noël au Québec avec Pierre Lahoud.

Photo David Boily, La Presse

Les milléniaux, surtout ceux qui commencent à être en couple et à avoir des enfants, semblent renouer avec la tradition d'acheter des cartes de Noël pour leurs proches.