Deux tiers des lesbiennes, homosexuels, transsexuels et bisexuels vivant dans l'Union européenne n'osent pas se tenir par la main en public et près de 30% disent avoir été victimes de violences ces cinq dernières années, selon une enquête publiée jeudi à l'occasion de la journée mondiale contre l'homophobie vendredi.

«La peur, l'isolement et la discrimination sont des phénomènes courants» dans cette communauté (dite LGTB, en Europe), assure dans cette étude de l'Agence des droits fondamentaux de l'UE (FRA) son directeur Morten Kjaerum, soulignant qu'il est temps de promouvoir et de protéger ces droits fondamentaux.

Deux personnes sur trois ayant répondu ont peur de s'afficher en public. Parmi les hommes homosexuels, ils sont près des trois quarts à ressentir cette crainte, selon cette enquête rendue publique à La Haye et présentée comme la plus grande jamais menée en ligne sur le sujet dans tous les États membres de l'Union et en Croatie, qui doit entrer dans le bloc en juillet.

Près de 30% des 93 000 participants à cette étude ont été victimes de violences ou d'agressions au cours des cinq dernières années. Parmi eux, 30% des 7000 transsexuels ont dit avoir été agressés physiquement ou menacés de violences plus de trois fois ces 12 derniers mois.

Même dans des pays généralement tolérants envers leur communauté, certains se sentent victimes de discriminations et sont régulièrement agressés verbalement. «Il s'agit surtout d'agressions verbales, de la part de jeunes», explique un homosexuel habitant en Belgique cité dans le rapport et qui souligne que le nombre d'agressions a «fortement» augmenté depuis 4 ans.

Aux Pays-Bas, premier pays au monde à avoir légalisé le mariage entre homosexuels, en 2001, près de 20% des participants à l'enquête ont assuré avoir été l'objet de discriminations dans l'accès à des services comme les soins, la recherche d'un appartement, les sorties, les clubs de sport et à la banque. Dans cette catégorie, la France se situe avec 31% très légèrement sous la moyenne européenne (32%).

En plein débat sur le mariage homosexuel, l'agression d'un couple gai en avril dans les rues de Paris avait fait le tour de la presse internationale après la diffusion sur les réseaux sociaux de la photo du visage tuméfié de l'une des victimes.

Même dans les pays disposant de législations ad hoc et où les victimes sont généralement au courant de leurs droits, les agressions verbales ou physiques et les discriminations ne sont que rarement signalées à la police, assure la FRA.

«Je suis réticent à signaler quelque chose qui indiquerait que je suis gai, car je sais que la police va tout rejeter», assure un Français de 42 ans.

La raison la plus invoquée pour ne pas faire appel à la police est la croyance qu'une telle action «ne changera rien» ainsi que la peur de réactions homophobes de la part de la police.

C'est à l'école que tout commence

De grandes disparités ont été constatées entre les différents pays de l'Union, souligne la FRA. Moins de discriminations et moins de violences ont été vécues par les personnes LGBT vivant dans le Benelux et dans les pays scandinaves, mais aussi en République Tchèque et en Espagne.

Les transsexuels assurent eux que même dans des environnements généralement tolérants à l'égard des lesbiennes et des gais, ils se sentent discriminés, notamment dans l'accès aux soins de santé.

C'est à l'école que tout commence, assure la FRA: deux personnes sur trois y ont caché leur orientation sexuelle et ont été la cible de commentaires ou de comportements négatifs de la part de leurs camarades de classe.

À l'école, «les insultes constantes étaient insupportables et très peu de mesures étaient prises par les professeurs contre les harceleurs», a raconté un homosexuel de 25 ans habitant à Malte, également cité dans le rapport. «J'ai dû rester dans le placard jusqu'à l'âge de 18 ans à cause du harcèlement», ajoute-t-il.

Alors que 300 personnes venues d'organisations et de l'Union européenne se réunissent vendredi à La Haye pour discuter des mesures à prendre pour combattre l'homophobie à travers l'Union européenne, la FRA assure que «les États membres doivent veiller à ce que les élèves LGBT se sentent en sécurité à l'école, étant donné que c'est là que commencent souvent les expériences négatives» des membres de cette communauté, «les préjugés sociaux et l'exclusion».

Un soutien public de la part des hommes politiques rend également les choses plus faciles pour les membres de la communauté LGBT, ajoute la FRA, qui invite les États membres et l'Union à promouvoir un dialogue équilibré notamment par des campagnes de sensibilisation et via les institutions politiques et religieuses.