Denise Bombardier vit depuis près de 10 ans un amour passionné qu'elle raconte dans son nouveau roman, L'Anglais, en librairie demain. Un hommage à l'amour, à son mari et à la vie qui nous réserve toujours des surprises.

Lorsqu'elle parle de Jim, Denise Bombardier, 71 ans, a des étoiles dans les yeux. C'est du miracle de leur rencontre et de ce grand amour tardif dont elle a voulu témoigner dans ce 18e livre de sa carrière. «J'ai écrit cette histoire d'abord pour me convaincre qu'elle existe. Mais j'avais sous-estimé à quel point ce serait difficile de parler de quelque chose que je vis en ce moment. Pour l'écrire, j'ai été obligée de me remettre dans l'état d'angoisse du début.»

Denise Bombardier dit avoir voulu faire dans ce livre une «résonnance magnétique» du sentiment amoureux. Tout est là dans L'Anglais, à peine romancé: la première rencontre de D.B. avec Philip T. Spencer, universitaire francophile, lors d'un colloque à Belfast, les interrogations, les premiers émois, les révélations, la demande en mariage, la passion partagée... «Il y a beaucoup d'hésitation au début du livre. Pour moi, ça fait partie de la construction de la passion et de l'amour. On est dans une transe au début à cause du mystère de l'inconnu.»

Destin

Encore aujourd'hui, Denise Bombardier est émue par cet homme plus jeune qu'elle, beau, élégant et cultivé qui a attendu toute sa vie la femme idéale, et qui l'a choisie, elle. «Un homme qui attend, je n'ai jamais vu ça! Le chemin que j'ai parcouru pour arriver à lui a été pas mal plus rock'n'roll. Pourtant c'est lui qui est né à Liverpool, ville natale des Beatles, pas moi!» rigole celle qui a connu une vie amoureuse mouvementée, mais qui «ne regrette rien».

Denise Bombardier est toujours aussi surprise par la retenue toute british et la naïveté de son homme, qu'elle voit comme une forme de pureté qui la «réconcilie avec quelque chose de très profond» en elle, mais qui lui fait aussi perdre ses repères sur les relations hommes-femmes. «Il ne vit pas sur la même planète que nous, c'est clair.» Lorsqu'il a lu L'Anglais, la semaine dernière, il lui a d'ailleurs dit que le personnage masculin était «très intéressant», raconte-t-elle en souriant. «Mais c'est toi! que je lui ai répondu. C'est inouï, non? Dans le non-dit, je sens bien qu'il est bouleversé, mais si j'attends une déclaration, je ne le saurai jamais. Pour lui, c'est comme si ça allait de soi. Mais qu'est-ce qu'une femme peut faire de plus pour un homme qu'écrire un roman sur son histoire d'amour?»

Denise Bombardier affirme ne pas savoir ce qu'est le destin, mais s'est souvent demandé depuis 10 ans si ça ressemblait à ce qu'elle avait vécu. Elle a ainsi délibérément choisi de raconter cette histoire sous forme de conte de fées. «Pour montrer aux gens que ça se peut. Que le grand amour existe, que ce n'est pas vrai que tout finit mal.»

Fiançailles, mariage, robe blanche, la journaliste et auteure n'a pas lésiné sur les symboles et les rituels. Elle le sait, elle va à contre-courant de son époque et de son grand désabusement, mais elle tenait à donner du sens à son engagement dans un monde en perte de repères. «Parce que je crois que la nature profonde de l'humain n'a pas changé, même si la société, les rapports sociaux, les institutions ont changé. Nous sommes des êtres sociaux et se marier, c'est sortir de son nombril.»

Routine

Elle le dit clairement dans L'Anglais: ce grand amour qui a traversé les continents est son dernier et ne prendra fin que lorsqu'ils mourront. Le défi reste donc de ne pas se laisser endormir par la routine, grand ennemi de la passion. «Mettre l'amour entre quatre murs, c'est la grande menace.» Comment fait-on pour la combattre? «Moi, je bouge. Quand on sait qu'on veut garder son homme, on déménage, on rénove, on change les objets, les lieux, la moquette...» Mais encore faut-il savoir si c'est le bon! «On pense toujours que c'est le bon. Moi, j'y ai cru en tout cas. Mais cette fois-là, je l'ai su.»

Cette conviction intime est probablement une question d'âge, ajoute-t-elle. C'est la seule différence: on aime à 60 ans comme à 20 ans, elle en est convaincue. «La seule différence, c'est qu'on a une mémoire amoureuse. Certains peuvent être freinés par ça d'ailleurs. Mais quand on tombe amoureux à cet âge, on ne peut plus se leurrer soi-même.»

L'Anglais, de Denise Bombardier, éd., Robert Laffont, 186 p.