Qu'ils soient fans de Simple Plan, de Roch Voisine ou de Paul Anka, ils partagent tous la même passion pour leur idole. La cinéaste Yanie Dupont-Hébert les a suivis à travers trois générations, des plaines d'Abraham jusqu'au Japon, dans Je suis fan, un documentaire qui sera diffusé ce soir dès 20h aux Grands Reportages sur les ondes de RDI.

Être fan ne date pas d'hier. En fait dans les années 1800, on parlait déjà de la «Lisztomania» pour décrire l'hystérie des admiratrices qui s'évanouissaient devant le compositeur et pianiste hongrois Franz Liszt. «Le terme «Beatlemania» découle directement de celui-ci. Liszt était bel homme, mais aussi un pianiste au style bien particulier, très exubérant qui attirait les foules et suscitait l'émoi», explique la cinéaste Yanie Dupont-Hébert.

Galvaudé au fil des décennies, le terme «groupie» a peu à peu été remplacé par celui d'«admirateur» ou de «fan».

«C'est l'histoire d'une époque. L'arrivée du sida et l'assassinat de John Lennon ont définitivement changé le paysage autant chez les artistes que chez les fans. Aujourd'hui, les fans ont envie d'être amis avec l'artiste et qu'il les reconnaisse», précise Yanie Dupont-Hébert.

La réalisatrice du documentaire compare d'ailleurs la relation entre les artistes et leurs admirateurs à une véritable relation de couple.

«Chacun doit alimenter la relation pour qu'elle dure et évolue au fil des années. Les artistes ont bien compris qu'ils ont besoin de leurs fans et ils savent comment nourrir cette relation-là. Paul Anka, par exemple, qui a 70 ans, fait deux heures de spectacle et descend voir le public pour caresser des joues», explique-t-elle.

Éternellement fan

En s'entretenant avec trois différentes générations d'admirateurs, Yanie Dupont-Hébert s'est aperçue qu'être fan n'est pas une question d'âge.

«Chacun le vit à sa manière. Cécilia a 63 ans et mesure 1 m50. Dans les concerts de Paul Anka, surtout ne vous placez pas devant elle, car elle joue du coude! Pascale est une fan française de Roch Voisine qui est très timide et réservée, mais n'en est pas moins passionnée. Elle voyage plusieurs fois par année vers le Québec pour sa passion. Mais ce qui est encore plus impressionnant, c'est qu'elle a créé Union Roch's Fans, une association européenne d'entraide pour les admirateurs de Roch Voisine. Les membres s'entraident financièrement pour le transport, l'hébergement, etc. Ils créent même des événements», dit-elle.

Un phénomène féminin?

Si en Amérique du Nord être fan est plutôt une affaire de femme, c'est au Brésil et au Japon que les hommes expriment le plus leur attachement à leur idole.

«Au Québec, j'ai quand même croisé un monsieur qui s'appelle Roch Saumure. C'est un fan de Nanette Workman qui, à l'adolescence, l'avait contactée pour lui demander s'il pouvait lancer un fan-club pour elle. Et quelques années plus tard, il est devenu son gérant et il s'est même fait tatouer son visage», raconte Yanie Dupont-Hébert. «J'ai aussi rencontré Yuka, une jeune Japonaise qui est partie un an à Montréal pour apprendre l'anglais et le français afin de comprendre les paroles de son groupe préféré, Simple Plan», ajoute-t-elle.

Même passion, nouveaux moyens

Si la passion demeure la même d'une époque et d'un continent à l'autre, l'apparition des réseaux sociaux a fait évoluer la relation qu'artiste et fans entretiennent. Simple Plan, Roch Voisine et Paul Anka l'ont bien compris et échangent avec leurs admirateurs de manière quasi instantanée.

«Aujourd'hui les fans sont essentiels à la survie de l'industrie de la musique. Elle ne peut pas se passer des revenus que génèrent leurs différentes pratiques, et on ne parle pas que de consommation de spectacles ou de disques, mais aussi de l'ensemble des produits dérivés, des sites web et du contenu qu'ils font circuler. Les fans sont autant de porte-parole pour ces artistes», explique Line Grenier, chercheuse en musiques populaires à l'Université de Montréal.

On retrouve d'ailleurs sur le plus récent album du groupe Simple Plan This Song Saved My Life, une chanson inspirée des réponses de leurs fans à la question posée sur Twitter: «Qu'est-ce que notre musique a changé dans votre vie?».

Je suis fan, ce soir 20h à RDI. Une version longue du documentaire sera diffusée au printemps sur ARTV et le 21 mars sur les ondes de TFO.

«Fan à vie» de Simple Plan

À 24 ans, Véronique Tremblay est admiratrice depuis maintenant une décennie du groupe Simple Plan.

«Je les suis depuis leur tout premier album. À l'adolescence, j'étais plus groupie. C'est l'âge où tu veux en marier un et c'est l'homme de ta vie. Aujourd'hui, la maturité a pris le dessus», s'amuse-t-elle. «Maintenant je me considère plus comme une fan à vie qu'une fan finie. J'étais au concert de U2 l'été dernier et en voyant des cinquantenaires chanter toutes leurs chansons pendant trois heures, je me suis dit que ça serait pareil dans quelques années avec Simple Plan!»

Pour la jeune femme, c'est avant tout l'accessibilité des membres du groupe qui l'a séduite. «C'est vraiment quand je les ai vus en spectacle pour la première fois en 2003 et que j'ai compris à quel point ils étaient accessibles, que j'ai vraiment accroché. Les gars de Simple Plan sortent toujours après les shows et prennent le temps de rencontrer leurs fans. Au début du mois de décembre, je suis partie les voir à New York. Je l'avais mentionné sur Twitter et ils ont répondu: «Cool on a hâte de vous voir». Depuis plusieurs années, ils me reconnaissent. Si on se croise dans la rue, on se dit bonjour et on se fait la bise», dit-elle fièrement.