Où serez-vous vendredi matin, aux aurores? Sommeillant dans l'indifférence républicaine la plus totale ou rivé devant votre petit écran, votre service de thé anglais et des scones à portée de main? Au moment où commentateurs, blogueurs et «réseauteurs sociaux» se préparent à analyser sous toutes ses coutures le mariage royal de William et Kate, la planète s'apprête aussi à assister aux noces de la décennie. Serez-vous du cortège nuptial?

Mathieu Lussier, bassoniste du quintette Pentaèdre et pour divers ensembles, dont Les Violons du Roy, se définit comme un «souverainiste et républicain québécois, profondément épris de monarchie». Vendredi, jour de mariage royal, il sera devant la télé pour observer le défilé des invités en route vers l'abbaye de Westminster.

«Ma fascination pour la famille royale remonte à mes années d'ado. Je la dois surtout à ma grand-mère d'origine irlandaise, une abonnée au magazine Point de vue, qui rapportait tous les potins du Gotha.» À l'adolescence, Mathieu Lussier s'amusait à construire la généalogie royale. Plus tard, il a eu un coup de foudre pour l'Angleterre, en lisant les livres d'Edward Rutherford.

Selon lui, la fièvre planétaire pour l'union du premier-né de Charles et Diana avec Kate Middleton, roturière aux bonnes manières, témoigne d'un «besoin de symboles ayant accompagné toutes les sociétés».

«Il y a dans ce mariage quelque chose de rassembleur, qui est plus solide dans l'esprit des gens qu'une curiosité people pour des jeunes actrices de 21 ans», estime-t-il.

La sociologue Diane Pacom attribue notre intérêt collectif - et un peu obsessif - pour le mariage de Kate et William à «l'atomisation d'une société fragmentée et individualiste, où les moments de joie collective sont très rares».

«On ne peut pas voir ces noces autrement qu'en parallèle avec la mort de Diana et comme un phénomène de globalisation absolue. On a rarement la possibilité de vivre quelque chose d'aussi grand, à l'échelle humaine. On aime aussi l'idée que nos coeurs vont battre en même temps que ceux des jeunes mariés», explique cette professeure de l'Université d'Ottawa, qui se dit toutefois «renversée» de voir comment des petites filles de «3, 4 ou 5 ans vivent dans un univers de princesses».

«C'est une mythologie qui ne meurt pas. Il y a une industrie d'organisateurs de mariage qui se nourrit de ça. Et on est attendris et inquiets pour ce prince qui a vu mourir sa mère.»

Entre ironie et plaisir coupable

Sur Facebook, au début de la semaine dernière, l'humoriste Alex Perron a annoncé qu'il était en train de «magasiner des centres de table pour le mariage à la Plaza Saint-Hubert».

Perron, un monarchiste dans le placard?

«Jamais de la vie! Mais tout ce qui touche à ce mariage m'amuse énormément, parce que je trouve tout ça tellement niaiseux. Pauvres eux: rien ne leur appartient dans cette affaire, estime le comédien, qui compte bien regarder l'événement en reprise. On veut savoir ce qui s'est passé et, surtout, voir qui a «upstagé» le chapeau de la reine.»

La comédienne Chantal Lamarre, qui a révélé son penchant royaliste dans le documentaire Ma reine, jettera sans doute un coup d'oeil au «party médiatique nuptial» de vendredi prochain, même si elle est convaincue que William et Kate sont de jeunes gens «fort ennuyants».

«Elle (Kate Middleton) a été complètement dressée pour le marier. Ses parents ont attendu de voir où William allait s'inscrire pour choisir le collège de leur fille», dit Chantal Lamarre, qui a reçu une assiette à l'effigie des futurs mariés Kate et William, qu'elle ajoutera à sa collection d'artéfacts aux couleurs de la famille royale britannique.

Étienne Boisvert, porte-parole québécois de la Ligue monarchiste du Canada, commentera le mariage royal à l'émission Salut, bonjour!, au réseau TVA. Le jeune monarchiste explique qu'au contraire d'autres villes canadiennes - comme Victoria, Toronto ou Ottawa, où l'allégeance à la famille royale est plus forte -, Montréal compte peu de restaurants, salons de thé et hôtels qui ouvriront leurs portes aux aurores pour un petit-déjeuner autour de la noce royale. «Chez nos membres québécois, les fêtes sont plutôt le résultat d'initiatives personnelles.»

Étienne Boisvert espère que ses commentaires et interventions pendant la noce royale pourront «démystifier la monarchie et amener les gens à percevoir ce mariage comme un événement rassembleur».

Que nous soyons royalistes, adeptes de people ou simples curieux, nous sommes tous conviés aux épousailles aussi historiques que médiatiques des futurs roi et reine d'Angleterre.

Le pub Burgundy Lion (2496, rue Notre-Dame O.) ouvrira ses portes à 5h30 pour servir le thé et le petit-déjeuner aux admirateurs de Kate et William.

Nous avons demandé à Ianik Lajeunesse, président d'Altitude C., agence montréalaise spécialisée en événements, de nous offrir quelques conseils pour organiser une fête maison à l'honneur de la famille Windsor. M. Lajeunesse suggère aux monarchistes ironiques de créer leurs propres chapeaux, à l'image des dames excentriques anglaises. On servira aussi petits sandwichs aux concombres, scones et thé English Breakfast. «On servira le champagne une fois que les mariés auront échangé leurs voeux!»

Pour impressionner la visite, on peut aussi offrir les assortiments du mariage princier hors série de Charbonnel et Walker, fournisseur de chocolats anglais fins auprès de Sa Majesté la reine et vendus chez Holt Renfrew.