Après Miss Québec, Miss Arabia? Soucieuse de doter sa communauté d'un visage, la Montréalaise Zahia Belbachir organisera samedi la première élection d'une Miss Arabia à Montréal. Une élection 100% coquetterie, 100% féminité et garantie sans hommes.

Le concept de Miss Arabia est inconnu ici, mais a déjà fait ses preuves en France. «Là-bas, c'est du banal. Miss Kabylie, Miss Arabia, Miss France, vous avez toutes les miss là-bas, même des Miss Patate Auvergne et des Miss fromage!» s'esclaffe Zahia Belbachir, Franco-Algérienne installée à Montréal depuis une dizaine d'années et organisatrice de l'élection. Les candidates sont âgées de 16 à 25 ans et sont issues des communautés musulmanes. Ce n'est pas leur physique qui compte, mais leur bagage, assure Mme Belbachir. «On ne cherche pas des filles de 1m80. Non. On veut changer l'idée de la femme parfaite qu'on voit dans les magazines», dit-elle.

Exit les traditionnels maillots de bain des Miss. Les prétendantes au titre défileront trois fois: d'abord dans le costume de leur pays d'origine, puis en robe blanche et enfin, en robe de soirée. Une façon de rendre hommage aux racines des jeunes filles, tout en faisant connaître la communauté musulmane. «Je veux que les femmes s'adaptent à la vie ici et fassent connaître notre culture auprès des autres communautés.» La soirée est ouverte aux femmes de tous horizons, mais jalousement fermée aux hommes. «Les femmes aimeraient bien porter des décolletés, des belles robes, des belles coiffures et je veux qu'elles soient à l'aise à 100%, qu'elles se défoulent!»

La coquetterie: entre tradition, religion et modernité

Dans sa boutique de la rue Bélanger, Zahia Belbachir propose des vêtements traditionnels algériens, des robes de soirée comme des robes de mariée. Zahia concilie islam et coquetterie, avec un certain succès. Depuis deux ans, sa boutique aux couleurs conviviales et chaleureuses attire les femmes en quête de vêtements compatibles avec le port du voile mais aussi de costumes traditionnels jusque-là introuvables à Montréal. «Je suis la première à faire ça. Au départ, je voulais faire du prêt-à-porter, et puis j'ai eu cette idée», explique-t-elle.

Le costume, pièce maîtresse de la garde-robe des femmes du Maghreb selon Mme Belbachir, est entièrement fait à la main, à Montréal. Mieux: elle n'hésite pas à adapter le costume aux besoins et exigences de sa clientèle. «Je fais pour toutes les communautés», revendique-t-elle. En boutique, le costume algérien avec sa veste en velours brodée et son sarouel doré suscite bien des convoitises. «Cet ensemble, je l'ai vendu à des Italiennes. J'aurais bien aimé leur vendre le sarouel avec, mais elles étaient pas trop habituées. Alors je leur ai fait autre chose: la mini-jupe. Y a pas de souci, s'amuse-t-elle. Même les hommes veulent que je leur fasse des costumes, comme Elvis Presley.»

Bas les voiles

Zahia Belbachir porte le voile depuis la mort de sa soeur, Hassiba, dans une prison américaine en 2005. Son décès avait suscité une vague d'indignation en Algérie, d'où la famille est originaire. Elle qui n'avait jamais porté le voile a alors senti le besoin de se rapprocher «des choses importantes». Le voile, toutefois, suscite son lot de préjugés, regrette-t-elle, sans perdre son sens de l'humour.

«Dès que tu es dehors avec le voile, les gens te regardent et se disent: «Ah la pauvre! Elle sort des cavernes». Mais désolée! Ça se peut que je vive mieux que toi (éclat de rire), lance-t-elle. J'en ai marre de cette idée, c'est un bout de tissu sur la tête, mais la personnalité elle est là. Quand une femme met une mini-jupe, personne ne lui demande pourquoi. Pourquoi moi, je dois toujours me justifier?»

Pour Mme Belbachir, le voile n'est pas un renoncement à la coquetterie. Loin de là. «C'est impossible que des femmes n'aiment pas la mode, le maquillage, la coquetterie. Impossible! Les femmes voilées sont coquettes à la maison. Quand je sors, je me parfume, je me maquille. Ce n'est pas pour les autres, c'est pour moi! Je m'en fous de ce que pensent les autres. Moi je suis à l'aise. Je n'ai pas envie de choquer, je veux passer inaperçue, être intégrée ici, tout en étant musulmane et fière de l'être», dit-elle.

L'élection de Miss Arabia aura lieu samedi, à partir de 18h, à la salle Le baron royal, au 6020 Jean-Talon Est.

La boutique Soucamelias est située au 4533, rue Bélanger.