Est-ce qu'on est grand, quand on a 32 ans? Plus posé, certainement. Mais a-t-on fini de rêver? Ça, certainement pas.

C'est un peu la conclusion à laquelle on arrive, après le visionnement d'Avoir 32 ans, présenté dans le cadre du Festival des films du monde, et rediffusé ces jours-ci à l'ONF.

L'objectif des réalisateurs Robbie Hart et Luc Côté était ambitieux. Après avoir réalisé une série 16 ans plus tôt, qui s'intitulait Avoir 16 ans, sur des jeunes adolescents grandissant dans différents pays en voie de développement, ils ont voulu retrouver quelques-uns d'entre eux, 16 ans plus tard, donc, pour faire le point. Un «méchant voyage», oui, comme le résume le réalisateur et producteur Robbie Hart.

Qu'était-il advenu de la jeune Jamaïcaine Rosie, mère à 16 ans? Et le Brésilien Pintinho, qui rêvait de devenir joueur de soccer professionnel, a-t-il fait carrière comme il le souhaitait? Et la Thaïlandaise Puttinan, a-t-elle fini par quitter Bangkok, pour enseigner dans son village natal, près des siens? Sonam, ce moine bouddhiste déterminé, est-il toujours dans son monastère en Inde? Et Idrissa, enfin, ce jeune Touareg qui rêvait de modernité, buvant du coca et dénigrant le thé, a-t-il fini par troquer son chameau pour un 4x4?

Malgré leurs origines toutes très distinctes, leurs destins, interrogations et espoirs ont plusieurs points en commun. L'objectif du film est d'ailleurs précisément là: «Nous voulions illustrer ce qu'il y a d'universel dans les questionnements et les cycles de vie», souligne le réalisateur.

Dans le documentaire, les réalisateurs juxtaposent des images tournées à l'adolescence avec des scènes plus récentes. La comparaison est poignante. Oui, ils ont changé. Physiquement, s'entend, c'est évident. Mais intérieurement? Pas tant que ça. Ils ont chacun gardé cette franchise spontanée qui fait tout l'intérêt du film. Et surtout, surtout, ils ont gardé leurs rêves. Ce désir, malgré le temps et les années, d'aller de l'avant. De s'imaginer, pas nécessairement ailleurs, mais meilleurs. Après tout, on est encore jeune, à 32 ans!

Les racines

Ainsi, si certains avaient des ambitions irréalistes à 16 ans, ils sont un peu retombés sur terre. Peut-être pour le mieux. Quand on tombe sur terre, on retrouve aussi ses racines, comme en témoigne avec éloquence le cas d'Idrissa, qui, s'il reniait ses traditions à 16 ans, est devenu, à 32 ans, un fier Touareg, désireux de transmettre à son fils toutes les valeurs de son propre père.

«Quand on prend de la maturité, nos sources sont le phare de notre identité», résume Robbie Hart. C'est d'ailleurs la valeur principale que partagent tous les protagonistes: le respect des siens, de sa famille, de son village, bref, de tout ce qui représente d'où l'on vient. C'est évident dans tous les cas ici présentés: même Sonam, le bouddhiste qui a finalement fui son monastère et renié ses voeux de moine. S'il ère aujourd'hui en France, cherchant à recoller les pots cassés, il souhaite retourner près des siens. Sa famille et son fils lui manquent. Et il n'a jamais renié sa foi. Idem pour Puttinan, qui, si elle n'est pas encore retournée dans son village, avoue que son bonheur ne peut être complet loin des siens, notamment loin de sa mère. Ou encore pour Pintinho, déçu d'avoir raté sa carrière de joueur professionnel (il a été salement floué), et déçu, surtout, de décevoir sa mère (pour qui il est quand même un grand champion).

«On sent vraiment l'amour et l'appréciation de la famille, indique le producteur. On a perdu de ça un peu ici. Là-bas, le noyau familial est très important. C'est une valeur très importante. Peut-être qu'on a à apprendre d'eux.»

C'était prévisible, le film se termine sur une question: et à 48 ans, où vous voyez-vous? Les rêves se poursuivent...

Avoir 32 ans, jusqu'au 13 septembre, à 19h à l'ONF. Les projections sont suivies d'une discussion avec les réalisateurs.

Photo: Robbie Hart et Luc Côté

Il y a 16 ans, Puttinan rêvait de quitter Bangkok afin d'enseigner dans son village natal. Elle n'y est toujours pas retournée et avoue que son bonheur est loin d'être complet loin des siens.