«Dieu n'existe probablement pas» versus «Dieu existe»: athées et croyants se livrent une drôle de guerre en Espagne en placardant des slogans radicalement opposés sur des bus urbains.

Dans cette bataille de pancartes publicitaires, s'affrontent à distance le «bus de Dieu», qui fait croisade depuis le 24 décembre dans la périphérie sud de Madrid, et les «bus athées», qui circulent depuis lundi dans le centre de Barcelone.

À l'origine de la première initiative: le pasteur évangéliste de Fuenlabrada Paco Rubiales, à la tête d'une petite «Église» de 55 membres, qui a fait afficher sur un bus de la ligne n° 493 le message: «Oui Dieu existe. Profite de la vie avec le Christ».

Le pasteur, qui prévoit de faire placarder ce message sur un autre bus du centre-ville, explique avoir déboursé 2000 euros pour ces deux affiches, pour une durée de trois mois, une campagne financée «uniquement par la quête auprès des fidèles».

«Il s'agit d'un travail d'évangélisation, nous voulons dire au monde que Dieu existe et qu'une vie n'est vraiment pleine que si elle a Jésus-Christ pour protagoniste», explique le pasteur.

«C'est la campagne des bus athées à Londres qui nous a donné l'idée de répondre de cette manière», confie-t-il.

Une campagne athée sévit en effet depuis quelques semaines à Londres, avec des slogans placardés sur 800 autobus et dans le métro de Londres, qui compte sur le soutien de l'Association humaniste britannique (BHA). Elle est financée par des dons qui ont dépassé 140 000 livres (150 000 euros).

Cette campagne a aussi inspiré l'Union espagnole des athées et des libre-penseurs (UAL), qui a fait placarder depuis lundi sur plusieurs autobus de Barcelone une affiche aux couleurs vives proclamant en catalan: «Dieu n'existe probablement pas. Arrête de t'inquiéter et profite de la vie».

«Cette campagne n'est pas dirigée contre les croyants, elle ne s'adresse même pas à eux. Elle se dirige aux athées, régulièrement menacés d'enfers, crémations éternelles et autres tortures» dans ce pays à forte tradition catholique, explique à l'AFP le président de l'UAL en Catalogne, Albert Riba.

«Nous voulons dire (aux non-croyants): "soyez tranquilles, Dieu n'existe probablement pas"», ajoute M. Riba.

L'association souhaite étendre la campagne dans le reste du pays, à Madrid, Valence, Bilbao ou Séville, en fonction de l'argent qu'elle parviendra à réunir.

Sur son site internet, où elle récolte des dons pour son initiative, elle indiquait avoir récolté jusqu'à lundi un total de 15 550 euros.

Qu'en pensent les usagers? À bord d'un bus athée, sur la ligne n°14 à Barcelone, Marc, étudiant de 27 ans, estime que diffuser un tel message «aurait été impossible il y a quelques années». Son amie Andrea, 25 ans, est persuadée que le «bus aurait pu être incendié pour beaucoup moins».

«Je ne savais même pas que je voyageais dans un bus athée... et ce n'est pas une annonce publicitaire qui va ébranler ma foi», réagit Mercé, un catholique pratiquante de 46 ans.

À Aluche, quartier sud de Madrid, un retraité qui attend le n°493, la ligne du «bus de Dieu», s'énerve: «c'est un mensonge, Dieu n'existe pas! Si je veux voir des messages comme celui-ci, je n'ai qu'à aller dans une Église!».

Pour Albert Riba, la campagne des bus athées va ouvrir un débat nécessaire, dans un pays où «20% de la population se déclare athée».

«L'autre jour, j'ai parlé avec une famille où parents et enfants avaient abordé le sujet. Malgré leurs divergences, ils ont pu avoir une conversation apaisée» sur la question, se réjouit-il.

La guéguerre ne fait que commencer. E-Christians, une association chrétienne, a fait un appel aux dons pour financer une nouvelle campagne contre les bus athées.