Comment bien commencer une journée? En prenant un bon petit-déjeuner! À moins que vous surveilliez votre poids? Une étude américaine révèle que sauter de temps en temps le petit-déjeuner serait une façon raisonnable de perdre quelques kilos.

Selon David Levitsky, professeur de nutrition et de psychologie à l'Université Cornell, dans l'État de New York, il y a une véritable croyance selon laquelle si on se prive de petit-déjeuner, on compensera plus tard au cours de la journée en mangeant davantage. Le professeur prouve au contraire qu'il y aura moins de calories absorbées. «Toute ma vie, on m'a dit de prendre un petit-déjeuner, j'ai été élevé de cette façon. C'est le sacro-saint petit-déjeuner! Le résultat de cette recherche va choquer beaucoup de gens, mais nous absorbons beaucoup trop de calories dont le corps n'a finalement pas réellement besoin», affirme David Levitsky, joint au téléphone par La Presse.

Un mécanisme

Pendant quelques jours, le chercheur a étudié les habitudes alimentaires quotidiennes de 30 volontaires (adultes) divisés en deux groupes, ceux qui prennent leur petit-déjeuner et les autres qui ne mangent rien le matin. Résultat : ceux qui n'ont pas mangé le matin ont consommé moins de calories dans leur journée que les autres. «Notre corps développe le mécanisme de la faim parce qu'il y est habitué. On lui répond en mangeant, mais on pourrait s'abstenir. On est conditionné», souligne le professeur.

Selon lui, notre corps peut s'adapter et s'habituer à tout. «Nous avons de graves problèmes d'obésité aux États-Unis, constate-t-il. Les pathologies telles que le diabète, l'hypertension ou les maladies cardio-vasculaires viennent toutes du fait que nous mangeons plus de calories que nous n'en dépensons. Nous devons trouver des moyens d'en consommer moins. Ce que je préconise est de sauter de temps en temps le petit-déjeuner, disons une ou deux fois par semaine. Et vous perdrez du poids. Je sais que ça va susciter la controverse, mais c'est la vérité.»

Or, presque au même moment, une autre étude démontrait à quel point il est bénéfique de prendre de copieux petits-déjeuners. Plus on mangera de calories le matin, moins on aura envie de grignoter pendant le reste de la journée, ont conclu des chercheurs de l'Université de Tel-Aviv en Israël.

Un repas essentiel

Pour Marie-Josée LeBlanc, nutritionniste chez Extenso, centre de référence en nutrition de l'Université de Montréal, le petit-déjeuner est essentiel pour la bonne gestion de son poids. Il est important d'acquérir de bonnes habitudes alimentaires. «Quand on se réveille le matin et que cela fait au moins 8 à 10 heures que nous jeûnons, le cerveau a besoin de sucre et le corps, d'énergie. Si notre corps en est privé plus longtemps, il va réduire sa dépense d'énergie et son métabolisme de base. Dès qu'on va prendre un apport calorique, c'est là où on va gagner du poids. Penser qu'on va maigrir en supprimant le petit-déjeuner, à long terme, c'est l'inverse qui se produira», explique-t-elle. En ce qui a trait aux calories,  «il est démontré que les personnes qui ne déjeunent pas sont portées à consommer plus d'aliments gras et sucrés pendant la journée».

Selon elle, cette recherche contient des lacunes: «Les volontaires étaient confinés en laboratoire et ils avaient une offre alimentaire limitée. Dans la vraie vie, quand on saute un petit-déjeuner et qu'on a une fringale, on mange ce qui nous tombe sous la main et ce ne sont pas les meilleures choses. Le ventre vide, on aura de la difficulté à se rendre au dîner. Au travail, on se dirigera vers une machine distributrice qui propose des aliments très sucrés. Or, on ne mesure pas cet effet dans l'étude puisque les volontaires étaient isolés dans un laboratoire.»

«Le repas le plus négligé»

«Plus on saute le petit-déjeuner, plus ça devient problématique parce que le corps va s'y habituer, note Geneviève O'Gleman, nutritionniste et coanimatrice de l'émission Cuisine futée, parents pressés à Télé-Québec. Au début, l'estomac crie famine, après il baissera les bras. Quand on entend les gens dire qu'ils n'ont pas faim le matin, c'est parce qu'ils n'ont pas déjeuné depuis longtemps. Le corps ne signale plus la faim, mais il faut briser cette mauvaise routine.»

Les familles québécoises accordent trop peu d'importance au petit-déjeuner, peut-être par manque de temps. «C'est le repas le plus négligé», poursuit Mme O'Gleman, auteure de Famille futée, dont la sortie est prévue en octobre 2013. «Le matin, on est à la course, on va très vite. Un muffin avec un café, ce n'est pas suffisant. On a absolument besoin de protéines et c'est ce qui fait défaut dans nos déjeuners typiques pain-confiture, muffin, céréales. Les protéines, c'est notre source d'énergie de longue durée. C'est ce qui va  soutenir notre estomac. Il y a plusieurs façons de consommer des protéines: yogourt, oeufs, noix, fromage, beurre d'arachide. Si on ne prend que du sucre, après 45 minutes, on va avoir une chute d'énergie suivie d'une fringale.»

Le défi auquel il faut faire face est de prévoir le petit-déjeuner de la même façon qu'on planifie les autres repas. «Si on a pris le temps le week-end de préparer un pain aux bananes ou des galettes maison, déjà ça se passera mieux le matin. Ou ne serait-ce que d'avoir des fruits surgelés pour faire un smoothie, ça se fait rapidement! Il y a moyen de s'alimenter correctement sans que ça prenne trop de temps. Quand on déjeune bien, on est plus efficace et plus concentré. Il y a donc de réels avantages sur le plan de notre performance», affirme Geneviève O'Gleman.