Ça y est, le décompte chocolaté du calendrier de l'avent est amorcé. Dans les prochaines semaines, on croulera sous les cannes en bonbon, les After Eight, les biscuits, l'invitation à succomber à une deuxième pointe de tarte ou à la larme de Baileys dans le café. L'indice glycémique moyen de la population monte en flèche pendant les Fêtes. Poison, plaisir ou douce drogue, le sucre?

À l'automne 2004, lors d'un passage à Tout le monde en parle, Janette Bertrand est passée aux aveux. À une certaine époque de sa vie, l'auteure d'Avec un grand A assouvissait ses rages de sucre à même le pot de cassonade, ce qu'elle appelait ses «brosses de sucre».

«Sur le plan chimique, le sucre me fait beaucoup de bien. Depuis que je suis toute petite, depuis que mon père me déculpabilisait de ne pas être un garçon en me donnant du sucre, c'est une récompense. Le sucre, pour moi, c'est de l'amour.»

Mme Bertrand a arrêté les «brosses de sucre» depuis un moment déjà. Mais avant, elle est allée jusqu'à fouiller dans l'habit de neige de son fils en quête d'un bonbon oublié. Si elle a fait la paix avec son plaisir coupable préféré, Mme Bertrand reconnaît toujours aimer le sucre.

«J'ai encore des rages. Si j'écris pendant deux ou trois heures d'affilée, je dois m'arrêter pour prendre quelque chose de sucré. C'est une drogue qui va sur les hanches», concède Janette Bertrand, qui avoue consulter en premier la carte des desserts lorsqu'elle mange au restaurant. «Je ne me prive pas, mais je ne mange pas n'importe quel gâteau ou chocolat: il faut que ce soit à mon goût. Et j'adore la crème glacée.»

Aux antipodes de Janette Bertrand, il y a Julie Audette. Il y a quelques années, cette «coach en alimentation» a lancé les Défis sans sucre, où des amateurs de sucre repentants et motivés tentent de survivre 30 jours sans leur dose de glucide. L'objectif: se défaire d'une dépendance à une substance aussi inutile que toxique.

Après une formation en Californie à l'Institut Check, Julie Audette a lancé son offensive contre le sucre. «Les bienfaits d'arrêter le sucre sont grands: on a plus d'énergie, notre humeur et notre concentration s'améliorent», soutient celle qui déplore que les efforts menés durant l'année sont souvent abandonnés pendant le temps des Fêtes. «Le problème avec les Fêtes, c'est qu'on mange n'importe quoi, n'importe quand, sans écouter les signes de son corps. On veut faire plaisir à sa tante, à son père, à sa mère...»

Le sucre: histoire émotive et politique

Pour les congénères de Janette Bertrand, le sucre a une symbolique culturelle et émotive très forte. «Chez les Québécois qui étaient pauvres, on recevait surtout avec des gâteaux. Dans ma famille, où nous étions 13 enfants, ma mère avait l'habitude de faire quatre desserts. S'offrir une Cherry Blossom, ce n'était pas juste un luxe: c'était surtout une façon de se récompenser de sa semaine», rappelle l'auteure et animatrice.

Dans l'imaginaire occidental, les friandises, gâteaux et sucreries sont surtout associés au monde de l'enfance, souligne Florent Quellier dans son ouvrage Gourmandise, histoire d'un péché capital.

«Du bonbon réclamé par la petite Aurore dans La belle au bois dormant (Perrault, 1695) aux dragées surprises de Bertie Crochue (Harry Potter à l'école des sorciers, 1998), sans oublier les fenêtres en sucre de la maison de la sorcière dans Hänsel et Gretel (1812) des frères Grimm, les sucreries appartiennent de longue date à l'univers de la littérature pour enfants, notamment à sa dimension féérique.»

Dans son documentaire L'empire du sucre (2005), le cinéaste Brian McKenna révèle comment les enjeux liés aux îles sucrières des Antilles ont été plus importants, pour le sort du Canada, que la bataille des plaines d'Abraham. Après la guerre de Sept Ans, la France a eu l'occasion de reprendre le Canada. Or, elle a choisi de conserver les îles des Antilles.

«À cette époque (au milieu du XVIIIe siècle), le lobby du sucre était aussi fort que l'est aujourd'hui le lobby du pétrole», indique le cinéaste, qui souligne que le sucre continue de faire des victimes de nos jours. Et s'il faut montrer du doigt un vilain, il vaut mieux s'en prendre au sirop de maïs riche en fructose de la nourriture industrielle qu'à la tasse de sucre blanc dans les gâteaux de Mme Bertrand.

«Les lobbies du sucre sont encore assez forts pour forcer les gouvernements à ne pas faire le lien entre l'obésité et le sucre. Ils ont le même pouvoir qu'avaient jadis les sociétés de tabac», avertit Brian McKenna.

Le «vrai» temps des sucres est commencé. Gare aux «brosses de sucre», aux «brosses» tout court - l'alcool est du sucre pur! - et au dernier morceau de sucre à la crème qui vous reluque avec insistance. Mais, bon, il y a toujours janvier pour jeûner...

Le 10 décembre, à l'émission Ricardo (Radio-Canada, à 11h), Janette Bertrand donnera sa recette de gâteau Succès (qui était jadis servi aux invités de Parler pour parler).

Délicieux et nourrissants... Idéal pour les Fêtes

Brownies sans sucre et sans gluten de Julie Audette

Ingrédients (Pour 12 morceaux)

11/4 t. de dattes dénoyautées

9 c. à table de poudre de cacao de bonne qualité

1/4 t. d'huile de noix de macadamia

1/2 t. de nectar d'agave ou miel cru

2 t. (450g) de haricots garbanzo (pois chiches) en conserve, rincés et drainés

4 oeufs bios

1/2 c. à thé de poudre à pâte

1 c. à thé de cannelle moulue

Préparation

Préchauffer votre four à 350 ºF. Mettre les dattes dans une tasse à mesurer pour liquide et couvrir avec de l'eau chaude. S'assurer que toutes les dattes sont couvertes. Laisser reposer pendant environ 10 minutes. Jeter environ le quart de l'eau des dattes et mettre le reste au mélangeur ou au robot culinaire afin d'obtenir une pâte lisse de dattes et eau.

Mettre la pâte de dattes dans un grand bol et y ajouter le cacao, l'huile, le nectar d'agave et bien mélanger le tout. Réserver.

Combiner les haricots et les oeufs au mélangeur ou au robot culinaire et mélanger jusqu'à obtention d'un mélange soyeux. Réserver.

Ajouter la préparation de dattes à la préparation de haricots et bien mélanger.

Ajouter la poudre à pâte et la cannelle à la préparation. Bien mélanger.

Verser le mélange dans un moule à gâteau antiadhésif de 9 po (23 cm) ou dans une assiette à tarte. (Si vous utilisez du verre, vous pouvez beurrer votre moule.)

Mettre au four pendant 45 minutes (vérifier la cuisson selon la puissance de votre four!), laisser refroidir au moins 15 minutes, couper en morceaux et servir. Réfrigérer le reste.

(Recette tirée du livre The Healthiest Meals on Earth de Jonny Bowden, Ph.D., C.N.S.)