Un comité consultatif de l'autorité américaine du médicament, la FDA, a recommandé jeudi le lancement sur le marché américain d'une nouvelle pilule «du surlendemain», déjà disponible en Europe, qui risque de rouvrir le débat sur l'avortement.

À l'unanimité, les onze experts de la FDA ont estimé que la pilule «Ella» du laboratoire français HRA Pharma, qui interrompt une grossesse jusqu'à cinq jours (120 heures) après un rapport sexuel, était efficace et présentait une bonne tolérance. L'avis est consultatif et ne lie pas la FDA, qui toutefois suit en général les recomandations de ces experts.«Nous sommes ravis que ce comité ait pu confirmer l'efficacité de notre produit. Nous sommes optimistes» quant au feu vert de la FDA, a indiqué à l'AFP la jeune patronne américaine de HRA, Erin Gainer.

La décision finale de la FDA est attendue dans quelques mois et HRA espère une commercialisation «à la fin de l'année», via un partenaire américain, Watson Pharmaceuticals. Si elle est positive, «Ella» sera distribuée comme en Europe sur ordonnance.

Sur ce secteur concurrencé par la pilule du lendemain Plan B et son générique Next Choice, HRA, dont le chiffre d'affaires est de 36,5 millions d'euros, espère un marché de «plusieurs centaines de millions de dollars», a affirmé Mme Gainer. La licence de la molécule, inventée aux États-Unis, a été acquise par le laboratoire français qui a mis au point sa première application clinique.

L'allongement du délai pour une contraception d'urgence (5 jours au lieu de 3 jours pour «Plan B», vendue sans ordonnance) risque de susciter une polémique de la part des anti-avortement, parfois violents aux États-Unis. Ceux-ci assimilent l'effet de la nouvelle pilule à un avortement plutôt qu'à un contraceptif.

Par précaution, deux officiers de police avaient été chargés de veiller sur la réunion ouverte au public dans un hôtel de la banlieue de Washington, où les débats des médecins se sont déroulés sans incident.

«Les effets secondaires les plus courants ont été des nausées, des maux de tête, des douleurs abdominales et menstruelles, une fatigue et des vertiges», ont indiqué les experts de la FDA, d'après les études réalisées sur plus de 4 700 femmes.

La composition chimique d'«Ella», qui empêche l'ovulation, est proche de la pilule abortive RU-486 capable d'interrompre une grossesse jusqu'à neuf semaines après les rapports. La RU-486, introduite il y a 10 ans aux États-Unis, avait soulevé l'opposition des mouvements anti-avortement.

«L'éléphant qui est dans la pièce, c'est-à-dire la question que tout le monde se pose, c'est de savoir si ce médicament provoque une sorte d'avortement», s'est interrogé un médecin consultant de la FDA.

«Ce médicament n'est pas à utiliser lorsqu'on est déjà enceinte», a répondu la patronne de HRA Pharma. Les experts de la FDA ont en outre posé beaucoup de questions autour de son efficacité, apparemment moindre, auprès des femmes en surpoids.

Une dizaine d'organisations d'aide aux femmes sont intervenues devant les experts, une majorité d'entre elles recommandant la mise sur le marché d'«Ella».

«Les États-Unis ont l'un des taux de grossesses des adolescentes les plus forts des pays industrialisés. Ce taux est six fois plus élevé qu'aux Pays-Bas, quatre fois plus qu'en Allemagne et trois fois plus qu'en France», a noté Sarak Audelo, responsable d'Advocates for Youth.

Parmi les opposants, Wendy Wright, présidente de l'organisation Concerned Women for America (CWA), a comparé la nouvelle pilule au RU-486, évoquant sept décès qui ont accompagné sa mise sur le marché.