Sur les réseaux sociaux, un nouveau mouvement de fierté est né: #acnepositivity. Une foule de vedettes et d'inconnus osent se mettre à nu, révélant une fois pour toutes au grand jour leurs points noirs, boutons et autres imperfections.

Pour faire le point sur un phénomène auquel personne n'échappe, mais que tout le monde, ou presque, tente de camoufler, nous avons posé 10 questions à deux experts: Pierre-Marc Gervais, pharmacien propriétaire à Montréal, et Julio Jasso, chef du département de dermatologie du Centre hospitalier régional de Lanaudière. Voici, en résumé, ce que nous avons retenu.

1. L'acné, est-ce vraiment un passage obligé?

Malheureusement, oui. C'est (quasi) inévitable. Selon les estimations, de «80 à 85 % des gens souffrent d'acné à l'adolescence», confirme le pharmacien Pierre-Marc Gervais, que ce soit quelques points noirs sur le nez ou des boutons jusqu'au bas du dos. Ce qu'il faut savoir, c'est que l'acné est due à une accumulation de sébum (substance huileuse produite par nos glandes sébacées). Quand nos pores sont obstrués (à cause de peaux mortes, ou encore d'une bactérie, la fameuse Propionibacterium acnes), surgissent alors points noirs, points blancs, boutons ou kystes. Les facteurs de risque sont hormonaux (d'où leur prédominance à l'adolescence), génétiques (si vos parents en ont souffert, vous avez d'excellentes chances - 80 %, nous dit le dermatologue - d'en souffrir à votre tour) et environnementaux. «Alors oui, tout le monde est exposé», renchérit Julio Jasso.

2. Faut-il souffrir en silence et attendre que ça passe?

Oui, ça finit généralement par passer tout seul. Mais non, inutile de souffrir en silence. «Il existe des traitements pour améliorer ou maîtriser les symptômes», fait valoir le pharmacien, soulignant ici l'importance de ne pas sous-estimer la douleur provoquée par certains boutons, les risques de cicatrices, et surtout le poids de tout cela en matière d'estime de soi. En vente libre, un seul ingrédient à rechercher, puisque c'est le «seul dont l'efficacité a été démontrée», dit-il: le peroxyde de benzoyle. Retenez donc ce nom et oubliez tout le reste.

3. Les crèmes plus chères sont-elles vraiment plus efficaces?

Bonne nouvelle: non. «Le traitement n'est pas nécessairement coûteux», confirme le dermatologue Julio Jasso. En fait, pour des cas mineurs d'acné (moins de 10 boutons environ), tout ce qu'il vous fait, c'est d'un savon «neutre» pour nettoyer le visage (ou la zone affectée) deux fois par jour, sans plus. Ensuite, choisissez un produit à base du fameux peroxyde de benzoyle (en vente avec ou sans ordonnance, selon la concentration) selon votre type de peau. «Si vous avez la peau sèche, optez pour une crème, la peau grasse, un gel», ajoute Pierre-Marc Gervais.

4. Peut-on se concocter des produits maison pour lutter contre les boutons?

Mauvaise nouvelle pour les adeptes du DIY. Nos experts sont ici unanimes: aucune recherche (ou un nombre insuffisant pour que ce soit convaincant) n'a jamais démontré qu'un masque au miel, à l'argile ou une quelconque huile essentielle était efficace hors de tout doute contre l'acné. «Ce n'est pas prouvé par la science, donc on conseille d'éviter», tranche notre dermatologue. Parce que certaines huiles peuvent bloquer davantage les pores de la peau, et que d'autres substances pourraient provoquer des allergies, mieux vaut effectivement être prudent. Évidemment, nuance le pharmacien, «si vous faites une recette et que pour vous, ça marche, et s'il n'y a pas d'effet secondaire, il n'y a pas de problème...»

5. On sait tous qu'il ne faut pas percer les boutons, mais tout le monde le fait. Pourquoi?

Par souci «cosmétique», parce qu'on croit «aider», ou parce que certains boutons sont effectivement «douloureux», répond le pharmacien. Tous les dermatologues vous diront toutefois qu'il ne faut surtout pas le faire. Parce qu'on risque d'aggraver son cas et de causer des cicatrices. Pierre-Marc Gervais est toutefois moins catégorique. «Dans certains cas, avec la bonne façon, on peut le faire. Mais il y a risque d'aggraver le problème si le bouton n'est pas prêt», nuance-t-il. Des extracteurs de comédons sont d'ailleurs en vente en pharmacie. Avis aux amateurs: une dermatologue américaine amasse une petite fortune (et accumule des dizaines de millions de vues) sur YouTube en publiant des vidéos «éducatives» - et très explicites - de «pétage de boutons», justement. Elle s'est d'ailleurs baptisée «Dr. Pimple Popper». Âmes sensibles s'abstenir.

www.youtube.com/channel/UCgrsF4TYwmrV0QsXb8AoeHQ



6. Quand faut-il consulter?

C'est la grande question. En cas d'acné modérée à sévère (plus de 10 boutons environ), évidemment, mais surtout «s'il y a des répercussions dans la vie du patient», suggère Julio Jasso, dermatologue. «On consulte s'il y a un impact psychologique.» Un professionnel pourra en outre voir si certaines de vos habitudes de vie seraient à revoir. Le saviez-vous? La vitamine B12 (présente dans plusieurs suppléments pour combattre le stress et la fatigue) peut causer l'acné, tout comme une diète particulièrement riche en produits glycémiques. Parfois, un bilan hormonal s'impose aussi, notamment pour les cas d'acné adulte, qui touche de 20 à 30 % des 20 à 40 ans.

7. On connaît tous quelqu'un qui est venu à bout de son problème d'acné en adoptant un régime végétalien...

«Et on connaît tous aussi quelqu'un de végétalien qui a un gros problème d'acné», dit Julio Jasso en souriant. Malheureusement, s'il y avait une recette miracle à l'acné, ça se saurait. «L'acné est multifactorielle! L'alimentation peut jouer un rôle, mais il y a aussi d'autres facteurs: la génétique, les hormones, etc.»

8. Jadis, on disait que les boissons gazeuses et le sucre donnaient des boutons. Est-ce vrai?

«C'est très difficile à prouver, fait valoir le dermatologue. Ce que la science a seulement prouvé, c'est une association entre la production de sébum et les produits très glycémiques.» Mais encore une fois, nuance. «Il y a une association, mais ce n'est pas la cause principale.» Alors à nouveau, pas de miracle ni de solution universelle: changer de régime vous aidera peut-être. Essayez de réduire les sucres ou les produits laitiers, et voyez par vous-même. «Voyez si ça aide ou pas. C'est vraiment propre à chacun, ajoute le pharmacien. Il n'y a pas de recette magique.»

9. Est-ce que la pilule contraceptive peut aider, ou pas?

Ce n'est pas universel non plus, mais «pour la plupart des femmes», effectivement, la pilule contraceptive peut aider à combattre l'acné.

10. Et qu'en est-il du cannabis?

Nos experts ont été un peu surpris par la question. Mais à bien y penser, convient le dermatologue Julio Jasso, le cannabis pourrait effectivement aider. «Il n'y a pas eu d'étude, mais comme cela relaxe, il pourrait y avoir un effet d'amélioration, par la détente.» Mais prudence: «Il n'y a pas ici de mécanisme qui réduit le sébum. Ce n'est donc pas une recommandation!»

Sur Instagram

Les comptes voués au mouvement #acnepositivity se multiplient. Objectif: en finir avec la honte et reconquérir son estime de soi. Une photo à la fois. De jeunes femmes osent et s'exposent. Selon Pierre-Marc Gervais, pharmacien, le mouvement a ceci de positif qu'il démontre à quel point l'acné est un «problème courant». «Voir que même des gens connus en ont, même des idoles, ça peut être bien, dit-il. Cela aide à comprendre que c'est un problème de santé pour lequel il existe des solutions.»

> #acneisbeautiful: https://www.instagram.com/explore/tags/acneisbeautiful/

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> #acne.rip: https://www.instagram.com/acne.rip/

> #anacne_journey: https://www.instagram.com/anacne_journey/

> #acneblog: https://www.instagram.com/acneblog/

Photo fournie par Pierre-Marc Gervais

Pierre-Marc Gervais, pharmacien propriétaire

... et sept conseils

> Deux fois par jour

On se lave le visage et le cou deux fois par jour, sans plus (pour éviter d'irriter la peau), avec un savon doux. Dix minutes plus tard, on applique sur la zone affectée (et non sur le bouton uniquement) une fine couche de peroxyde de benzoyle.

Une fois par mois

Si vous tenez à vous faire des masques, limitez-vous à une fois par mois. En asséchant trop la peau, vous risquez de provoquer une réaction «compensatoire» et une surproduction de sébum.

«Non comédogènes»

On cible les produits dits «non comédogènes», sans ingrédients risquant de bloquer les pores de la peau.

Huit semaines

Patience. Il n'y a pas de secret: un traitement, pour être efficace, prend du temps. Il ne faut donc pas s'attendre à des améliorations significatives avant deux ou trois mois.

Gare au maquillage...

Attention, en tentant de camoufler ses boutons, de ne pas aggraver le problème avec des produits qui risqueraient de bloquer les pores de la peau. Pour guérir, l'épiderme a besoin de respirer.

... puis aux bandeaux, casques, écouteurs...

Tout ce qui frotte sur la peau risque de l'irriter. Soyez vigilant.

... sans oublier le soleil

La crème solaire est de mise. Tous les produits pour l'acné rendent en effet la peau plus sensible. On évite les coups de soleil.

Photo fournie par Julio Jasso

Julio Jasso, chef du département de dermatologie du Centre hospitalier régional de Lanaudière