Jeunes, vieux, hommes, femmes: la maladie mentale ne fait pas de discrimination. Mais les préjugés qui l'entourent demeurent, malgré de nombreux pas dans la bonne direction. Cinq ans après le lancement de son programme Bell Cause pour la cause, l'entreprise réitère son engagement en investissant quelque 100 millions qui soutiendront diverses initiatives. Portrait du programme et de ceux qui ont vécu, et surmonté, cette épreuve.

Ouvrir le dialogue

L'information a circulé sur plusieurs tribunes ces dernières années: un Canadien sur cinq sera affecté par la maladie mentale durant sa vie. Du nombre, seulement un sur trois osera demander de l'aide. Malgré les progrès accomplis, c'est bien souvent en le chuchotant qu'on parle encore des troubles mentaux.

Pas moins de 81% de la population canadienne affirme être plus au courant des enjeux liés à la santé mentale qu'il y a cinq ans, selon un sondage Nielsen commandé par Bell Cause pour la cause. Le message destiné à sensibiliser les gens à l'importance des questions entourant la santé mentale a donc été entendu.

Ces récents efforts pour ouvrir le dialogue doivent être alimentés, croit la présidente de Bell Cause pour la cause, Mary Deacon, qui a elle-même perdu deux frères à la suite de dépressions. La stigmatisation qui accompagne la maladie est encore bien présente et l'aide insuffisante, a-t-elle souligné en conférence de presse. Par ailleurs, les problèmes de santé mentale sont toujours la première cause d'invalidité au travail et coûtent annuellement plus de 50 milliards de dollars aux contribuables canadiens en perte de potentiel.

Cette somme, qui sera bonifiée en fonction des dons recueillis dans le cadre des différentes activités de financement, permettra également de soutenir la recherche et d'appuyer des organismes locaux et communautaires qui viennent en aide aux victimes.

«J'étais trop intense», dit Marie Soleil Dion

Après avoir traversé une période de dépression à l'adolescence, la jeune comédienne de VRAK la vie et de Subito texto Marie Soleil Dion s'adresse tout particulièrement aux jeunes pour leur parler de son expérience et leur envoyer un message d'espoir.

Tu as toi-même vécu des moments difficiles. Peux-tu nous en parler?

En 5e secondaire, j'ai vécu un épuisement. J'étais une enfant extrêmement performante. Je voulais tout bien faire et tout faire en même temps, et j'ai exagéré. J'étais présidente de l'école, capitaine de l'équipe d'impro et de l'équipe de théâtre. J'étais dans un programme d'éducation internationale, j'avais des maths fortes, une moyenne de 90%... J'étais trop intense. Du jour au lendemain, j'avais plus envie d'aller à l'école. Je ne voulais même plus finir mon secondaire. J'ai fait une dépression.

Y avait-il des signes annonciateurs de cette dépression?

Il y a une fatigue qui s'installe. Mais quand on a 15 ou 16 ans, on se dit qu'on n'a pas le droit d'être fatigué, que les gens autour de soi peuvent se dire qu'on n'a rien d'autre à faire que d'aller à l'école. Mais ça se peut, des jeunes qui se mettent beaucoup de pression et qui veulent être parfaits.

Ton entourage a-t-il su détecter ta détresse à ce moment-là?

J'ai eu la chance d'être bien entourée et de pouvoir en parler. Rapidement, j'ai eu de l'aide. J'ai réussi à finir mon secondaire et à avoir une vie qui est aujourd'hui équilibrée. Moi, c'est sûr que je suis quelqu'un de stressé. Aujourd'hui, je sais reconnaître les signes et prendre des moyens, comme la respiration et la méditation, pour y faire face.

De quelle façon souhaites-tu t'impliquer dans cette cause?

Ce que je veux dire aux jeunes, c'est que quand quelque chose comme ça arrive, il faut le prendre tôt. Tu as le droit d'être plus faible, de demander de l'aide et de te reposer. Tu as le droit d'en prendre moins avant de sombrer dans un tourbillon qui pourrait devenir nocif. Parles-en à un prof, à un ami, à un coach, mais ne reste pas embourbé là-dedans. Il faut ouvrir la discussion.

«Je suis tombé dans les excès»

Il n'y a pas si longtemps, l'ancien joueur de la Ligue canadienne de football Étienne Boulay a touché le fond du baril et tenté de mettre fin à ses jours. Cette détresse, il est possible de l'éviter en s'ouvrant aux autres, tient-il à dire aux hommes, spécialement...

Quel est ton historique avec la santé mentale?

J'ai fait plusieurs commotions cérébrales [NDLR des études montrent que des lésions cérébrales peuvent provoquer différents troubles de l'humeur, une incapacité fonctionnelle et du stress, entre autres symptômes] et j'ai une personnalité excessive que j'ai canalisée dans l'entraînement. Je faisais tout à la perfection pour avoir de grandes performances. Quand j'ai pris ma retraite en 2012, j'ai eu une période de transition difficile où je suis tombé dans les excès de party. J'ai vécu une sorte de crise d'identité. La dépression, la remise en question, ça me tient à coeur.

Lors de ta dépression, as-tu pu en parler à des gens autour de toi?

J'ai un entourage extraordinaire, mais je suis très orgueilleux. Je l'étais encore plus à ce moment-là. Nous, les sportifs, sommes habitués de gérer nos problèmes nous-mêmes. Avec Bell Cause pour la cause, l'idée est de défaire les tabous, surtout auprès des garçons qui voient souvent d'un mauvais oeil le fait d'aller chercher de l'aide. Je souhaite leur montrer que ce n'est pas un signe de faiblesse. Au contraire, ça nous rend plus forts.

Est-ce qu'on reste fragile après un passage comme celui-là?

Je pense qu'on est plus conscient de ses émotions, plus en contact avec ce qu'on vit et qu'on est mieux équipé. Avant, quand je commençais à être stressé, je faisais l'autruche. Je m'évadais et ça ne faisait qu'empirer les problèmes!

Quels sont les outils que tu as développés pour éviter ces pièges?

J'ai été suivi par un psychologue et j'ai entamé un processus pour tenter de découvrir qui je suis, ce que j'aime faire, quelles sont mes valeurs. Comme je suis excessif, je dois trouver d'autres façons de canaliser mon énergie en m'entraînant, en faisant du sport, en passant du temps en famille et en m'entourant de bons amis et de personnes nourrissantes.

Quelques ressources

Que faire quand on est en détresse? Voici quelques ressources en santé mentale.

Jeunesse, J'écoute offre une consultation anonyme, par clavardage (du jeudi au lundi, de 18 h à 2 h) ou en tout temps par téléphone. 1 800 668-6868

Les Déprimés Anonymes propose une ligne d'écoute confidentielle, 7 jours sur 7, entre 8 h et minuit. 514 278-2130

L'association Revivre offre du soutien aux personnes souffrant de troubles anxieux, dépressifs ou bipolaires. 1 866 738-4873

Suicide Action Montréal : 24 h sur 24, 7 jours sur 7, des intervenants reçoivent les confidences au 1 866 APPELLE (1 866 277-3553)