Courir sans soutien-gorge, chez une femme qui l'a toujours fait, ne causerait pas de ptose de la poitrine, bien au contraire.

« Le sein est tout à fait capable de s'adapter à la pesanteur. Le fait d'être préventif de façon abusive et de soutenir le sein sans raison médicale fabrique une fragilité des tissus. Le sein devient dépendant du soutien-gorge », indique Jean-Denis Rouillon, médecin à Besançon et professeur à l'Université de Franche-Comté. Depuis 1997, il étudie le comportement de la poitrine chez les femmes qui ne portent pas de soutien-gorge. Plus de 320 femmes ont participé (ou participent toujours) à cette étude préliminaire.

Aussi, cet expert a pu observer que les femmes qui n'ont jamais porté de soutien-gorge ne présentent pas de douleur à la course, a-t-il remarqué. « Elles se sentent mieux comme ça, elles sont plus à l'aise en raison de la liberté gestuelle, de la respiration. Et puis, elles n'ont pas les seins qui présentent des signes de dégradation comme le veut la vox populi. »

Des thèses appuyées sur son expérience le confirment. C'est le cas de celle de Laetitia Pierrot, de la faculté de médecine et de pharmacie de l'Université de Franche-Comté, intitulée: Évolution du sein après l'arrêt du port du soutien-gorge, étude préliminaire longitudinale sur 33 sportives volontaires. Ses résultats? Après quelques mois de pratique sportive sans soutien-gorge, l'inconfort perceptible au départ chez ces jeunes femmes s'est estompé (et a disparu chez 88 % d'entre elles au bout d'un an), tandis que le sein s'est adapté et s'est redressé.

Selon le Dr Rouillon, on doit considérer le soutien-gorge comme une orthèse du point de vue de kinésithérapie ou de la physiothérapie, comme le sont la genouillère, la ceinture lombaire ou la ceinture de grossesse. « Il y a des indications médicales à mettre ces orthèses, pas le soutien-gorge. Mon idée est qu'on fabrique un faux besoin. »

Résilient ou fragile?

« Le sein n'est pas un organe fragile qui doit être soutenu et protégé », confirme Martine Duclos, physiologiste et endocrinologue au CHU Clermont-Ferrand.

Malgré tout, le Dr Rouillon n'encourage pas les femmes à brûler leur soutien-gorge, sportif ou pas. « Si une femme a porté un soutien-gorge pendant des années et qu'elle a des seins volumineux (et surtout gras), je miserais de prudence. Elle peut ressentir de l'inconfort, voire de la douleur, puisque les tissus des seins ont été fragilisés. »

Coauteur de l'ouvrage La femme sportive (De Boeck), Michel Guinot abonde dans le même sens. « Même si les conséquences tissulaires de la mobilité excessive des seins durant la pratique sportive ne sont pas connues, la réduction des douleurs et l'amélioration du confort durant les efforts impliquant des sauts ou des courses justifient le port d'un soutien efficace, y compris chez les pratiquantes qui ont une poitrine de faible volume », écrit ce médecin au CHU de Grenoble et spécialiste en traumatologie du sport.

Dix trucs pour faire le bon choix

Acheter un soutien-gorge pour la course peut être un vrai casse-tête. Nous vous proposons 10 conseils afin de vous aider à faire le bon choix en boutique.

  1. BOUGER

    Durant l'essayage, on bouge, on saute, on court sur place, on lève les bras. Idéalement, on porte le soutien-gorge 5 minutes, le temps que l'inconfort (s'il y a lieu) se manifeste. À noter que la taille peut varier selon les fabricants. Mieux vaut faire l'essai de plusieurs modèles afin d'en tester le confort. Et on n'hésite pas à demander conseil. En cas de doute, on n'achète pas.

  2. RESPIRER

    Le soutien-gorge ne doit pas comprimer le thorax, ce qui pourrait nuire à la respiration. La bande inférieure doit se déposer délicatement sur la cage thoracique, sous la poitrine, sans remonter pendant un mouvement. On doit pouvoir glisser facilement un doigt dessous. Si le soutien-gorge est trop grand et que la bande se déplace, il y aura frottement et irritation.

  3. COMPRESSER OU ENCAPSULER?

    Même si les études divergent sur la question, il est souvent conseillé aux femmes à forte poitrine d'opter pour un soutien-gorge avec bonnets séparés qui encapsulent les seins. Les femmes à poitrine menue trouvent un soutien adéquat (et un confort) avec un modèle à compression qui écrase la poitrine. Dans tous les cas, le tissu doit couvrir tout le sein et ne doit pas plisser.

  4. DÉGAGER

    Si la bretelle n'est pas ajustable, on s'assure de pouvoir glisser un doigt sous la bretelle, à l'épaule. À noter: une bretelle trop large peut être source d'inconfort et d'irritation. Les bretelles croisées sont à considérer si on a une forte poitrine.

  5. ENTRETENIR

    Idéalement, on lave son soutien-gorge au cycle délicat ou à la main avec du savon doux. On le suspend pour sécher afin de préserver l'élasticité.

  6. REMPLACER

    On remplace son soutien-gorge tous les ans, ou selon l'utilisation. Certains calculent qu'un soutien-gorge a une durée de vie trois fois plus courte que celle d'une paire de souliers de course. D'autres suggèrent de remplacer le soutien-gorge après 40 lavages. Exagéré? On y va avec notre gros bon sens: si les tissus semblent usés, étirés, et que ça crée un inconfort, on change.

  7. ÉVITER

    On laisse de côté les modèles avec armatures métalliques et coutures apparentes qui favorisent l'irritation cutanée. Si attache il y a, on privilégie l'attache dorsale à l'attache frontale et on s'assure que les crochets restent bien couverts.

  8. VARIER

    À l'approche des menstruations, la poitrine peut prendre de l'ampleur chez plusieurs femmes. Si bien que certaines auraient avantage à se procurer un soutien-gorge de taille supérieure spécialement pour cette période du mois.

  9. USER DE PRUDENCE

    Le jour d'une course, on porte un soutien-gorge de sport auquel on est habituée. On évite de défiler avec son dernier achat qui, au bout de quelques kilomètres, pourrait malheureusement nous causer de mauvaises surprises!

  10. PERSÉVÉRER

    On s'est trompé? C'est dommage, mais ça risque d'arriver. L'achat d'un bon soutien-gorge passe souvent par un processus d'essais et d'erreurs. Il n'y a qu'au fil des foulées qu'on sait réellement si confort et soutien il y a.

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Mamelons irrités?

L'irritation du mamelon (« jogger's nipple ») survient surtout chez l'homme, en présence de sueur (ou humidité) lorsque le tissu frotte sur la peau sensible du mamelon, ce qui crée de l'abrasion. Certains courent avec des sparadraps, de la vaseline ou de la crème de zinc. Chez la femme, un soutien-gorge bien ajusté permet bien souvent d'éviter ce fâcheux pépin.