Des chercheurs grenoblois spécialisés dans les sciences du neutron espèrent contribuer par leurs travaux à la mise au point d'un médicament liquide aimanté pour traiter le cancer, qui ne devrait cependant pas voir le jour avant plusieurs années.

Des scientifiques de l'Institut Laue-Langevin (ILL) ont exploité la mise au point récente par une équipe de l'université de Bristol, en Grande-Bretagne, d'un savon magnétique, et travaillent sur la structuration des molécules pour l'appliquer notamment en médecine.

«D'ici deux ans il sera possible à d'autres scientifiques de procéder à des essais en laboratoire d'un médicament liquide aimanté qui pourrait cibler les cellules cancéreuses et éviter de détruire les cellules saines comme c'est le cas avec certains traitements actuels», s'enthousiasme Isabelle Grillo, chercheur à l'ILL, lors d'une visite de presse organisée mercredi pour les 40 ans de l'organisme international.

En janvier dernier, l'équipe britannique a fabriqué après plusieurs années de recherche un savon aimanté, en lui incorporant une molécule de fer qui dans l'eau réagit à un champ magnétique. Contrôlé par un simple aimant, le savon riche en fer pourrait servir au nettoyage des marées noires.

«Les aimants utilisés dans ces expériences sont petits et donc loin de ceux qu'il faudrait utiliser pour des m2 de mers polluées», nuance Isabelle Grillo, qui voit toutefois dans cette découverte une nouvelle étape dans la compréhension de l'organisation des molécules.

L'ILL, qui exploite un réacteur nucléaire constituant une des sources à neutrons les plus puissantes au monde, a ainsi pu comprendre pourquoi le fer, qui n'a aucune propriété magnétique dans l'eau, se comporte différemment avec les savons également appelés tensioactifs.

«En comprenant la structuration des molécules tensioactives grâce à des appareils qui explorent la matière au niveau du nanomètre, on peut imaginer reproduire les mêmes propriétés à la médecine», résume la scientifique.

Le développement d'un médicament ne devrait pas aboutir avant une «dizaine d'années», prévient cependant Mme Grillo.