Un Québécois sur quatre n'a pas de médecin de famille. Obtenir une consultation médicale ressemble parfois à un sport extrême. Même quand on a accès à un médecin de famille, profite-t-on assez de la rencontre tant attendue? Non, estiment le Dr Serge Goulet et le psychologue Bruno Fortin, auteurs de Comment améliorer mon médecin? Le patient efficace, en librairie depuis vendredi.

Une consultation médicale, c'est sérieux, disent les deux collègues de l'unité de médecine familiale de l'hôpital Charles-Lemoyne. Le patient devrait être préparé, et ce, bien avant de franchir la porte du cabinet. Souvent, ce n'est pas le cas. «Les patients oublient d'amener l'information pertinente, comme les résultats de glycémie, la liste des médicaments qu'ils consomment, leurs antécédents familiaux. Ça crée une perte de temps qui n'est pas à leur avantage. La rencontre devient inefficace», note Bruno Fortin. Pourquoi est-on si consciencieux quand on consulte un médecin pour ses enfants et pas pour nous? se demande-t-il.

Le patient devrait avoir couché sur papier une liste de questions et d'inquiétudes qu'il souhaite partager avec son médecin. Il devrait aussi avoir noté les informations pertinentes quant aux symptômes qui l'inquiètent: «Où sont-ils logés? Sont-ils fréquents? À quel moment ont-ils commencé? Quand surviennent-ils? Sont-ils accompagnés d'autres signes?»

«La principale erreur du patient est de penser que le médecin connaît tout, devine tout. Il ne donne pas assez d'informations», souligne le Dr Serge Goulet. Pire, des patients mentent à leur médecin. «Les patients ne suivent pas le traitement comme prescrit dans une proportion de 20% à 40% pour les maladies aiguës, de 30% à 60% pour les maladies chroniques et de 50% à 80% quand il s'agit de prévention», écrivent les auteurs. Le médecin en est bien conscient, alors rien ne sert de lui cacher la vérité!

«Raconter l'histoire dont on est le héros, c'est amusant à la taverne, mais ce n'est pas indiqué chez le médecin, indique Bruno Fortin. Si on a eu une aventure extraconjugale qui fait qu'on est à risque d'avoir une infection transmise sexuellement, il est important de le faire savoir au médecin pour être traité s'il y a lieu. Ça peut être une occasion de réfléchir à la façon dont on en parlera à sa conjointe. Le médecin n'est pas là pour juger.»

Le Dr Serge Goulet croit que la relation de confiance entre médecin et patient s'est beaucoup améliorée depuis le début de sa pratique, il y a 30 ans. «Il reste encore du travail à faire, de part et d'autre. Mais nos jeunes médecins apprennent beaucoup à explorer les attentes des patients et leur vécu, tandis que les patients sont plus ouverts et osent davantage parler de sujets délicats. Ils sont plus à l'aise, surtout si on leur donne la chance de s'exprimer.»

Mais 15 minutes, c'est vite passé. «Dans un contexte de travail rapide et urgent, c'est un art d'aller chercher en quelques secondes les bonnes informations. Il faut bien cibler et écouter, étudier le langage verbal et non verbal du patient, comme un visage blême, les traits tirés», dit le Dr Serge Goulet.

Pour ne pas perdre une seconde de ce bref entretien, on ne devrait pas tenter de former son médecin avec le dernier article du Reader's Digest, selon les auteurs, ni tenter d'en faire un ostéopathe ou un homéopathe. «Le médecin vous dira d'être prudent, surtout avec les produits naturels. Mais ce n'est pas son job», souligne M. Fortin.

Les patients sont très informés aujourd'hui et, si cela s'avère parfois embêtant pour le médecin, le Dr Goulet y voit surtout un avantage. «Les patients sont proactifs. Quand ils me demandent de vérifier une information entendue dans les médias, c'est parce qu'ils doutent et qu'ils ont confiance en moi. C'est un devoir pour moi de leur donner l'information juste. En même temps, j'apprends sans cesse, mes patients me rendent meilleur. C'est ce qui me garde allumé, passionné.»

«Quand on a un bon médecin de famille, c'est pour la vie, dit Bruno Fortin. C'est donc une longue suite de 15 minutes qu'il faut optimiser. Ça vaut la peine de collaborer en tant que patient pour le garder longtemps.»

Comment améliorer mon médecin? Le patient efficace, Bruno Fortin et Serge Goulet, Éd. Fides, 248 p., 19,95$

Quelques trucs

Avant



-Clarifier le but de la visite.

-Noter sur papier les inquiétudes et les questions (ne pas oublier le papier!).

-Être à l'écoute de sa douleur, des symptômes.

-Demander à quelqu'un de nous accompagner.

Pendant

-Poser les questions les plus importantes dès le départ.

-Être honnête et fournir le plus d'informations sur notre état.

-Ne pas hésiter à poser des questions, à prendre des notes.

-Demander de l'information sur les interventions et traitements proposés.

-Ne pas hésiter à demander de répéter, d'utiliser des termes plus simples.

-Aviser le médecin de formulaires à remplir dès le départ.

-Ne pas tenter de socialiser avec le médecin.

Après

-Résumer l'essentiel de la visite sur papier.

-Garder un journal des consultations.

-Suivre les recommandations du médecin.

-En cas de maladie chronique, nuancer ses pensées, rester motivé.

-Adopter des habitudes de vie saines (en tout temps).