Caroline Lavallée, tachycardie à 30 ans

Caroline Lavallée, 41 ans, travaille dans une tour de bureaux du centre-ville. Juchée sur des talons hauts et vêtue d'un tailleur moulant, elle marche d'une allure assurée. Au bout de quelques pas, elle s'arrête. «Je suis essoufflée aujourd'hui.» Son coeur, réparé, fait encore des siennes à l'occasion. Rien de grave, lui a-t-on assuré. Heureusement, parce qu'elle est bien décidée à participer à son premier demi-marathon l'été prochain.

Un matin de l'année 2000, Caroline s'est réveillée avec le souffle court, les doigts engourdis et d'intenses palpitations. Son rythme cardiaque était de 180 battements à la minute, comme s'il voulait sortir de sa poitrine. «Ç'a avait duré une partie de la nuit. Je ne me sentais pas bien. Je me suis quand même rendue au bureau et là, j'ai vu que c'était sérieux.»

Transportée en ambulance à l'hôpital, Caroline a reçu des bêtabloquants par intraveineuse pour ralentir son rythme cardiaque. On lui a dit qu'elle souffrait peut-être de tachycardie supraventriculaire. Sept ans ont passé avant que son coeur ne s'affole à nouveau. «J'étais assise au salon quand mon rythme cardiaque s'est mis à accélérer. J'avais des engourdissements. Je pensais faire une crise cardiaque.»

Au départ, Caroline et son conjoint ont pensé qu'il s'agissait de surmenage. «J'avais un emploi stressant. Mais plus les crises se multipliaient, plus je savais que c'était physique. Les épisodes de palpitations revenaient plusieurs fois par mois. Ça pouvait durer deux minutes comme une heure. Mon coeur était déchaîné, je me sentais étouffée, étourdie. C'était imprévisible.»

Après un monitorage cardiaque prolongé, le diagnostic soupçonné s'est confirmé: Caroline souffrait de tachycardie supraventriculaire. Ce trouble incommodant ne mène généralement pas à la mort, mais il peut conduire à un AVC. «Ce n'est pas dramatique dans mon cas. Je n'ai jamais eu de colère, mais je cherchais à comprendre. Je ne connais pas mes antécédents familiaux. On ne sait pas.»

En 2008, Caroline est passée sur la table d'opération. Une ablation par cathétérisme a permis de brûler la zone anormale de son coeur. L'intervention, pratiquée sous anesthésie locale, a été un succès. Ou presque. «Je n'ai plus d'épisodes de palpitations, mais parfois, mon rythme cardiaque devient irrégulier, étrange. Je le sens bien dans ma poitrine. Les médecins n'ont pas encore trouvé le problème.»

Décidée à mettre toutes les chances de son côté, Caroline a cessé de fumer. Elle a banni les sucreries et les croustilles - son plaisir coupable - de son alimentation. «Le matin, je prends un café à 50% décaféiné. Je suis incapable de m'en priver complètement.» Elle boit une coupe de vin à l'occasion. «Je me permets des gâteries, mais avec modération.» Elle a aussi fait une croix sur la plongée sous-marine. «Je suis plongeur certifié, mais je ne me sentirais plus à l'aise à 80 pieds sous l'eau.»

Il ne faut pas croire, cependant, qu'elle vit le pied sur le frein. «Au contraire, j'ai une urgence de vivre. J'ai essayé l'hébertisme, la salsa. Je veux escalader un mur cette année, faire de la planche à neige et du ski nautique.» Elle court aussi, avec l'accord de son cardiologue. Elle rêve de ce matin de septembre où elle sera sur le pont Jacques-Cartier parmi des milliers de coureurs. «Je suis très compétitive. Mon défi, désormais, est de ne pas trop pousser mon corps. Je suis vigilante.» Son chrono? Elle rit. «J'apprends à ne pas trop m'en préoccuper.»