Chez les 6 à 19 ans, à peine 4% des filles satisfont aux nouvelles Directives canadiennes en matière d'activité physique, soit 60 minutes d'activités d'intensité modérée à vigoureuse par jour. C'est la moitié moins que les garçons (9%). Et plus elles vieillissent, moins elles font d'activité physique. Pourquoi? La réponse est loin d'être simple.

«La réussite des filles passe davantage par les résultats scolaires, alors que les garçons misent davantage sur le sport. L'enjeu de vie est différent. Ça fait partie de la construction de leur identité et c'est crucial à l'adolescence, indique la sociologue Suzanne Laberge, professeure au département de kinésiologie à l'Université de Montréal. Les filles veulent plaire et ressentent une grande pression à être cute.»

«Il n'y a pas si longtemps, il était mal vu pour les jeunes femmes de faire du sport, affirme pour sa part Mario Julien, président de la Fédération des éducateurs et éducatrices physiques enseignants du Québec. Ça fait probablement partie d'un héritage social dont il faut se débarrasser pour le plus grand bien des femmes. Il faut trouver des stratégies pour intéresser les filles.»

Il a été montré que les adolescentes qui pratiquent régulièrement une activité physique souffrent moins de dépression et d'anxiété, elles s'apprécient davantage et sont moins disposées à fumer, consommer de la drogue et avoir des comportements sexuels à risque.

«C'est malheureusement le groupe qu'on a le plus de difficulté à faire bouger. Plus l'âge de la puberté est jeune, plus le niveau d'activité physique baisse rapidement. C'est probablement une question d'offre: on n'attire pas les mouches avec du vinaigre», dit François Trudeau, directeur du Département des sciences de l'activité physique de l'Université du Québec à Trois-Rivières.

Quelles activités offrir? «Les filles préfèrent les sports individuels, alors que les écoles optent davantage pour les sports collectifs. Elles aiment se retrouver en groupe, mais pas en équipe. Quand les cours sont mixtes, c'est encore pire», dit Sylvain Turcotte, directeur du Département de kinanthropologie de l'Université de Sherbrooke. Elles préfèrent, par exemple, la danse au basketball. «Il faut revoir la formation des enseignants en ce sens», dit-il.

«Plus il y aura d'initiatives et l'offre sera diversifiée, plus on aura de chances de toucher la cible», résume Suzanne Laberge.

Par des filles pour des filles

FitSpirit est une fondation mise sur pied en 2007 par Claudine Labelle, ancienne cycliste élite, dont la mission est de promouvoir l'activité physique chez les adolescentes de 13 à 17 ans. Comment? D'abord par une tournée des écoles. Des athlètes féminines inspirantes, telles Dominique Maltais et Jennifer Heil, ont jusqu'à maintenant rencontré gratuitement 48 000 filles dans des centaines d'écoles de l'Ontario et du Québec.

Depuis 2010, un programme de course à pied FitClub (5 km) est aussi proposé aux élèves. «Ça permet un suivi à long terme des jeunes. Une enseignante par école est attitrée et travaille de concert avec une kinésiologue, une nutritionniste et une athlète pour superviser un entraînement de 6 à 10 semaines», explique Claudine Labelle. Au printemps dernier, une course a rassemblé 850 filles dans les Laurentides.

FitSpirit, c'est aussi un site internet (fitspirit.ca), une webtélé, un concours annuel «Miss FitSpirit» et des sorties de filles. Le dernier Défi des neiges a réuni 350 planchistes, presque toutes débutantes. Grâce à divers partenaires, dont le YMCA, FitSpirit est en mesure d'offrir des activités à faible coût. Le bootcamp à Saint-Sauveur a coûté à chacune 25$ (transport, nuitées, nourriture et animation inclus). «L'accessibilité est une priorité pour nous. Ça grossit et ce n'est que le début», se réjouit Claudine Labelle.