Les Canadiens dorment mal, très mal, et c'est encore plus vrai chez les femmes. Les troubles du sommeil affectent 40% des gens au pays, et plus d'une personne sur trois (13,4%) répond aux critères diagnostiques de l'insomnie.

Ces conclusions émanent d'une étude réalisée par une équipe de chercheurs de l'Université Laval qui sera dévoilée ce week-end au congrès annuel de l'Association mondiale pour la médecine du sommeil, à Québec. L'étude, dirigée par le professeur Charles M. Morin, a été menée auprès de 2000 personnes de partout au Canada.

Afin d'être reconnus comme souffrant de troubles du sommeil, les participants devaient avoir éprouvé au moins trois fois par semaine au cours du dernier mois l'un des symptômes de l'insomnie (mettre plus de 30 minutes à s'endormir, périodes d'éveil excédant 30 minutes pendant la nuit, se réveiller au moins 30 minutes avant l'heure prévue). Quatre personnes sur dix ont signalé l'un ou l'autre de ces problèmes.

Le chercheur Charles M. Morin suit depuis 10 ans des gens atteints de divers troubles du sommeil. Il explique que les femmes sont deux fois plus nombreuses à en souffrir. De plus, les troubles du sommeil augmentent dans la quarantaine et s'accentuent avec le vieillissement.

«Les jeunes adultes ont tendance à avoir de la difficulté à s'endormir. Plus tard, vers 40 ou 50 ans, ils ont de la difficulté à rester endormis. Et les aînés ont plutôt des problèmes de réveil précoce, vers 4h, avec de la difficulté à se rendormir.»

Les anglos dorment moins bien

Les anglophones dorment moins bien que les francophones, révèle aussi l'étude de l'équipe de M. Morin: la prévalence de l'insomnie est de 9,5% chez les francophones et de 14,3% chez les anglophones. Pour en savoir plus, les chercheurs se sont penchés sur les moyens que prennent les insomniaques pour dormir. Il appert que les francophones sont plus enclins que leurs compatriotes de langue anglaise à se faire prescrire des somnifères (13% comparativement à 9%) et des produits naturels (16% comparativement à 7%).

«Les francophones ont probablement tendance à chercher une solution rapide à leurs problèmes de sommeil, avance M. Morin. Et les anglophones sont peut-être moins enclins à se faire prescrire des somnifères. Mais c'est peut-être aussi parce que les omnipraticiens francophones sont plus ouverts à ce genre d'ordonnance.»

Comparativement à l'Ontario, le Québec accuse un net retard dans le traitement de l'insomnie. En Ontario, il existe plus d'une centaine de cliniques du sommeil; il y en a à peine une dizaine au Québec. À l'Université Laval, l'équipe de M. Morin travaille avec des médecins et des psychologues pour amalgamer les traitements classiques à la thérapie comportementale afin de traiter l'insomnie. «C'est dommage parce qu'on a tendance à traiter en priorité les problèmes d'apnée dans nos cliniques à cause des dommages cardiovasculaires. Pourtant, il est prouvé que l'insomnie a un impact sur les facultés mentales et le poids. C'est aussi un facteur de risque de dépression, sans oublier une cause d'absentéisme au travail», ajoute M. Morin.