«Etre vierge, c'est pas du tout cool!», lance Noxolo Dlamini du haut de ses 14 ans. Les adolescents en Afrique du Sud, pays le plus touché par le sida, sont aujourd'hui de plus en plus contraints d'adopter des conduites sexuelles à risque pour être acceptés par leurs pairs.

«Avoir le dernier téléphone portable à la mode, porter des fringues de marque, ce n'est plus cool. Prendre des photos sexy et encore mieux, faire l'amour devant une caméra et la poster sur facebook pour la faire circuler, là peut-être, on sera cool», explique la jeune collégienne pour qui l'utilisation du préservatif dépend du bon vouloir du garçon.

Même si l'Afrique du Sud suit la tendance mondiale avec une baisse de 0,4% du taux de prévalence du sida chez les jeunes filles, ces conduites à risque, populaires chez les jeunes, montrent les limites des campagnes de prévention.

«La pression de leurs pairs joue un très grand rôle chez les jeunes qui entrent dans la vie sexuelle», reconnaît la porte-parole de l'organisme de prévention public Lovelife, Botha Swarts.

Un récent scandale dans un lycée de Johannesburg a révélé l'ampleur du phénomène: la vidéo de deux garçons et d'une fille ayant des relations sexuelles devant un groupe de jeunes a circulé sur les téléphones portables et sur le net.

«Certaines filles mentent et disent qu'elles ont de l'expérience. Alors pour le prouver, elles doivent coucher avec un garçon devant les autres», explique Noxolo.

Les conduites sexuelles à risque ont légèrement baissé en un an, passant de 41% à 38%, et les relations avec plusieurs partenaires de 45 à 41% mais seuls 31% des jeunes utilisaient régulièrement en 2008 les préservatifs, selon une étude du Conseil médical de recherches publiée cette année.

«Ce qui est souvent considéré comme érotique pour les adolescents, c'est l'idée même de prendre un risque. Les médias valorisent les rencontres torrides et occasionnelles. Il est alors très difficile pour les campagnes de prévention de riposter», note Rebecca Hodes, directrice adjointe de l'unité de recherches sociales sur le sida à l'Université du Cap.

Après de longues années de retard dues à des atermoiements politiques, le pays multiplie de nos jours les campagnes de sensibilisation, notamment via la radio et la télévision avec des soap opéras comme «Intersexions».

Encourager les tests de dépistage dont le nombre reste bas, utiliser le préservatif souvent perçu négativement, encourager la fidélité dans un pays qui autorise la polygamie: une telle mobilisation des autorités et associations a permis de toucher quelque 65% des Sud-Africains dans un pays où 5,7 millions de personnes sur un total de 48 millions sont infectées par le virus du sida.

Mais beaucoup reste encore à faire. Les campagnes de prévention «doivent aussi lutter contre les réalités de la vie des adolescents sud-africains», estime une étude du centre Johns Hopkins santé et éducation en Afrique du Sud.

Selon ce rapport, les jeunes «ont très souvent des relations sexuelles et les filles sont souvent incapables de +choisir+ des rapports protégés et d'accéder aux contraceptifs».