Les patients traités pour un cancer et provenant de quartiers pauvres ont de plus grandes chances de mourir prématurément que leurs semblables plus riches, selon une nouvelle étude portant sur un problème qui persiste malgré l'accès universel aux soins de santé au Canada.



Beaucoup d'études sur le sujet, notamment aux États-Unis, expliquaient cette disparité déjà observée par le retard que prenaient les patients les moins aisés dans le dépistage de leur cancer, laissant plus de temps à la maladie de se développer. Au contraire, cette étude menée en Ontario n'a pas déterminé qu'il s'agissait d'une cause de cette distorsion.

«Je crois que plusieurs d'entre nous attribuaient beaucoup plus d'importance à l'état du cancer au moment du diagnostic et cette étude vient démontrer que non, ce n'est pas le problème majeur», a affirmé Heather Chappell, gestionnaire principale de la lutte contre le cancer à la Société canadienne du cancer.

Selon Mme Chappell, cette étude montre que la communauté médicale et les chercheurs doivent continuer de travailler afin de trouver les causes de la disparité entre les taux de survie des riches et des pauvres.

«Il existe encore une disparité dans les taux de survie. Nous devons oeuvrer afin de trouver l'explication et corriger cette différence», a ajouté Christopher Booth, chercheur responsable du Cancer Research Institute de l'Université Queen's.

L'étude a été publiée lundi dans «Cancer», le journal de l'American Cancer Society.

Les chercheurs ont observé les revenus des ménages trouvés dans le recensement canadien et ont utilisé le Registre d'inscription des cas de cancer de l'Ontario afin d'identifier les patients diagnostiqués d'un cancer entre 2003 et 2007.

La probabilité pour une femme d'une communauté démunie d'être encore vivante cinq ans après un diagnostic de cancer du sein était de 77 pour cent, contre 84 pour cent pour une femme venant d'un milieu plus aisé.

Cinquante-deux pour cent des patients de groupes socio-économiques pauvres atteints d'un cancer colorectal étaient toujours en vie cinq ans après le diagnostic. La probabilité grimpe à 60 pour cent pour les patients plus riches.

«Il s'agit de différences importantes et significatives», a soutenu M. Booth en entrevue à partir de Kingston, en Ontario.

«Si nous avions une forme de chimiothérapie ou d'un autre traitement contre le cancer qui permettait une amélioration du taux de survie, après cinq ans, de sept, huit, neuf pour cent - le type de différences entre les catégorie socio-économiques dans l'étude - ce serait une percée énorme».

Quant au fait qu'il n'existait que de petites différences dans le stade auquel les cancers sont diagnostiqués, le chercheur a émis l'hypothèse qu'il pouvait s'agir de l'une des retombées du système de santé universel canadien, qui permet aux patients de toutes les sphères économiques d'accéder aux tests de dépistage et à des spécialistes.

Avec l'explication du stade de cancer au moment du diagnostic en grande partie écartée, la question est maintenant de comprendre ce qui peut causer cet écart bien réel dans les taux de survie.

«Si ce n'est pas le stade de la maladie, alors quelle est la cause? Il existe de nombreux facteurs, alors il se pourrait que ce soit au niveau de la tumeur. Il se pourrait que des individus de différents milieux aient une forme plus aggressive de la maladie. Il se pourrait que d'autres aspects de la santé soient liés au statut socio-économique», a lancé M. Booth.

Mme Chappell a manifesté son accord, notant que les personnes plus démunies souffraient de plus d'autres maladies, qui elles pourraient avoir un impact sur leur traitement. La proportion de fumeurs et le coût des médicaments pourraient aussi désavantager les catégories les plus pauvres, selon elle.