Au cours des deux dernières années, 535 femmes étrangères sont venues accoucher dans les hôpitaux québécois, laissant quelques centaines de milliers de dollars derrière elles en mauvaises créances.

C'est ce qui se dégage d'une compilation des accouchements de la clientèle canadienne hors Québec et de la clientèle étrangère, obtenue par La Presse en vertu de la loi d'accès à l'information.

Au moins 535 femmes étrangères, originaires d'un autre pays que le Canada, ont accouché dans sept hôpitaux du Québec pendant les années 2005-2006 et 2006-2007. Autant de bébés ont ainsi obtenu la nationalité canadienne.

Il s'agit des plus récentes données disponibles au ministère de la Santé et des Services sociaux.

Les hôpitaux visés ont facturé 3,4 millions en frais divers liés à l'hospitalisation, à l'accouchement et aux soins prodigués. Par contre, des patientes sont reparties en laissant derrière elles des factures impayées pour un total de 286 260$. À ces comptes en souffrance, il faut ajouter une facture de quelques centaines de milliers de dollars pour les soins médicaux. Ils ne sont pas comptabilisés par le Ministère. Le total atteint aisément le demi-million. «Cela peut ne pas sembler beaucoup pour le système, mais c'est beaucoup pour les individus qui sont pris là-dedans», commente le président de la Fédération des médecins spécialistes du Québec, le Dr Gatéan Barrette.

Au cours de cette même période, 140 Canadiennes provenant d'une autre province que le Québec ont accouché ici. Tous les frais ont été remboursés aux hôpitaux par les provinces concernées.

Le ministère de la Santé et des Services sociaux refuse d'y voir un problème de tourisme médical. «Je ne le verrais pas comme une problématique, mais il peut arriver, effectivement, que des femmes étrangères viennent accoucher ici. Il importe aux établissements de s'assurer qu'ils auront le remboursement des frais encourus», a déclaré la responsable des communications au ministère, Dominique Breton.

Une obligation

Les médecins sont obligés de traiter une personne qui arrive en situation d'urgence. Comme ils sont travailleurs autonomes, c'est à eux de se faire payer pour chacun des actes prodigués. C'est souvent peine perdue lorsqu'il s'agit de patients étrangers qui, dans certains cas, disparaissent dans la nature.

«Ce n'est pas systématique, mais dans l'immense majorité du temps, c'est le cas. Il y a évidemment des patients qui arrivent de l'extérieur et qui acceptent de payer. Un Américain, par exemple, va payer le médecin en lui disant que c'est une aubaine comparativement à chez lui. Mais l'immense majorité des patients étrangers qu'on voit sont de l'autre catégorie», a déclaré le Dr Barrette.

En plus du médecin qui procède à l'accouchement en tant que tel, plusieurs professionnels participent au processus, que ce soit le radiologiste qui fait une échographie avant la naissance ou de l'anesthésiste si la femme demande une péridurale. Tous devraient être payés pour les soins prodigués.

Le tableau obtenu révèle qu'au cours des deux dernières années, l'hôpital Royal Victoria a accueilli à lui seul 186 femmes étrangères. C'est plus d'une femme par semaine. Les mauvaises créances se chiffrent à 112 393$.

Le centre hospitalier St. Mary a accueilli 127 femmes étrangères venues accoucher au sein de l'établissement, pour des factures impayées totalisant 26 309$.

Le Centre hospitalier de l'Université de Montréal a reçu 46 femmes étrangères. Les sommes impayées se chiffrent à près de 51 000$, soit l'une des factures les plus élevées.

L'hôpital Maisonneuve-Rosemont fait une distinction entre les femmes étrangères et les réfugiées. Dans la première catégorie, 42 femmes ont accouché dans cet établissement au cours des deux dernières années, laissant une dette de 73 674$. Dans la seconde, on compte 45 réfugiées, mais aucune dette. Les factures sont en effet assumées par le Programme fédéral de santé intérimaire, géré par Ottawa.

Dans la région de la Capitale-Nationale, le Centre hospitalier de l'Université Laval et l'hôpital Saint-François-d'Assise ont accueilli 52 femmes étrangères venues accoucher.

- Avec la collaboration de William Leclerc