Le nom de la grippe qui pourrait avoir fait plus de 150 morts au Mexique et se répand à travers le monde suscite le débat, mêlant intérêts économiques, politiques et considérations scientifiques.

De nombreuses voix se sont élevées pour récuser l'appelation de «grippe porcine» officiellement adoptée par l'Organisation mondiale de la santé (OMS), invoquant notamment les conséquences économiques considérables pour les producteurs de porcs dont certains commencent à être touchés.

Les producteurs de porc brésiliens ont ainsi demandé mardi à l'OMS de rebaptiser la grippe en «nord-américaine» «ou mexicaine» afin d'éviter d'énormes pertes financières du secteur.

Aux Etats-Unis aussi, des responsables américains insistent sur le fait que «ce n'est pas une crise d'origine alimentaire», ajoutant qu'ils étudient la possibilité de changer le nom de la grippe.

Selon Washington, neuf pays ont imposé des embargos sur tout ou partie des importations américaines de porc.

«Quand on parle de grippe porcine, on fait référence à l'origine de la souche (du virus), ou l'une de ses composantes», a relevé mardi le directeur des Centres de maladie et de prévention (CDC), Richard Besser.

Le virus A/H1N1 à l'origine de la nouvelle alerte mondiale à la pandémie «comporte dans son patrimoine génétique des composantes d'origine humaine, aviaire et porcine à la fois», insiste l'Organisation mondiale de la santé animale (OIE), qui propose en conséquence de l'appeler «"grippe nord-américaine" par homologie à la grippe asiatique et à la grippe espagnole survenue au siècle dernier».

En France, l'Institut de veille sanitaire parle quant à lui déjà d'infection par un virus «d'origine porcine».

Car l'appelation de «grippe mexicaine» ne va pas de soi. Pour l'avoir suggérée de manière à «ne pas avoir à prononcer le mot "porc"», le vice-ministre israélien de la Santé Yaakov Litzman s'est attiré l'ire de l'ambassadeur mexicain en Israël, qui s'est déclaré «offensé».

La consommation de viande de porc est interdite dans le judaïsme et cet animal, symbole d'impureté, a une image négative dans la tradition juive.

Soucieuse de ménager intérêts économiques et politiques, la Commission européenne a décidé de parler pour sa part de «nouveau virus de grippe» plutôt que de «grippe porcine» pour que cela n'ait pas d'incidence négative» sur la filière porcine, «surtout en période de crise», a expliqué la commissaire européenne à la Santé Androula Vassiliou.

Malgré le débat et les requêtes pour un changement d'appelation, l'OMS s'en tient au terme de «grippe porcine».

«Cette épidémie a commencé avec ce nom et le virus identifié est celui de la grippe porcine», a commenté mardi le directeur-adjoint de l'OMS Kieji Fukuda, craignant que l'introduction d'un nouveau nom ne provoque «de la confusion».

L'organisation onusienne, coupant court au débat, explique même sur son site internet de quelles manières le virus se transmet dans les élevages de porcs, rappelant que «des épidémies (y) surviennent chaque année».