Il en va de la cuisine traditionnelle québécoise comme de la messe. Il n'y a pas si longtemps encore, on pouvait compter sur le 24 décembre pour avoir sa dose annuelle, mais ces deux rituels se perdent. Si vous n'avez pas eu votre content de tourtière et de boulettes durant les Fêtes, le Petit Poucet de Val-David est prêt à prendre le relais.

Avec son grand foyer central, ses têtes de cervidés accrochées aux poutres et ses sièges de téléphérique suspendus au plafond cathédrale, l'espace vous met tout de suite dans l'ambiance. Vous pourrez l'examiner à loisir. L'établissement ne prenant pas de réservations, il y a facilement une vingtaine de minutes d'attente à l'heure du brunch. Heureusement, vous êtes à l'intérieur et pouvez vous verser un café ou un chocolat chaud pour patienter. Et avec ce décor digne d'un jeu d'« Où est Charlie ? » (sans Charlie mais avec une impressionnante collection d'animaux empaillés et d'objets hétéroclites), même les enfants ne voient pas trop le temps passer.

Le menu est à l'image d'une table de fête : foisonnant. On y retrouve les incontournables de la cuisine québécoise traditionnelle, de la soupe aux pois à la galette de sarrasin en passant par le ragoût de pattes et la tourtière.

Les « oreilles de crisse », proposées en à-côté sous le nom de bajoue en cornet, sont parfaites à grignoter en entrée. Ces minces tranches frites extra-croustillantes se mangent sans faim comme des chips de gras. Présentée dans un joli cône de papier brun, cette friandise salée serait tout aussi à sa place dans un de ces restos néo-rustiques de Montréal.

La tourtière, avec sa viande savoureuse sous une belle pâte blonde, est également succulente. Le ragoût de pattes de cochon et boulettes, par contre, nous a déçus. Les boulettes parfaitement assaisonnées et juste assez humides étaient réussies, mais le reste n'était pas à la hauteur. La viande du ragoût manquait de saveur, et la sauce terne n'arrangeait rien à l'affaire. Le réconfort qu'on attend de ce type de plat n'était pas au rendez-vous.

Les menus de brunchs qui se spécialisent dans les assiettes costaudes oeufs-viandes-patates proposent souvent aussi un plat dit santé. La galette de sarrasin accompagnée de fruits n'est pas identifiée comme telle, mais la montagne de fruits frais sous laquelle elle est ensevelie devrait suffire à donner bonne conscience à n'importe qui. Précisons qu'on parle ici de galettes québécoises tout ce qu'il y a de plus rustiques, et non de ces minces feuilles craquantes qu'on retrouve dans certaines crêperies bretonnes. Même en ayant la main légère sur la mélasse, la pâte épaisse et dense est tellement bourrative qu'on peine à finir son assiette.

Servir de la cuisine traditionnelle n'est pas si évident pour un restaurant. Les attentes sont grandes, les comparaisons avec les recettes de grands-mères, inévitables, et elles dépendent des références de chaque client. Impossible de gagner à tout coup sur ce terrain-là. Si, par exemple, vous aimez vos fèves au lard plutôt tomatées, une version très sucrée comme celle du Petit Poucet n'arrivera jamais à vous satisfaire, peu importe comment elle est préparée. Mais quand un établissement se donne la peine de bien faire les choses et propose des cretons exemplaires, de belles tranches de jambon maison très fumées, des pommes de terre rissolées parfaites et un ketchup aux fruits capable de plaire même aux gens qui n'aiment pas ce condiment, il n'est pas étonnant qu'il soit encore plein après 70 ans d'existence.

Au Petit Poucet

1030, route 117, Val-David

819 322-2246

Consultez le site d'Au Petit Poucet : www.aupetitpoucet.com

NOTRE VERDICT

Prix : Assiettes de 7,30 $ à 20,15 $, à-côtés autour de 3 $ à 8 $, desserts environ 5 $.

À boire : Grand choix de cafés au lait, dont un érableccino avec sirop et sucre d'érable.

Service : Décontracté et sympathique, y compris avec les enfants.

Ambiance : Rustique. Vaste salle à manger remplie de curiosités : vélo Woodcyles Lesage fait de bois et d'outils de bûcheron, animaux empaillés, sièges de téléphériques datant de la dernière glaciation, etc.

On aime : Des classiques de la cuisine québécoise servis sept jours sur sept.

On aime moins : Certains plats n'apportent pas le réconfort attendu.

On y retourne ? Pour retrouver des mets traditionnels ou les faire découvrir à des visiteurs, oui.