Il y en a qui estiment que les restaurants occupent une place bien basse dans la hiérarchie des institutions humaines. Il y en a d'autres, en revanche, qui croient que c'est un lieu essentiel de partage, d'échanges, de retrouvailles, de communion.

Il y en a que cette convivialité dérange au point où vendredi dernier, quatre bars et restaurants se sont retrouvés dans la ligne de mire des terroristes.

Les restaurants sont des institutions cruciales de toute communauté. À Paris, ce sont de véritables points de chute dans les quartiers.

En Amérique du Nord, nos traditions sont différentes et malheureusement, trop souvent, particulièrement en banlieue, les restaurants sont essentiellement des points de ravitaillement de qualité variable.

Mais, il y a aussi, ici et là, des petites tables indépendantes qui s'installent et rappellent à tous le bonheur du café du coin. Je pense à l'Échoppe des fromages à Saint-Lambert, par exemple, où le proprio connaît pratiquement tous les clients par leur nom, ou encore au Saint-Laurent Café, la petite table qui s'est installée il y a quelques mois en plein coeur du Vieux-Boucherville.

Le lieu n'a rien d'un étoilé Michelin. C'est un troquet tout simple spécialiste du grilled-cheese décoré avec ce style savamment négligé qui plaît aux jeunes adultes du millénaire. L'endroit s'inscrit parfaitement bien dans son environnement urbain - le vieux centre du village de Boucherville - et on y sent l'influence esthétique post-Donna Hay de Marilou Bourdon, la blogueuse de Trois fois par jour, copine de la propriétaire de 21 ans, qui y vend quelques produits et fréquente régulièrement les lieux.

Mais même si le menu est court - quelques sandwichs, quelques plats de petit-déjeuner - on s'imagine aisément y retourner plusieurs fois par mois, voire par semaine, connaître le nom des serveurs, arrêter là seul sachant qu'on y retrouvera des têtes connues du quartier.

Je n'ai pas essayé tout le menu, mais presque. Mes plats préférés? Le sandwich île Harrington - ils portent tous des noms d'îles du fleuve ou du golfe du Saint-Laurent - qui réunit champignons rôtis, bacon et brie sur un pain aux olives et au romarin, une combinaison automnale fondue et grillée bien réussie. Celui de l'île du Diable est aussi intéressant avec son jambon serrano bien costaud, accoté par la personnalité affirmée du Majestic, fromage québécois affiné semi-ferme, préparé avec du lait de bufflonne. En revanche, j'ai trouvé le sandwich Grosbois avec pain blanc et cheddar orange un peu sec, surtout à cause de l'oeuf très cuit. Les sandwichs sont proposés avec une petite salade de roquette toute simple, mais charmante, qu'on ponctue de canneberges séchées et de graines de citrouille grillées.

Pour rincer le tout, on peut choisir du vin, mais on a préféré les smoothies, surtout le bleu, qu'on compose de bleuets, de beurre d'amande, de chia et de lait d'amandes, ou alors la limonade maison, préparée tout simplement avec de la purée de fraises et du jus de citron. Tout cela est joliment présenté avec une grosse paille pastel qui donne à la boisson des airs de dîner à l'ancienne.

En plus des sandwichs, il y a toujours une soupe - à la courge quand on l'a essayée, avec lait de coco, cari et gingembre, un nouveau classique bien fait, mais pas tout à fait assez salé - et une salade du jour. Un jour, celle combinant brocoli, chou-fleur et pacanes manquait un peu de sel, elle aussi, mais charmait grâce au caractère bien croquant des légumes. À une autre occasion, la composition à l'orge manquait d'élégance, collante et pas assez contrastée malgré les tomates cerises et les concombres.

Pour clore le tout ou comme simple en-cas, la maison propose aussi muffins maison et biscuits. Bref, ce café-boutique n'est pas une anomalie, ni un lieu de créativité débridée, ni un établissement chic pour les occasions spéciales. C'est essentiellement un lieu comme on devrait en trouver toujours plus, surtout en banlieue, on l'on se retrouve pour se restaurer sainement, avec gourmandise. Un lieu juste chaleureux, juste humain.

> Prix: Sandwichs 9$. Repas avec sandwich, soupe, salade et boisson chaude pour 15,95$. Smoothies 6,30$, gaufres 6,10$.

> Carte des vins: La maison propose une toute petite carte des vins avec des crus abordables hors des sentiers battus et une carte de bières artisanales québécoises.

> Décoration: Très chouette espace dans une maison ancestrale du Vieux-Boucherville, décoré avec un style rétro épuré. Quelques meubles en matériaux récupérés.

> Service: Sympathique.

 > On aime : Un joli lieu à échelle humaine, où on mange bien, simplement, où on a envie de retourner.

> On aime moins : Des petites choses à corriger en cuisine, notamment les assaisonnements. Et pourquoi servir des fraises en novembre?

> On y retourne? Bien sûr.

Saint-Laurent Café boutique

578, rue Saint-Charles, Boucherville

(579) 882-8854