À première vue, un endroit où l'on commande au comptoir un mets assemblé promptement sous nos yeux pourrait passer pour de la restauration rapide. Ne vous y trompez pas. Il n'y a rien d'expéditif dans les viandes cuites longtemps à la fumée, le riz à la mexicaine, la purée de haricots crémeuse, les salsas et autres ingrédients qui garnissent les burritos de cette sympathique échoppe de Saint-Henri.

L'industrie du fast-food a la fâcheuse manie de s'emparer des aliments qui se préparent rapidement et de les vider de leur essence, nous faisant ainsi oublier combien ils peuvent être bons et satisfaisants.

On l'a vu avec le hamburger, et le burrito a eu droit même traitement. Soumis à des impératifs de standardisation et de contrôle des coûts, ce sandwich chaud roulé dans une tortilla de blé se résume, trop souvent, à un gros billot bourré de riz fade et d'ingrédients insipides. Tejano, heureusement, a bien mieux à offrir.

Le nom donne la couleur (tejano signifie «texan» en espagnol). Ici, on ne prétend pas faire de la cuisine mexicaine; on se réclame plutôt du sud-ouest américain.

À commencer par la viande, au coeur du burrito, au propre comme au figuré. Les propriétaires se sont fait connaître avec le formidable Blackstrap BBQ de Verdun et la filiation est évidente.

Le porc effiloché au chorizo, la brisket à l'ancho (pointe de poitrine de boeuf au piment poblano séché) et la tinga de poulet (sorte d'effiloché en sauce) sont délicieusement imprégnés de fumée, et leurs chairs ont la texture fondante qu'on attend d'une cuisson lente à basse température. Mais contrairement à chez Blackstrap, les viandes se présentent ici en petits morceaux baignant dans leur jus.

La formule est simplissime. Une tortilla de blé blanche ou brune, une viande et une dizaine de garnitures.

Comme toujours en cuisine, c'est le souci du détail qui fait la différence. Il se reflète ici dans la qualité et le choix des ingrédients. Du riz bien assaisonné. De la purée de fèves pinto dense et veloutée. Des oignons marinés roses. Des radis finement tranchés. De la laitue en feuille et non de la iceberg. Des sauces savoureuses sans être incendiaires. Le tout servi très chaud dans une tortilla souple roulée bien serrée.

Toutes ces garnitures sont aussi offertes en salade ou sur une tostada (tortilla de maïs frite), une bonne façon de goûter chacun des ingrédients séparément, en particulier si vous choisissez plus d'une viande. C'est tout? Vous pouvez toujours prendre des chips de maïs avec cette étonnante salsa rouge brique dont les saveurs profondes font penser à un mole mexicain, mais c'est pas mal ça.

Vous l'aurez compris, on ne va pas chez Tejano pour souper aux chandelles, ni même pour regarder un match de hockey.

Pourtant, c'est le genre d'endroit où je retournerais constamment s'il était dans mon quartier.

En ce mois de janvier glacial où la tirelire sonne creux, il est réconfortant de savoir qu'on peut manger quelque chose d'ensoleillé qui soit à la fois unique et goûteux, rapide et soigné, et abordable.

Tejano BBQ Burrito

511, rue de Courcelle, Montréal

514 303-3500

> Prix: de 7 à 13$; et 3$ par portion de viande supplémentaire. C'est un peu plus cher que dans une chaîne de restauration rapide, mais ô combien plus savoureux.

> À boire: Pas de permis d'alcool. Les bulles digestives d'une boisson gazeuse (dont les très colorées Jarritos mexicaines) ou d'une Eska pétillante sont néanmoins bienvenues avec ce type de nourriture.

> Décor: Simple mais juste. Un comptoir-bar en bois, quelques hauts tabourets en métal, des crochets en têtes de boeuf à corne dans un espace relativement restreint. Bref, n'y allez pas tous en même temps, ou commandez pour emporter.

> Service: Au comptoir. Sympathique mais encore en rodage lors de nos visites - l'endroit n'est pas ouvert depuis très longtemps.

(+) Une proposition simple, claire et réussie.

(-) Quelques ingrédients de plus, comme de la coriandre, seraient appréciés. Ou même des oeufs, pour avoir des burritos-déjeuners à l'heure du brunch?

On y retourne? À la première occasion.

Photo Edouard Plante-Fréchette, La Presse