Il y a des repères de la Petite-Italie qui se passent de présentations, comme l'église Notre-Dame-de-la-Défense. Et d'autres qui gagneraient à être connus davantage, comme le discret Cafe Via Dante, situé juste en face.

Le premier coup d'oeil y est pour beaucoup dans les attentes que suscite un endroit. La première chose qu'on remarque en entrant, c'est le prosciutto San Daniele et sa trancheuse rutilante trônant dans une armoire vitrée. La deuxième, c'est l'écran de télé muet qui diffuse des émissions sportives. Entre les deux, de solides tables de bois ornées de napperons vert olive sous un éclairage à peine tamisé. L'ancien café est devenu un véritable restaurant, mais le lieu est resté modeste.

Le message est clair: on ne vous vend pas un décor ou un spectacle, mais on a confiance en ce qu'on met dans votre assiette. La spécialité de la maison, par exemple. Une expression qui a le dos large et qui, dans trop d'endroits, désigne un plat cher et décevant dont on se demande pourquoi l'établissement est si fier. Pas ici. Le lapin braisé avec vin blanc, pancetta, romarin et sauge goûté lors d'une première visite est tout simplement le meilleur que j'aie jamais mangé. Les savoureux morceaux de viande à la fois tendres, juteux et dorés à la perfection sont accompagnés d'une polenta si bien saisie qu'il faut presque l'attaquer du revers de la fourchette, comme une coquille d'oeuf, pour en atteindre le coeur onctueux. Une trace de jus de viande blond complète cette assiette d'une simplicité émouvante.

L'entrée d'aubergine parmigiana est dans le même esprit. Une superposition de tranches si minces qu'on dirait un feuilleté en version moelleuse, une sauce tomate simple mais juste, un peu de fromage, un brin de basilic. Fin, délicat, impeccable.

Le cotechino et fagioli est une entrée plus robuste. Les tranches de saucisses cuites bien texturées sont servies avec une petite portion de ragoût de haricots secs. Une touffe de pousses d'oignon ajoute une note sautillante à cette assiette tout confort.

Le plat de gnocchis maison au ragù de cochon est aussi très à propos en hiver. Des gnocchis ni collants ni pâteux qui, même, rebondissent sous la dent, baignés de petits morceaux de porc mijoté dans son jus: que demander de plus? La composition est savoureuse, mais manque de relief. Un peu d'ail ou d'oignon ou, peut-être, de romarin, serait bienvenu.

Le poisson du jour était un pavé de morue charbonnière. La chair, fondante sous la peau croustillante, était posée sur une petite corde de haricots verts fins. Une garniture d'olives, de céleri et de poivron rouge venait cependant souffler un peu d'air de la Méditerranée sur ce poisson des eaux tempérées, et un rectangle de polenta achevait de le ramener en Italie. Encore de la polenta? Oui, et on en aurait pris davantage.

On ne peut malheureusement pas en dire autant des deux desserts offerts ce soir-là. La mousse au chocolat blanc qui ne goûtait pas le chocolat blanc était parsemée de mûres qui ne goûtaient rien. La panna cotta souffrait du même problème de petits fruits. En été, la délicate saveur des framboises s'accorde sans doute très bien avec cette crème cuite à la texture très fine, mais dans leur version hivernale insipide, ces baies à gros grains étaient de trop, et gâtaient la plénitude onctueuse du dessert. Quelque chose me dit qu'on doit faire un tiramisu tout à fait honorable ici. Il n'y en avait malheureusement pas le soir de notre visite.

Cafe Via Dante

251, rue Dante, Montréal

514-270-8446

Orix: Menu changeant à l'ardoise. Environ 8 à 16$ pour les entrées, 22 à 28$ pour les plats et 7 ou 8$ pour les desserts.

Carte des vins: Petite sélection de vins italiens, majoritairement en importation privée, qui change régulièrement. Le vin au verre n'est pas indiqué, et ça ne semble pas trop compliqué d'en avoir un autre si celui proposé ne vous convient pas.

Service: Sympathique et sans flafla. On vous vante les gnocchis faits maison, et on reconnaît sans détour que les tagliatelles ne le sont pas.

Ambiance: Non incluse. Apportez la vôtre: les tables sont assez espacées, la musique joue en sourdine, on s'entend parler.

(+) Une cuisine italienne classique, tournée vers le Frioul et l'Émilie-Romagne, mais capable d'intégrer des ingrédients locaux.

(-) Les desserts.

On y retourne? Assurément.