Les défilés des semaines de la mode de New York, Milan, Londres et Paris sont terminés. Voici les grandes tendances et inspirations de l'automne prochain.

Êtres hybrides, extraterrestres et mode futuriste

Le défilé de Gucci à la semaine de la mode de Milan a marqué les esprits. Des mannequins ont défilé avec leur propre tête sous le bras, alors que des cyborgs et des êtres nouveau genre avec un troisième oeil étaient aussi de la partie. «L'univers des cyborgs n'a pas seulement fourni un argument intellectuel sur l'évolution de la société, il nous a également proposé le parfait équilibre de mode vintage et de mode futuriste. Les têtes coupées, les bébés dragons, le troisième oeil et le décor de salle d'opération ont réellement fasciné tout le monde dès le début du défilé», observe Mario Grauso, président de Holt Renfrew. Le directeur artistique de Gucci, Alessandro Michele, en poste depuis 2015, ne cesse de renouveler la marque en bousculant les codes. «Il mélange les styles, les influences et il propose ici une nouvelle interprétation du corps en déplaçant les membres de manière symbolique et très second degré», explique Elisabeth Clauss, journaliste mode au magazine Elle en Belgique. «Il y a aussi eu des extraterrestres chez Moschino qui a montré des femmes à la peau verte, bleue et jaune en clones de Jackie Kennedy», poursuit-elle.

La mode se questionne sur son avenir. «Est-ce le passé, le présent? Les nouvelles technologies? Ou un mélange de tous ces éléments? s'interroge Océane Stanislas, responsable des achats Édito (designers) pour femmes chez Simons. On a vu des tissus technologiques et des matières réfléchissantes chez Balmain, une série de matières plastifiées, de plastique blanc et transparent chez Paco Rabanne, tandis que chez Marni, l'inspiration de Francesco Risso est un contraste entre la technologie et l'âme. Qu'est-ce que l'âme d'un vêtement? La matière? La texture?»

Revendication féministe

Depuis son arrivée en 2016 chez Dior, à titre de directrice artistique, Maria Grazia Chiuri a lancé la tendance des t-shirts à slogans féministes avec le succès de «We Should All Be Feminists». «Cette fois, on a retrouvé en ouverture du défilé à Paris un pull où il est inscrit "C'est non, non, non et non" ou encore "Women's Rights Are Human Rights"», note Elisabeth Clauss. La créatrice italienne s'est inspirée des années 60 ainsi que de la libération des femmes pour présenter une collection où la femme est forte et libre dans ses choix, son style, ainsi que dans les mélanges des couleurs et des matières. «Elle revendique avec beaucoup de force cette idée féministe; d'ailleurs, les autres créateurs se rallient à elle», pense Stéphane Le Duc, journaliste mode au magazine Dress to Kill. « La marque française Zadig & Voltaire a aussi lancé ses t-shirt et sweatshirt "Girls Can Do Anything", souligne Elisabeth Clauss. Tom Ford a aussi présenté à New York des petits sacs à main sur lesquels il est inscrit "Pussy Power".»

Le style casual sport des milléniaux

On voit que les grandes maisons de couture ainsi que les plus petites marques sont résolument tournées vers les jeunes, les milléniaux. «Ça se traduit par des collections beaucoup plus casual inspirées du streetwear et du sport avec un petit côté rebelle, car les jeunes sont en train de prendre du terrain et souhaitent le faire avec audace et originalité. Cette saison, c'est flagrant, car les marques ont abandonné l'allure traditionnelle des longues robes de soirée», estime Milan Tanedjikov, professeur en design de mode au Collège LaSalle. Il cite en exemple Balenciaga, dont le décor du défilé rappelait un skatepark avec des graffitis. De plus, les silhouettes sont très sportives, tout comme chez Prada. «Il y a un vrai changement générationnel, les milléniaux s'imposent et deviennent le plus important créneau de consommation», poursuit le professeur.

Les années 80

Les épaules des manteaux et des vestes sont carrées, larges, surdimensionnées et directement inspirées des années 80. Il y a aussi la présence de couleurs fluos qui font revivre ces années. «On voit que les créateurs aiment s'inspirer du passé et le font de manière différente, en jouant avec les couleurs ou les styles comme les épaules larges. Toute la collection de Marc Jacobs est un hommage aux années 80», estime Milan Tanedjikov. «Le métallique poursuit sur sa lancée et est toujours très présent avec des robes argentées, ce qui fait aussi très années 80», estime Stéphane Le Duc, journaliste à Dress to Kill.

Photo REUTERS

Une création de Prada

Les manteaux et les superpositions

La superposition se retrouve dans de nombreuses collections. «De larges manteaux et parkas ultra-volumineux superposés, très confortables, mais aussi portés presque comme une armure par des femmes. On sent que l'image de la femme est en train de se transformer. Cette idée de la séduction féminine n'est plus la même, on le voit dans les vêtements qui sont plus larges, voire protecteurs», remarque Stéphane Le Duc. «Les manteaux sont omniprésents chez tous les créateurs, ils sont impressionnants et imposants. Il y a tous les modèles, le caban, la doudoune, la cape qui sera incontournable l'automne prochain tout comme la fausse fourrure. Le fait qu'il y ait énormément de manteaux va nous donner beaucoup de choix, car nos hivers sont assez rudes. On aime le côté fonctionnel et confortable, car il ne faut pas oublier la réalité de notre climat», souligne Océane Stanislas, acheteuse chez Simons.

Les imprimés animaliers

Les imprimés animaliers, style léopard et zébrés, étaient en vedette lors des défilés de Roberto Cavalli, Dolce & Gabbana, Michael Kors, Max Mara et Victoria Beckham. On les porte des pieds à la tête, ou en petite touche en escarpins ou en sac à main, en couleurs plus sombres, bleu nuit ou pourpre, ou les classique jaune et noir ou noir et blanc.

Le laid devenu beau

Ce qui est laid vend plus que ce qui est beau. «On joue sur le concept que la laideur devient belle avec des mélanges invraisemblables de couleurs, de matières, de styles et de textures», estime Stéphane Le Duc. «Les jeunes cherchent à déranger et souhaitent se faire remarquer, alors ils prennent des directions parfois très étranges, lance Milan Tanedjikov, professeur en design de mode au Collège LaSalle. Ils s'amusent avec les standards de beauté. Les designers se sont approprié les "dad shoes", qui sont les chaussures les plus vendues à travers le monde en ce moment, ce qui est ironique.» Ce sont les bonnes vieilles chaussures de sport des années 90 avec des semelles assez épaisses, qu'on porte avec des pantalons, tailleurs, robes et tenues sport.

Photo AFP

Une création de Maison Margiela