Classicisme des couleurs, perfection des coupes et matières nobles: le ton était à un retour aux fondamentaux de la mode italienne lundi, autant chez Emporio Armani que chez Gucci ou Canali, au troisième jour des défilés milanais de prêt-à-porter masculin pour l'hiver prochain.

Emporio Armani: baptisée «illusion», la collection s'inspire de la montagne, symbolisée par le gris minéral des roches qui imprime toute la gamme, dans des variations à l'infini: poudré, éclaté, irisé, mordoré. Les autres couleurs - le bleu flou, le noir obscur, l'aubergine - rappellent «des tons métropolitains», les hommes Armani étant avant tout des citadins. Mais des urbains qui porteraient des passe-montagne, des sacs à dos de randonnée, des pulls aux cols montants et des gants de ski. Les gilets sont zippés sur le devant, molletonnés dans le dos, et les pantalons sont courts, laissant voir le mollet. Le Jacquard domine, le Prince de Galles se fait dégradé et la laine se rêve en fourrure, type Astrakan.

Gucci: Frida Giannini, la directrice de la maison italienne, avait choisi elle de faire partir en mer ses mannequins, coiffés de casquettes de marin, vêtus de cabans et de vareuses. Le bleu marine foncé et le noir profond dominent - accompagné de quelques touches bienvenues de rose pâle - et les pantalons sont là aussi courts, souvent en cuir, l'une des marques de fabrique de la griffe florentine. Courts aussi les pulls, avec une quasi-absence de col, et larges, tels des sweatshirts de luxe en laine bouillie. Portés pliés en deux, leurs anses en bambou - un autre symbole de la marque -, les sacs sont géants, prêts à accueillir l'essentiel de l'homme Gucci qui partirait en mer. Surprise: le dernier mannequin n'est autre qu'Alain-Fabien Delon, le fils de l'acteur mythique du «Guépard», en clin d'oeil aux Sixties dont Alain était l'une des égéries.

Etro: des carreaux, du pied-de-poule, du motif cachemire, des costumes trois pièces, des cravates strictes et des lavallières, des queues de pie... L'homme Etro revient de Grande-Bretagne où il a pioché dans son vestiaire le plus emblématique, mais dans des couleurs plus douces et gourmandes - crème, caramel, chocolat - pour s'habiller. D'âge mûr ou imberbe, le Phileas Fogg proposé par le styliste Kean Etro, valise en main ou sac de voyage que l'on imagine rempli des mythiques banknotes du gentleman imaginé par Jules Verne, est d'une classe folle, tout comme les tailleurs et couturiers des Pouilles ayant participé à la collection, qui clôturent la présentation.

Canali: dans une ambiance toute de douceur, apaisante, au son du piano de Ludovico Einaudi, la respectable maison née en 1934, avec à sa tête la troisième génération des Canali, avait choisi l'eau comme élément de connexion entre deux mondes, l'Orient et l'Occident, un lien symbolique entre deux cultures, avec comme inspiration les couleurs pastel de la lagune vénitienne. Imaginez que vous êtes sur l'île de San Giorgio: fluidité, luxe, délicatesse, évanescence... Les pantalons tombent impeccablement sur des bottines sublimes, les cols sont négligemment ouverts, seul un bouton ferme le veston, et le gentleman Canali se promène dans la vie moderne comme s'il arpentait son palazzo nobile sur le Canal Grande.

La journée devait se terminer avec le défilé Fendi.

Mardi, DSquared2, Giorgio Armani et Roberto Cavalli clôtureront les défilés milanais.