En France, le Défenseur des droits Dominique Baudis a décidé d'enquêter sur les pratiques de recrutement de la marque américaine Abercrombie & Fitch, afin de vérifier qu'elles ne sont pas discriminatoires, a-t-on appris mercredi auprès de ses services, confirmant une information du journal Le Monde.

Le Défenseur a décidé le 15 juillet de s'autosaisir pour enquêter sur la griffe de vêtements prisée par les adolescents, suite à différents articles de presse et des propos du patron américain du groupe évoquant une politique de recrutement «assez bizarre», a dit à l'AFP Slimane Laoufi, responsable des discriminations dans les entreprises privées.

Dans sa décision, le Défenseur déclare que la société semble «fonder ses pratiques de recrutement sur des critères discriminatoires et notamment l'apparence physique».

Sur ses sites internet, Abercrombie, comme sa sous-marque Hollister, ne parle en effet pas de postes de vendeurs, mais de «mannequins». Dans ses magasins et notamment son vaisseau amiral ouvert en 2011 sur les Champs-Élysées, ils déambulent parfois torse nu, dans une ambiance qui rappelle celle des boîtes de nuit avec des couleurs sombres, une musique forte et un parfum maison.

Or le Défenseur relève que les mannequins recrutés par la marque semblent être «en réalité à la fois des mannequins et vendeurs».

Mais, explique-t-il, «si des exigences professionnelles essentielles et déterminantes pouvaient légitimer la prise en compte de l'apparence physique dans le cadre de recrutement de mannequins, il en est autrement pour des postes de vendeurs».

Le Défenseur rappelle par ailleurs des propos du PDG de la société Mike Jeffries, remontant à 2006 dans lequel il revendiquait le fait de recruter «des gens beaux»  parce qu'ils attirent «d'autres gens beaux». «Nous ne voulons nous adresser à personne d'autre. Beaucoup de gens n'ont rien à faire dans nos vêtements», ajoutait-il.

Le Défenseur va lancer une instruction officielle et réclamer à l'enseigne, déjà contactée, d'expliquer ses pratiques de recrutement. Il espère pouvoir statuer avant la fin de l'année.

Le groupe, connu notamment pour ses cotons ouatés siglés, a déjà été poursuivi pour discrimination aux États-Unis et en Grande-Bretagne. Il y a une dizaine d'années, il avait notamment accepté de payer 50 millions de dollars à un collectif américain d'employés et de personnes issues de minorités ethniques qui affirmaient avoir été dissuadées par l'entreprise de poser leur candidature. En 2009, il avait été condamné à indemniser une vendeuse britannique ayant une prothèse à un bras, qui s'était vue interdire le contact avec les clients, car elle ne respectait pas le code vestimentaire.

En 2011, la chaîne avait aussi fait parler d'elle en proposant de payer un participant à une émission de télé-réalité américaine («Bienvenue à Jersey Shore») pour qu'il arrête de porter les vêtements de la marque, les pérégrinations, souvent alcoolisées, dudit personnage surnommé «The Situation», nuisant à son image, expliquait le groupe.