Nous avons rencontré la nouvelle égérie de la campagne printemps 2013 de la société montréalaise Browns. À 24 an, le top model engagé Coco Rocha se bat contre la dictature de la taille 0 et pour la défense des droits des mannequins. Entre autres combats.

Le rendez-vous a lieu dans le studio du photographe montréalais Barry Harris, directeur artistique de la séance photo à laquelle nous sommes conviés. Coco Rocha, teint diaphane et regard félin, nous lance un joyeux: «Hello!» Il émane de sa stature élancée une élégance intemporelle.

Pour cette native de Vancouver, tout a réellement débuté lorsque Steven Meisel lui a offert de poser en couverture du Vogue Italie. «Godfather» (le Parrain), c'est ainsi qu'elle a surnommé le célèbre photographe qui a lancé sa carrière internationale. Elle avait 17 ans. La consécration est toutefois arrivée au printemps 2007. Lors du défilé prêt-à-porter de Jean Paul Gaultier, elle a exécuté une gigue irlandaise, absolument éblouissante. La presse du monde entier a été conquise par ce mannequin au drôle de nom qui avait un véritable talent pour la danse. «Quel moment inoubliable», se remémore-t-elle. Dès lors, elle n'a pas cessé d'être appelée pour de prestigieuses séances photo publiées par Vogue, W ou Harper's Bazaar; de fructueuses campagnes de publicité également, pour Yves Saint Laurent, Longchamp, Calvin Klein, et dernièrement pour Browns, marque de chaussures aux 46 succursales canadiennes.

Mais pourquoi Coco est-elle perçue comme si différente de ses congénères? On pourrait invoquer son charisme décoiffant, sa beauté atypique, mais aussi ses prises de position portées par une vraie culture. Celle qui s'indigne sur le thème «mais au nom de quoi les mannequins n'auraient-ils pas droit à la parole?» a vite compris l'importance de lancer son propre blogue, intitulé Oh so Coco. Une première pour un mannequin de cette envergure. Merveilleux outil de promotion personnelle, c'est aussi un média qui lui permet de débattre de la dictature de la taille 0, et de dénoncer les diktats malsains d'un système qui pousse les mannequins à s'affamer. Le combat de Coco Rocha ne s'arrête pas là. «Parlons de Photoshop. Cet outil peut se révéler indispensable pour de petites retouches photo, mais certainement pas pour trahir la réalité», en en créant une autre qui exalte la perfection lisse d'une féminité factice. En avril 2012, elle en a elle-même fait les frais en couverture du Elle Brésil, l'image retouchée la montrant... beaucoup plus dénudée que durant la séance photo. «Du coup, par la suite, j'ai été fière de participer à la campagne sans retouche de la griffe québécoise Jacob», en 2011-2012.

Membre du syndicat Model Alliance, Coco défend donc les droits des mannequins. Son lobbyisme a permis d'édicter des règles comme l'interdiction de photographier les filles nues dans les coulisses des défilés, et aussi un service d'aide à celles qui sont victimes de harcèlement sexuel. Depuis le 5 février dernier, elle est coach aux côtés des mannequins-vedettes Karolina Kurkova et Naomi Campbell dans la nouvelle émission de téléréalité The Face, sorte d'America's Next Top Model. «Je vais pouvoir y donner des conseils venus du coeur! Faire de belles photos, j'adore, mais j'aimerais par-dessus tout qu'on se souvienne de moi pour mes engagements.» La route est longue, mais Coco Rocha sait exactement où elle va.