Le couturier belge Dries Van Noten réinvente kimonos antiques et manteaux aux dragons, en jouant sur des imprimés numériques alors que des couleurs solaires, orange et or en tête, ont dominé mercredi cette deuxième journée de la Semaine de mode parisienne.

Les grandes rédactrices de mode internationales ont mis fin à leur «spa day», pause traditionnelle entre les marathons de défilés milanais et parisiens, pour occuper le premier rang chez le chéri «Dries», sous les ors et lustres anciens de l'interminable salle de bal de l'Hôtel de Ville de Paris. Sur une voix a capella, concentré d'émotion appelant à «ralentir le temps», les filles, paupières orange vif et cheveux lissés, avancent en douceur pour laisser admirer cette collection dense en couleurs et juxtaposition d'imprimés.

Point de décolleté, chemises et manteaux remontent sur le cou, et les filles hésitent entre jupes longues et pantalons: Dries joue encore sur les codes militaires et le vestiaire masculin adapté, mais sans intention «de cacher le corps des femmes», jure-t-il, hilare, en coulisse.

Orange et moutarde contrastent avec l'intensité d'un turquoise, ses couleurs de base, marine et olive, en toile de fond.

Le couturier s'est rendu au musée Victoria & Albert à Londres, pour photographier, à plat, des vêtements de collection japonais et coréens. «On est passés du 2D au 3D pour créer des pièces contemporaines, en s'amusant à utiliser par exemple l'ourlet d'un manteau pour en faire le motif central d'une robe», explique-t-il, visiblement réjoui.

Entre les défilés, et en attendant le début de ces spectacles d'une dizaine de minutes en moyenne, les spectateurs font le point sur les différentes rumeurs concernant le mercato des stylistes de grandes maisons.

Le Français Hedi Slimane, annoncé chez Yves Saint-Laurent, semble faire une belle unanimité: «Le casting est parfait», dit l'un, «idéal» renchérit sa voisine. L'idée que ce créateur, qui a révolutionné la mode masculine avec ses costumes étroits et androgynes chez Dior dans les années 2000, puisse s'emparer des codes masculin-féminin d'YSL (smoking pour femme, saharienne ou caban marin) fait défaillir plus d'une fashionista.

En revanche, le mystère sur le nom du successeur de John Galliano chez Dior, une maison qui fonctionne sans couturier en titre depuis déjà un an, reste entier. Ce qui n'empêche pas les spéculations tous azimuts.

Chez Guy Laroche, le franco-suédois Marcel Marongiu a offert une collection forte, axée sur le noir et l'or mais aussi un orange rouille lumineux. Les matières se font texture, des paillettes irrégulières créant des reliefs sur les jupes côtoyant des chemisiers fluides d'organza, de la maille parfois habillée de fourrure, jupes en vinyle et bottes vernies.

Damir Doma, styliste croate de 30 ans qui connaît un vrai succès commercial pour l'homme, continue d'explorer l'univers féminin avec une dominante de noir, mais aussi des caramels chauds en daim, cuir et même des vestes sans manche en fourrure. Peaux et teintes naturelles font un clin d'oeil à l'univers du sellier Hermès, mais Doma reste fidèle à ses lignes monastiques et amples.

Ses sarouals resserrés sur le mollet se portent sous des vestes au col relevé et sans bouton, de larges ceintures japonisantes enserrant des chemisiers légers. Chaussons en daim et cols blancs plissés évoquent une «Renaissance moderne», affirme en coulisse le jeune créateur, visage enfantin et regard clair.