«Non Elle n'est pas raciste»: mise en accusation jusqu'aux États-Unis pour avoir publié un article sur la «Black Fashion» qui assure que la «black-geoisie» a intégré des «codes blancs», la version française du magazine Elle se défend.

«Non Elle n'est pas raciste», écrit la Société des journalistes de l'hebdomadaire, qui rappelle qu'il «n'a jamais cessé de s'engager depuis plus de 60 ans dans les combats pour la dignité de toutes les femmes».

Solange Knowles, soeur de Beyoncé, les chanteuses Erykah Badu, Kelly Rowland, Asealia Banks, Rihana ou l'actrice Zoë Zaldana, dans un article paru le 13 janvier et intitulé Black fashion power, la journaliste Nathalie Dolivo cite quelques personnalités américaines qui ont compris «mieux que quiconque, l'importance du look».

«On pourrait même dire que, pour la communauté afro, le vêtement est devenu une arme politique», écrit la journaliste, qui y voit «l'effet du couple Obama».

«Mais, si, en 2012, la «black-geoisie» a intégré tous les codes blancs, elle ne le fait pas de manière littérale. C'est toujours classique, avec un twist, bourgeois avec une référence ethnique (un boubou en cire, un collier coquillage, une créole de rappeur...) qui rappelle les racines», poursuit la journaliste.

Dès sa parution, l'article a déclenché des réactions indignées, jusqu'Outre-Atlantique.

Le New York Magazine évoque une généralisation «gênante» sur le style black, le New York Daily News parle d'un «traitement raciste» et dit à Elle: «Fermez la bouche!» (en français dans le texte). La version américaine du Huffington Post y voit des «déclarations controversées, stéréotypées et insultantes».

«Les jeunes femmes noires ne sont pas ces sauvages enfin civilisées et éduquées ayant «intégré tous les codes blancs» comme vous nous l'expliquez à la manière d'un colon émancipateur, Madame Dolivo», écrit pour sa part Patricia Ohanda, éditorialiste du site francophone afrosomething.com.

«Y'a bon Obamania»

En France, la journaliste antillaise Audrey Pulvar a qualifié le papier de «raciste et imbécile», dans un billet de matinale sur France Inter qu'elle a intitulé Y'a bon Obamania. Billet qui a valu une vague de reconnaissance sur les réseaux sociaux.

La comédienne métisse Sonia Rolland, ex-Miss France, a invité l'hebdomadaire à faire une couverture avec une femme noire, alors que le Conseil représentatif des associations noires (Cran) a exigé mercredi des «excuses immédiates et publiques».

Face aux «vives réactions et aux nombreux commentaires», l'article a été retiré du site internet de Elle.

«Si cet article a pu choquer ou blesser certaines personnes, nous en sommes profondément désolés, car ce n'était nullement notre intention, au contraire. Nous regrettons vivement ce malentendu», écrit Valérie Toranian, directrice de la rédaction, sur le site.

Nathalie Dolivo s'est également excusée et expliqué que son «article se voulait positif».

«Il s'agissait de mettre en avant ces nouvelles figures qui affolent et fascinent l'industrie de la mode et du divertissement, du show-business», dit-elle, ajoutant que l'article porte «majoritairement sur un phénomène américain».

Pour tenter d'éteindre la polémique, l'hebdomadaire a invité le collectif Anti-négrophobie à discuter de l'article, que ce dernier considère comme relevant du «racisme inconscient».

«On a parfaitement conscience que l'article avait l'intention de promouvoir positivement l'image des noirs. Et quand on décode de manière précise la thématique qu'il aborde, on se rend compte que, finalement, il produit un racisme qu'il voulait combattre», explique ce collectif dans un entretien disponible sur le site de l'hebdomadaire.