Ils sont Indien, Américain ou Parisien, mais tous trois ont fait jeudi sur les podiums la démonstration d'un prêt-à-porter audacieux, à l'aune de la large palette des inspirations et des savoir-faire.

Pour son retour attendu sur les podiums parisiens, le styliste Guillaume Henry, pour la maison Carven, a misé sur une garde-robe rafraîchissante. Fidèle au souvenir de sa fondatrice Mme Carven, qui dès 1945 avait décidé de libérer la femme moderne de tous ses carcans en mode, il prend même le risque du court, voire de l'ultra-court.

De légères robes de patineuse, des jupes en corolle, des cabans et des trench-coats en trapèze cohabitent en harmonie avec des pièces en laines mêlées multicolores à l'aspect chiné. Des cuirs plongés un peu raides aux tons caramel sont déclinés tant en jupe évasée qu'en mini-robe bustier sur laquelle sont incrustées des fleurs de métal en rosace. Plus loin, de la dentelle et de l'organza corail s'invitent en faux-jupons et dépassent sous une jupe longue ou sous un haut estival.

La proposition Carven se joue jusque dans les souliers: de nouvelles espadrilles de cordes tressées à semelles compensées, qui font bon ménage avec des escarpins polychromes sertis de grelots et clochettes fixés en ribambelles à même le talon ou sur la sangle, à la cheville.

Lui aussi attendu au tournant, mais pour des raisons moins avouables, Manish Arora a fait montre d'une certaine continuité. Les mauvaises langues du secteur, et elles sont légion, avaient un peu vite préjugé de l'étendue de sa puissance de travail, alors qu'il présente à deux jours d'intervalle sa propre collection, en plus de celle qui doit signer le retour de la marque Paco Rabanne sur les podiums parisiens.

Inspirée de la joie de vivre et de l'insouciance des années 1960, cette collection trouve sa puissance dans un hommage à la peau, ou plutôt à toutes les peaux.

«Elles sont noires, elles sont blanches, elles sont bronzées et elles m'ont marquées au cours de tous mes voyages», a expliqué le créateur indien à l'Associated Press en sirotant du champagne dans un gobelet de plastique.

«En matière d'égérie, j'en connais un rayon, et pour Manish, je suis prête à toutes les compromissions!», a glissé à l'AP l'actrice espagnole Rossy De Palma, peu avant d'ouvrir le déliré en robe lamée argent aux hanches hypertrophiées.

Des perruches juchées sur le barreau d'une cage, un haut en forme d'exosquelette en bois comme posé sur le buste, ou encore des imprimés de clichés de Robert Altman viennent enrichir ou orner une kyrielle de modèles brodés de sequins, de perles, de paillettes à effets de coquillages bruissants, qui tous sont un hommage vibrant à toutes les lumières du monde.

À la recherche d'une sérénité proche de la langueur, Rick Owens a fait une fois encore la démonstration de son sens de la coupe et du travail des matières. Ses silhouettes épurées déambulent en longs hybrides entre cape et robe de plage, sobrement ceintes d'une cordelette.

Des vestes ajourées à motifs cuir entrecroisés et des ensembles tout en longueurs à effet parachute servent ce travail qui s'apparente au fil des saisons à une épure en mode.

«J'estime qu'être séduisant à tout prix, ça n'a pas vraiment de sens», a dit à l'AP le créateur californien. «Ce qui compte c'est d'être «oversexual', et de s'inscrire hors catégorie».

Pour appuyer ce propos, Owens mise sur ses couleurs fétiches, le noir et le blanc, auxquelles il a cette fois ajouté quelques modèles piochés dans la sage et large palette des bruns.