Rigueur, mais sans perdre la féminité. Tel est le nouveau credo des couturiers milanais, qui ont présenté dimanche, au cinquième jour des défilés de prêt-à-porter, des collections qui empruntent au sobre vestiaire masculin, tout en exaltant séduction et extravagance féminine.

Consuelo Castiglione a ainsi juxtaposé chez Marni des lignes nettes et sévères à de riches textures, ponctuées de détails très féminins.

Les robes, aux ourlets asymétriques, sont décorées de cols bijoux et fourrure ou brodées dans le bas de perles et micropompons. Les jupes droites descendent sous le genou, mais sont fendues sur les côtés. Vestes en daim et manteaux de cuir se portent sur une fourrure, avec de gros gants de cuir remontant jusqu'aux coudes.

Les imprimés géométriques sont omniprésents, y compris dans certaines fourrures, où le vison, coupé en losanges, forme une composition architecturale.

Chez Brioni, Alessandro dell'Acqua poursuit dans cette même veine, avec des vêtements encore plus épurés, mais aux tissus ultra luxueux: duchesse de soie, cachemire, crocodile. «J'ai imaginé une femme à double facette mêlant l'élégance sophistiquée de l'actrice Florinda Bolkan au glamour de Diana Ross», explique le styliste.

Sur les notes du célèbre tube de la chanteuse, «Upside Down», les mannequins défilent dans des robes en guipure noires, des ensembles fluides couleur poudre ou des manteaux resserrés à la taille par une fine chaîne dorée. Les chemisiers en nappa se nouent au col par un noeud, des pulls moelleux s'ouvrent dans le dos.

Le style est rigoureux aussi chez Marco de Vincenzo, nouveau talent italien, dont la collection, sage en apparence, se révèle, par petites touches extravagantes et un brin surréalistes, très féminine.

Des boutons d'argents, vernis en forme d'oeil, vous fixent sur le devant d'une austère robe grise, ou derrière une veste, fixés sur une drôle de martingale barbue.

Les jupes droites sont fendues devant à l'oblique dévoilant des bas coquins. Une peau de chèvre de Mongolie serrée à la taille fait office de robe, tandis que de longs poils poussent sur les manches et les bords des vestes.

Dans un jeu de trompe-l'oeil, le col vison d'un habit se prolonge en dessin sinueux sur l'étoffe. Des cuissardes se confondent, ton sur ton, dans le même tissu ivoire moucheté d'un manteau.

Dolce&Gabbana déclinent quant à eux une double collection. Au féminin, avec robes combinaisons moulantes et séduisantes, talons aiguilles et socquettes noires. Et au masculin, en piochant allègrement dans la garde-robe de Monsieur.

Les deux côtés de la médaille finissent par se rejoindre dans une explosion étourdissante de paillettes, pierres et joyaux incrustés et d'imprimés en forme de notes musicales et d'étoiles. Démesurées, ces étoiles en strass argentées qui clignotent sur le revers d'une veste d'homme donnent une allure de Monsieur Loyal à ces dames, un brin burlesques.

Salvatore Ferragamo joue lui aussi sur le contraste masculin-féminin pour aboutir à une collection très raffinée, où les grands classiques de l'homme sont détournés avec subtilité. Le costume de banquier se transforme en robe bustier, les ensembles pantalons Princes de Galles laissent entrevoir un chemisier noir transparent, la jupe pied-de-poule croisée s'entrouvre à chaque enjambée.

Les traditionnels tissus masculins se déclinent ton sur ton dans tous les accessoires (sacs, escarpins) et sont repris dans des trenchs somptueux.

C'est une tout autre atmosphère qu'a proposée Missoni, plongeant les femmes dans un cocon douillet aux dégradés pastel (jaune poussin, rose dragée, vert menthe, lilas).

Chaudement vêtues dans des laines et velours à poils ou des fourrures combinées à de la maille, ces demoiselles portent des redingotes enveloppantes traînant jusqu'au sol, tout comme les amples pantalons et robes, dont les volumes renvoient aux silhouettes du 19e siècle.