La maison de couture Dior a suspendu son créateur, le Britannique John Galliano, accusé d'avoir proféré des insultes antisémites et racistes jeudi soir à Paris, lors d'une altercation avec un couple, une version démentie par son avocat.

Le célèbre styliste, en état d'ébriété, a été interpellé jeudi soir à la suite de cette altercation et entendu «quelques heures» par la police avant d'être libéré, a indiqué une source policière.

Mais quelques heures après la révélation de cette affaire, survenue à quelques jours de l'ouverture de la Semaine de mode, Dior a décidé de réagir.

«La Maison Dior affirme avec la plus grande fermeté sa politique de tolérance zéro à l'égard de tout propos ou attitude antisémites ou racistes. Dans l'attente des résultats de l'enquête, Christian Dior a suspendu John Galliano de ses fonctions», a déclaré le PDG de Dior, Sidney Toledano, dans un communiqué.

Toute cette affaire laisse planer une incertitude sur le maintien de la présentation de la collection Dior.

Jointe au cours du week-end, la célèbre maison de couture n'avait toujours pas décidé si elle annulait son défilé prévu vendredi au musée Rodin à Paris.

La décision de suspendre John Galliano, jugée «excessive» par l'avocat du couturier, Me Stéphane Zerbib, a en revanche été saluée par le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) et la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (LICRA).

Échange d'insultes?

Selon les premiers éléments recueillis par la police, la scène s'est déroulée jeudi vers 21h à la terrasse d'un café à la mode, situé dans le Marais, au coeur de la capitale française, un quartier historique de la communauté juive de Paris.

Une altercation a éclaté pour une raison inconnue entre le styliste, âgé de 50 ans, et un couple attablé à côté de lui.

Selon des propos du couple rapportés par la radio Europe 1, le couturier leur aurait lancé en anglais: «Dirty jewish face, you should be dead» (Sale tête de juive, tu devrais être morte) et «Fucking Asian bastard, I will kill you» (Putain de bâtard asiatique, je vais te tuer). Selon une source policière, le couturier a également «allègrement» insulté la femme, commettant des «violences légères».

De telles insultes, si elles étaient avérées, tomberaient sous le coup d'injure publique à caractère racial, selon le Code pénal, délit passible de 6 mois de prison et de 22500 euros d'amende.

Rapidement interpellé par les policiers après cet incident, le couturier a été conduit au commissariat du quartier pour y être entendu avant d'être libéré. Un examen médical a révélé une alcoolémie positive avec un taux de 1,1 milligramme d'alcool par litre d'air expiré.

Les deux victimes ont porté plainte au commissariat du quartier, selon une source policière.

De son côté, le magazine et site internet allemand Sleek, spécialisé dans la mode, cite des témoins qui affirment que l'altercation a éclaté quand Galliano a tenté d'entamer la conversation avec ce couple, qui l'a pris pour un clochard. Selon ces témoins, le couple l'a injurié et Galliano a insulté à son tour la femme.

Galliano dément

«M. Galliano dément avoir proféré des insultes antisémites», a réagi Me Stéphane Zerbib, ajoutant: «Il y a eu une altercation, M. Galliano a été agressé verbalement, mais à aucun moment il n'a proféré de telles insultes, nous avons d'ailleurs des témoignages dans ce sens.» John Galliano a lui-même décidé de porter plainte pour «diffamation».

«M. Galliano s'est rendu au commissariat du 3e arrondissement vendredi soir et a porté plainte pour diffamation et injures», a assuré à l'AFP Me Zerbib.»Nous avons livré trois attestations écrites aux policiers, émanant du responsable du restaurant et des deux vigiles du restaurant qui assure que M. Galliano n'a jamais proféré d'insulte antisémite», a-t-il expliqué.

Inventif et flamboyant

Le couturier britannique, qui a pris les rênes de la création chez Dior en 1996, s'est imposé comme l'un des créateurs les plus inventifs et flamboyants, puisant son inspiration dans l'histoire et ses pérégrinations autour du monde.

Depuis 1999, il dirige l'ensemble des collections féminines de Dior ainsi que la maroquinerie et l'image de la marque. Il dessine parallèlement ses propres collections. Le couturier britannique doit d'ailleurs présenter son propre défilé dimanche, à mi-parcours de la Semaine de mode parisienne qui compte 89 défilés sur le calendrier officiel, concentrés sur neuf jours et soirées.