La dernière journée des présentations pour la prochaine belle saison a permis de prouver dimanche la largeur du spectre que propose le vestiaire masculin d'aujourd'hui, depuis le militantisme en mode d'Agnès b. en passant par l'originalité technique du japonais Rynshu ou le classicisme «tailleur» chez Arnys.

Plus militante que jamais, Agnès b. profite de la vitrine qu'est aussi son défilé pour afficher ses nouveaux combats. A commencer par le lancement d'une nouvelle étiquette «Agnès b fabriqué en France», une façon de sensibiliser le public aux délocalisations massives que subit le secteur, mais aussi de promouvoir un réel savoir-faire typiquement français auquel elle fait régulièrement appel, à travers dix entreprises françaises dont pas moins de six implantées dans les régions Bretagne et Pays-de-la-Loire.Déclinant une fois encore son «amour des hommes, de tous les hommes», la créatrice a mis en vedette des silhouettes aux allures de héros de «Querelle de Brest» de Jean Genet ou, dans une version plus édulcorée, de titis parisiens se donnant des airs de mauvais garçons. «Ce sont tous mes chéris», a confié la créatrice à l'Associated Press.

Casquette gavroche ou borsalino à motifs imprimés vissés sur la tête, ils déambulent avec nonchalance devant une fresque de l'artiste japonais Hiraku Suzuki, en petite veste de cuir, en caban, en redingote cintrée ou en salopette de toile.

Des pantalons près du corps s'ornent de zips au mollet, des mini-short sexy se portent en journée avec un mini-spencer ou un cardigan. Plus loin, un paysage balnéaire s'invite en sérigraphie sur un petit blouson coupe-vent et une cravate en tons bleus est peinte en trompe-l'oeil sur un pull de jersey sombre.

La créatrice, à la tête d'une des rares maisons de mode française totalement indépendante, poursuit son oeuvre de mécénat tant pour les arts de la rue, la musique, le cinéma que pour les grandes causes. Au côté de la fondation de Danielle Mitterrand, et «pour de faire de l'accès à l'eau un droit universel», elle a «customisé» une bouteille d'eau exclusive dessinée par Philippe Starck, vendue 5 Ç, dont le bénéfice des ventes financera les actions de la Fondation France Libertés.

Rynshu a proposé une nouvelle version balnéaire de «L'homme à la moto». Sanglés, casqués, bottés ou chaussés de baskets montantes à semelles compensées, ses motards de plage s'habillent autant de cuir porté à même le corps que de tulle noir ou de guipure.

Côté technique, le créateur japonais n'est pas en reste. Il étonne avec des collages appliqués à du patchwork, des paillettes sur des plastrons de cuir troué, ou s'amuse avec un cuir élastique de polyuréthane.

Quelques vestes retrouvent une épaule en «virgule», tandis que des capuches, des ceintures, des lacets s'invitent sur la plupart des pièces, dont certaines sont proposées avec des manches amovibles et qui toutes arborent le col Mao, l'un des codes de la maison.

Créée en 1933 par un émigré russe, la maison Arnys, qui s'invite pour la deuxième saison dans le calendrier, propose en voyage sur la thématique balnéaire et marine d'abord, désertique et africaine ensuite; ce périple se concluant par une partie de campagne dans la douceur angevine.

Discret, mais sûr de son fait, «l'homme Arnys est d'abord un intellectuel, qui se joue des codes et des a priori», a confié à l'AP Jean Grimbert, président de la maison de la Rive Gauche.

Le lin, les riches cotons tramés ou Sea Island, le cachemire ultra-fin, les mélanges de lin et soie: ces matières et étoffes de choix se déclinent en autant de costumes ou de vestes aux finitions cousues main.

D'originaux pantalons à pont, des vareuses revisitées bleu océan, des sahariennes viriles aux tons sable, des polos, des mini-pulls rouge vif ou vert d'Irlande complètent ce vestiaire de dandy chic qui se permet, à l'instar de la haute couture chez les dames, d'être disponible en sur mesure, renouant ainsi avec la tradition du début du siècle dernier où tout gentilhomme digne de ce nom avait au moins deux fois l'an «rendez-vous chez son tailleur».