Il a beaucoup de qualités, ce restaurant St-Urbain. D'abord, en s'installant en 2009 dans cette portion sans histoire de la rue Fleury, bien à l'ouest de la zone la plus commerciale, il a lancé un mouvement.

Aujourd'hui, dans ce coin d'Ahuntsic-Ouest, en plus du petit frère traiteur boulanger La bête à pain, on compte une boutique spécialisée en bières, un café, un autre petit restaurant. Tout cela rappelle un peu ce que fait la chef et restauratrice Barbara Lynch à Boston, en insufflant une nouvelle vie aux zones urbaines où elle s'installe.

Une autre des qualités de ce restaurant piloté par le chef et copropriétaire Marc-André Royal est sa terrasse. En été, on aime les terrasses. Celle-ci n'est pas particulièrement grande ni paysagée, mais elle est très fonctionnelle et permet des repas al fresco classiques quand les beaux jours reviennent. À mettre donc sur notre liste estivale.

Une autre des raisons qui nous font aimer cette table est ce parti pris, depuis les débuts, pour un approvisionnement écologiquement responsable. Le St-Urbain fut un des premiers, sinon le premier, restaurants à Montréal à adhérer à Ocean Wise, ce programme piloté par l'aquarium de Vancouver qui aide les restaurants à choisir des poissons et fruits de mer provenant de sources durables. Un tel effort doit être souligné à gros traits.

L'autre grand «plus» de ce restaurant est sa convivialité. On entre et on sent l'atmosphère chaleureuse du rendez-vous de quartier où tout le monde se connaît ou pourrait se connaître. Le niveau sonore est élevé, mais ceux qui aiment les ambiances vivantes apprécieront.

Dans l'assiette, toutefois, même si la cuisine a évolué depuis l'ouverture en prenant une direction que l'on connaît bien à Montréal - elle est riche, salée -, elle manque souvent de précision.

Par exemple, l'entrée de burrata, cette mozzarella farcie à la crème, n'a pas la fraîcheur qu'on attend d'une «salade printanière», avec son pleurote poêlé, un peu d'asperges et un oignon grillé. Tous les éléments ont des textures semblables, on cherche l'acidité. L'oignon semble plutôt automnal et le champignon ne fait pas partie de ceux, sauvages, qui ont pointé leur chapeau au sortir de l'hiver.

Et les pétoncles? Bien que délicatement cuits, ils sont servis avec une sauce de type demi-glace si salée qu'on abandonne l'assiette.

D'autres plats s'accommodent mieux de ce style costaud. Les capelans frits servis avec salicorne sont réellement sympathiques, croustillants, frais. Le genre de plat fait à partir d'ingrédients bien québécois qu'on aimerait retrouver plus souvent.

Et le crabe à carapace molle frit se laisse manger tout seul, avec sa belle sauce gribiche bien ponctuée à l'estragon.

Aussi, l'agneau braisé est fondant et chaleureusement mis en valeur dans un plat d'inspiration indienne où curry, raisins, pistaches et chou-fleur s'unissent plus qu'ils ne se donnent la réplique. De la même façon, un plat plus asiatique, avec fenouil, gingembre et haricots, assez allumé, démontre que le chef est habile avec les combinaisons de parfums venus d'ailleurs.

Au dessert, les beignets trempés dans le caramel sont un brin lourdauds, mais difficile de résister à leur sauce au caramel salé, onctueuse et enveloppante. La maison s'aventure aussi vers des créations plus subtiles, par exemple une combinaison de rhubarbe confite avec un sorbet à la fraise ponctuée au basilic et aux noisettes ou une panna cotta à la vanille avec granité de pamplemousse. Voilà un point final plus léger pour un repas copieux.

Les amateurs de fromages seront aussi ravis par un généreux plateau de produits du Québec, un des nombreux détails invitants de ce rendez-vous de quartier authentique et que bien d'autres coins de Montréal rêveraient d'accueillir.

Le St-Urbain

96, rue Fleury Ouest

Montréal

514-504-7700

> Prix: Entrées entre 13$ et 16$, plats entre 26$ et 28$, desserts de 6$ à 8$.

> Carte des vins: Une carte très variée incluant plusieurs crus à prix raisonnables (sous les 50$). Fort intéressant: tout est offert au verre.

> Service: sympathique, efficace.

> Atmosphère: Ce lieu très vivant n'est pas du type porté à la confidence. On n'y va pas pour un tête-à-tête en amoureux pour se chuchoter des mots doux ni pour une rencontre d'affaires top secrète. On y va pour retrouver des amis et voir du monde.

> Décor: Très simple, mais sans fausse note - tables en bois sans nappe, lampes et chaises modernes comme on en trouve chez IKEA. Grand tableau noir où est écrit le menu du jour.

L'atmosphère sympathique de ce lieu qui s'est créé dans un quartier où il n'y avait rien de tel. Un exemple à suivre ailleurs.

Un manque de précision en cuisine. Et de légèreté aussi.

On y retourne? Si on est dans le quartier, oui.