J'adore le cinéma Excentris. Les salles sont confortables. La programmation est géniale. On peut y voir des films originaux, intelligents, qui ont en général la grande qualité non seulement de nous émouvoir et de nous faire réfléchir, mais aussi de nous emmener voyager un peu avec leurs versions originales sous-titrées.

Aller voir un Nanni Moretti ou un Pedro Almodovar dans ses fauteuils extra-rembourrés, sans tout le côté Luna Park des grands cinémas commerciaux, est un cadeau.

La réouverture du complexe, brièvement fermé aux cinéphiles fut, selon moi, l'une des meilleures nouvelles culturelles de 2011.

Ce qui est totalement désolant, cependant, c'est à quel point le restaurant installé dans le complexe ne suit pas le cinéma.

Y êtes-vous allés récemment?

Je ne sais pas si j'ai été très malchanceuse, mais lors de mon passage, l'établissement était pratiquement vide, ce qui a tout de suite donné au repas un air tristounet. Dommage, car je croyais vraiment qu'en mangeant sur la terrasse, en écoutant la manif de casseroles passer au loin, on y vivrait un moment pré-estival montréalais sympathique...

Pas du tout. Il faut dire qu'avec des plats aussi décevants, on comprend vite pourquoi il en est ainsi.

Première chose étrange, le double menu, dont on ne saisit pas exactement où il s'en va. Une carte semble plus conviviale, l'autre plus «sérieuse», comme si on voulait offrir à la fois l'option de simplement manger une bouchée ou de prendre un repas traditionnel. Toutefois, les catégories de plats ne sont pas clairement définies. On ne peut pas dire qu'il y ait vraiment, d'un côté, des bouchées ou des plats à partager. Formule tapas? Pas exactement non plus.

Déception du début à la fin

On opte donc pour des plats des deux listes.

Dans l'assiette, la soupe aux pois goûte l'eau, comme si on l'avait exagérément allongée. Elle tombe à plat en bouche, fine, mais fade.

La salade César au poulpe? Laitue fraîche, mais composition bien prévisible. De la romaine avec une vinaigrette qui semble sortir d'une bouteille de supermarché pas mal plus que du cerveau d'un chef qui cherche des idées. Et des morceaux de poulpe grillés pas trop tendres déposés par dessus.

En plat principal, le vivaneau n'est pas frais. On le sent dès qu'il est déposé dans l'assiette. On mange plutôt les asperges et les morceaux de fenouil (bien cuits), dans une sauce peu structurée qui goûte légèrement les agrumes. On essaie aussi le poulet, sans surprise, pas particulièrement tendre ou relevé, servi avec un gratin de pommes de terre lourdaud. On se croirait presque dans un avion.

Au dessert, on demande les recommandations: il faut, apparemment, essayer la tarte au chocolat avec oranges confites. Malheureusement, le gâteau arrive trop froid, trop figé, avec cet air inimitable qu'ont les desserts qui ont passé un peu trop de temps au frigo. Dommage, car on n'apprécie alors ni la crème prise au chocolat bien noir ni sa garniture d'agrumes.

Une chance que le gâteau aux carottes, lui, est impeccable, frais et moelleux et bien épicé, avec une bonne glace au fromage à la crème, riche et généreuse.

S'il y a un restaurant à Montréal qui devrait être créatif, avant-gardiste, allumé, c'est bien celui-là. Surtout qu'il y a certainement une clientèle prête à embarquer dans une telle aventure, entre un long métrage de Wes Anderson et deux ou trois films d'auteur russes, québécois ou argentins.

On espère que cette situation sera corrigée sous peu.

Café Méliès

3540 boul. Saint-Laurent

Montréal

514-847-9218

Prix : Entrées de 8$ à 18$,

plats principaux entre 18$ et 27$. Desserts 8$

Carte de vins : Sélection soignée avec liste intéressante de vins aux verres. Mais comme pour la cuisine, pas aussi moderne qu'on le souhaiterait.

Atmosphère : On est à mille lieues du vieux Méliès des années 80 où on buvait du café au lait avec des brioches collantes de feu la Boulangerie Saint-Laurent. Le restaurant est plutôt moderne, de style sombre-chic, avec bar et côté lounge. Difficile de décrire la faune, cependant, le soir où nous y sommes allées, c'était pratiquement vide.

Service : Efficace et courtois, mais on ne sent pas, là non plus, qu'on est avec des gens qui aiment profondément la gastronomie, ce qui est étonnant dans un lieu voué à la création et à la recherche.

Le plus: On aimerait aimer puisqu'on adore le cinéma juste à côté.

Le moins: La nourriture bâclée, sans imagination.

On y retourne? : Non.