La réunion avec les représentants du consulat japonais - pré-tsunami - durait depuis un bon moment, quand le sérieux de discussion a finalement laissé place à un peu plus de légèreté. Le moment que j'attendais. «Et vous aimez bien les restaurants à Montréal? Vos sushis, vous, vous les prenez où?»

Je sais, je sais. Il y a autre chose dans la vie que la cuisine et certainement d'autres façons de montrer qu'on s'intéresse à des interlocuteurs issus d'une autre culture. Mais comme dénominateur commun entre personnes qui ne se connaissent pratiquement pas, c'est l'un des meilleurs. J'avoue, on aurait pu parler de leur découverte du hockey peut-être. Ou de leur appréciation de Céline Dion. J'aurais pu afficher ma fascination pour la jeunesse d'Harajuku.

Mais avec la cuisine, on se trompe rarement. D'ailleurs, la conversation s'est tout de suite animée. «Oui, oui, les sushis...»

Le nom de Jun-I, magnifique restaurant japonais de l'avenue Laurier, un peu à l'est de l'avenue du Parc a été lancé. Puis est arrivé ce qu'on attendait: la petite recommandation que personne n'avait vue venir. Le petit resto caché qui n'est sur aucun radar branchouille, dont le nom ne rime avec aucun quartier en pleine effervescence.

«Nous, nous aimons bien aller chez Yasu, à Brossard.

- Chez qui?

- Yasu. Brossard. 1200, boulevard Rome. C'est très bon, très frais.»

Trois minutes après la fin de la rencontre, le nom du restaurant était inscrit dans mon calepin. Et peu après, le GPS programmé pour me mener un jour à bon port.

En fait, Yasu est très facile à trouver. Il suffit de prendre la 132 en direction ouest et de prendre la sortie «boulevard Rome». Le petit centre commercial de plain-pied où il se situe est du côté est. Quelques dizaines de mètres plus loin.

Accueil cordial

La décoration du restaurant, ouvert depuis 12 ans, n'a rien de formidable. Il y a des lampes en papier, de la peinture moutarde. On se croirait dans mille restaurants asiatiques qu'on a déjà fréquentés ici et là partout au pays. L'accueil, toutefois, est plus que cordial. Autant dans la salle que derrière le comptoir où trois chefs, dont un est d'origine japonaise, comme le propriétaire, s'affairent à préparer les sushis et lèvent la tête pour sourire aux nouveaux venus.

Pour commander, je ne me casse pas la tête.

«Ce sont des gens du consulat qui nous ont recommandé de venir ici. Ils mangent quoi?

- Chirashi! répond la serveuse avec enthousiasme.»

Et c'est ainsi que, après une très fraîche salade d'algues variées, ponctuée d'une vinaigrette bien acidulée et bien différente de celle au sésame proposée partout, j'ai découvert ce plat qui ressemble à une sorte de sushi géant déconstruit.

Sur un lit de riz, des morceaux de poisson cru soigneusement et minutieusement découpés, parfaitement taillés, sont déposés en étoile. Un maquereau magnifiquement bleuté fond sous la dent à côté de morceaux de poulpe avec toutes ses ventouses, de crevette, de plie, de mactre et même de saumon. Un morceau d'omelette occupe le milieu du plat, comme au Japon où elle se glisse discrètement, mais souvent dans les sushis. Du shiso garnit l'assiette et apporte ses notes fraîches.

Vu le prix, 11,25$, pour cette belle assiette - incluant bol de soupe miso, thé japonais et dessert, le midi - on se doute qu'il y a parmi ces prises, quelques produits de la pisciculture et d'une pêche industrielle qui peut faire tourner les talons, à juste titre, aux consommateurs préoccupés par l'avenir des ressources halieutiques. Mais tout est frais. Et le produit, tel qu'il est, est respecté.

Même chose du côté des sushis, qui sont à leur meilleur préparés simplement, dans la tradition japonaise, avec du riz juste assez collant, juste assez résistant sous la dent, jamais pâteux...

Le menu, cela dit, est beaucoup plus long, et comprend plats de viande et nouilles udon notamment. Avis aux aventuriers nostalgiques d'expériences japonaises façon isakaya, avec teriyaki, tempura et compagnie.

Pour terminer le repas, la maison propose des classiques: glace au thé vert, glace aux fèves rouges... Mais est-ce pour le dessert qu'on va chez Yasu à Brossard ou à Laprairie, où on compte aussi une succursale? Non. On y va pour les sushis.

1200, boul. Rome, Brossard

450-465-8383

www.sushiyasu.ca

Prix: Le midi, on mange un repas complet, avec soupe, thé et dessert pour une douzaine de dollars. Le soir, on compte le double environ.

Carte de vin: Minimaliste. Quelques bières. Du saké. Des apéros. On préfère le thé vert japonais classique ou alors on demande le thé au riz grillé, aux notes torréfiées sans amertume, doux et savoureux.

Genre: Restaurant japonais sans prétention. On y va ni pour le décor ni pour la faune, mais pour l'accueil gentil et convivial de l'équipe. Pour un repas simple, mais bien fait, loin des sushis de supermarché.

Plus: Le sentiment d'authenticité.

Moins:  L'absence totale d'information sur la provenance des poissons.

On y retourne? Oui, pour les sushis !