Les patrons disent de leur resto que c'est une «nouvelle expérience de Corée». Toujours surprenant, ce que les commerçants peuvent affirmer pour attirer les clients, vous ne trouvez pas? Or, en entrant ici, on se rend compte qu'ils ne manquent pas d'imagination et qu'ils s'attendent à une clientèle composée largement d'étudiants coréens et japonais. Pour y accéder, on longe un mur couvert de centaines de mangas (bandes dessinées japonaises) destinées aux amateurs, pour aboutir dans une petite salle commune autour d'un piano ou dans une pièce réservée aux groupes ou aux rencontres nocturnes, autour d'une table de billard et de grands fauteuils. Quoi qu'il en soit, ce n'est pas le cadre habituel d'un resto asiatique. En tout cas pas au Québec.

La cuisine est faite à la minute et sur une cuisinière domestique dans une toute petite pièce. Il en ressort pourtant des compositions remarquables de fraîcheur et de finesse. Les plats coréens ou japonais (nouilles, omelettes, sautés et ragoûts de viande) se présentent dans de grands bols en céramique, en métal ou en granit et sont souvent servis très chauds.

Cette cuisine polychrome, toujours surprenante et saine, est aussi apaisante pour les soirées fraîches du printemps. En fait, toute la cuisine coréenne est adaptée à des climats humides et souvent froids; on fait une grande place au riz, bien entendu, mais aussi au tofu - moelleux et solide - à l'ail et au piment, en plus de dizaines de condiments de toutes sortes. Contrairement aux autres restos du genre en ville, celui-ci est beaucoup moins formel et présente plusieurs qualités singulières: le décor et le mobilier composé de tables de pique-nique en bois, sauvées d'une précédente incarnation, nul doute, la présence d'un vieux piano et d'une guitare, ce qui laisse présager que les mélomanes peuvent improviser une petite valse, et un réchaud sur lequel se trouvent des théières remplies de hojicha au parfum de céréales rôties qu'on vous sert à volonté. On ne s'en lasse pas.

Nous avons choisi un ragoût de boeuf pimenté au tofu mou (très fondant), servi avec des fèves germées, un hachis de carottes fraîches, un oeuf presque cru, sur un lit de riz entier. C'était un délice fortifiant et débordant de saveurs, candide dans sa simplicité. Autre plat, servi en deux temps: une sorte de potage au porc et au kimchi (du chou mariné au piment), doucereux et sympathique, accompagné de Bi Bim Bap, riz sauté aux légumes servi avec un oeuf et des algues marinées. Un autre délice. Les patrons sont souriants et ressemblent à s'y méprendre à des as du kung-fu, et même s'ils n'articulent pas un mot de français, on ne leur en voudra pas, leur cuisine est si bonne et tellement sincère. Et à 30$ pour deux, il faut le faire.

5000 ans

2176A, rue Sainte-Catherine Ouest, 514-932-7565

On y retourne? Déjà fait, et plutôt deux fois qu'une.

+ Le très bon saké coréen, la bière japonaise, les produits de qualité.

- La moitié de la carte non offerte en raison de l'absence du cuisinier japonais!