Albert Adria, ancien pâtissier du restaurant calatan El Bulli, a évoqué mardi à Deauville l'immense pression liée au succès planétaire de l'établissement qui reçoit 2 millions de demandes de réservations par an.

Il était temps de «tuer la bête», a affirmé le jeune frère du chef Ferran Adria sur la scène du festival de cuisine Omnivore, faisant référence à l'annonce de la fermeture du restaurant en 2012 pour deux ans.

«La pression est incroyable. Quand tu es à ce niveau, tu ne peux que descendre», a déclaré le pâtissier qui a quitté El Bulli il y a un an et demi après y avoir «passé 23 ans de (sa) vie».

«La pression, elle est en toi. C'est la peur de décevoir les clients. Il y a 50 personnes en salle qui sont là pour être émus. Et ils veulent croire que ça valait la peine de faire tous ces efforts», a-t-il ajouté, rappelant que certains clients ont fait 10.000 kilomètres et réservé des mois à l'avance.

«Je serai reconnaissant au Bulli toute ma vie, le restaurant figurera sur mon épitaphe. Mais je n'imaginais pas qu'on puisse être aussi heureux de n'avoir pas à remplir une assiette vide», a ajouté tout sourire le jeune quadra au visage poupin, cheveux bouclés blonds et regard clair.

Albert Adria se consacre désormais au bar à tapas traditionnel qu'il a ouvert il y a quatre ans à Barcelone. «Je passe aussi du temps en famille, ce que je n'avais jamais fait. Je cuisine à la maison et je passe une heure tous les matins au marché», a-t-il raconté.

Cet ancien pilier d'El Bulli, le restaurant comme l'Atelier de recherches, réfléchit aussi à plusieurs projets de restauration.

En 2008, après avoir passé plusieurs années à réaliser un livre sur ses desserts à El Bulli, «Natura», «j'ai réalisé que je ne pouvais pas donner plus. J'ai jeté ma veste de cuisine», a-t-il raconté.

Interrogé sur la transformation d'El Bulli en fondation privée gastronomique dès 2014, annoncée cette semaine en Espagne par son chef, Albert Adria affirme : «Ferran a quatre ans pour se renouveler, comme le Phénix renaît de ses cendres».