Si, pour vous, une soirée idéale consiste à regarder le hockey sur un écran géant en écoutant de la musique à tue-tête, devant un repas servi par des femmes décolletées en jupe extramini et extramoulante qui prennent une fois de temps en temps une gorgée à la table du voisin entre deux claquées de gomme baloune, eh bien, ne cherchez plus, votre prochain lieu de prédilection est tout trouvé. C'est Macaroni Bar, le nouvel établissement à tenter sa chance angle Mont-Royal et Saint-Laurent, là où jadis Le Bouchon, Savannah et 55 degrés ont eux aussi, depuis 20 ans, posé leurs pénates.

Macaroni Bar est un restaurant, mais l'ambiance, selon la soirée et l'heure que l'on choisit, peut aisément être celle d'un bar.

 

Choisissez un jeudi soir de hockey et vous aurez l'impression d'entrer dans un «sports bar». Non seulement tous les regards sont-ils rivés sur la partie de hockey projetée sur un omniprésent écran géant, mais en plus, les gars enfoncés dans leur fauteuil peuvent très bien avoir les pieds déposés sur une chaise, relax comme s'ils étaient dans leur sous-sol.

Cela dit, c'est bel et bien un restaurant et le serveur se fait un plaisir de recommander les plats qui, dit-il, font la renommée des lieux. Poutine aux gnocchis, bombes au thon, joue de veau...

Je ne peux dire combien de temps nous avons attendu pour que ces premiers plats arrivent, mais je peux dire qu'il a filé très vite, tellement nous l'avons occupé à essayer de comprendre ces lieux évoquant à la fois la rue Crescent, le boulevard Saint-Laurent près de Sherbrooke et le Bourbon Street Club de mon adolescence.

Miroirs en triangles suspendus au-dessus du bar où l'on s'assoit sur des tabourets d'inspiration baroque. Abat-jour suspendus en bouquet. Chaises noires rutilantes et tables blanches. Vitres décorées de pointes dépolies. A-t-on voulu transformer les lieux en hommage aux années 80? Pourtant, il y a des photos rétro évoquant l'Italie d'une autre époque sur les murs. Et puis les paniers à pain sont doublés de papier à carreaux et les murs sont lambrissés jusqu'à mi-hauteur. Mais peints en blanc brillant.

Est-ce qu'un designer a vraiment conçu cet environnement avec une vision claire ou a-t-on essayé de mettre ensemble des éléments disparates pour donner au tout un air décalé contemporain?

Quand arrive la première assiette, cette impression de confusion - d'être «à côté de la plaque» - est exactement la même côté cuisine. Comme si le chef avait voulu essayer quelque chose d'audacieux et de moderne, selon les tendances du moment, sans se rendre compte qu'il n'est pas là où il devrait être.

La poutine aux gnocchis, par exemple, préparée avec ces pâtes à base de pomme de terre que l'on a fait frire et qui flottent dans une sauce brune où l'on a fait fondre copieusement du fromage en grain, se donne des airs de cuisine ménagère réinventée alors qu'on a surtout l'impression de manger du «gravy» au fond de veau à la cuillère. C'est lourd, c'est collant. L'ensemble n'a pas de relief, qu'une richesse linéaire, très salée. La poutine n'est pas exactement un plat élégant au départ. L'idée de la réinventer - comme le font plusieurs excellents chefs - est sympa si le but est de donner un coup de pouce à ce plat lourdaud. Mais si c'est pour l'empirer...

L'autre entrée est ce que le chef appelle des bombes au thon. Il s'agit en fait d'un tartare de thon servi sous forme de quenelles, très salées elles aussi et assez brutes, fortes sur l'échalote et accompagnées d'une mayonnaise au sésame qui, elle, est légère et justement assaisonnée.

En plat principal, la joue de veau braisée, tendre, tombe sous la fourchette. Préparée très simplement, avec un peu de tomate, elle repose sur une purée de pomme de terre bien faite. Les asperges qui l'accompagnent sont grillées et croquantes, ce qui aide à faire du plat une assiette plutôt satisfaisante.

Les spaghettis aux champignons, à la roquette et à l'huile de truffe manquent quant à eux totalement de subtilité. D'abord, les pâtes s'écrasent sous la dent, là où elles devraient résister avant de céder. Est-ce parce qu'elles sont trop cuites? Peut-être. Mais sont-elles de bonne qualité? En outre, le goût d'huile de truffe envahit le plat et ne laisse aucune place aux notes poivrées de la roquette. C'est ce qui survient lorsqu'on met trop de ces produits à base de saveurs de synthèse. Et là encore, la question se pose: de quelle qualité de produit parlons-nous?

Pour terminer le repas, nous avons choisi la «pizza au Nutella», préparée avec une pâte frite ressemblant à celle des queues de castor, couverte d'une crème sucrée à la ricotta et de la fameuse crème chocolat-noisette.

La bonne nouvelle de la soirée?

Le Canadien a gagné cette fois-là.

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MACARONI BAR

4448, boulevard Saint-Laurent

Montréal

514-287-0287

www.macaronibar.ca

> Prix : 119$ tout compris pour deux entrées, deux plats principaux, un verre de vin et une bière, un dessert et un café.

Service : Gentil mais amateur. Est-ce normal que les serveuses s'arrêtent pour siroter un drink déposé sur la table voisine, avec des clients, pendant la soirée?

> Le détail qui résume tout : Au lieu d'apporter du beurre avec le pain, on apporte du fromage à la crème mélangé avec des oignons caramélisés, une combinaison qui fait penser aux recettes à base de soupe à l'oignon déshydratée des années 70.

> Genre : Lieu où on va pour prendre un verre, rencontrer des amis, regarder le hockey. Pas pour manger calmement un repas de qualité.

> Faune: Célibataires dans la vingtaine ou la jeune trentaine. Couples qui ont envie de sortir manger dans une ambiance très lounge, très bar. Si vous avez envie de vous coiffer comme Adriana dans les Sopranos, c'est le bon endroit.

> On y retourne? Ça m'étonnerait.