Avant cet été, Hélène Bourret n'avait jamais jardiné. Locataire dans Hochelaga-Maisonneuve, elle regardait avec envie le Jardin botanique, tout près de chez elle. Désormais, elle s'en nourrit.

Pour se rapprocher de la communauté, le Jardin botanique a offert des parcelles aux membres de la Cuisine collective Hochelaga-Maisonneuve, qui y cultivent légumes et fines herbes. «C'est une première, des adultes qui viennent ici jardiner, a indiqué Gilles Vincent, directeur du Jardin botanique. Ça s'inscrit dans la tendance de la promotion de la bonne cuisine, de l'alimentation saine.»

«J'aime vraiment voir la progression des cultures, a dit Mme Bourret, rencontrée alors que le soleil se couchait sur les plants de poireaux, de betteraves et de choux. J'ai appris beaucoup, sur les mauvaises herbes, les tomates... C'est un privilège d'être ici.»

Ce projet novateur, baptisé «Des jardins pour une cuisine collective», offre aux jardiniers en herbe l'aide de professionnels. «On leur apprend comment s'occuper d'un potager de A à Z», a expliqué Myriam Lefebvre, animatrice au Jardin botanique. Des semis en serre à la plantation, en passant par le désherbage et le compostage. «On est ici beau temps, mauvais temps, a souligné l'experte. Les gens ont acquis un sentiment d'appartenance, ont créé des amitiés.»

Clientèle pauvre et marginalisée

La clientèle de la cuisine collective «est pauvre et marginalisée et fait face aux nombreux problèmes qui découlent de cette situation, précise le site internet de l'organisme d'Hochelaga-Maisonneuve. En particulier, elle rencontre de sérieux problèmes de sous-alimentation et de malnutrition.»

Ensemble, ces gens mitonnent des plats qu'ils rapportent ensuite à la maison. L'an dernier, les plats qu'ils cuisinaient revenaient à 70 cents la portion. «Depuis le mois de janvier, le coût de la vie a beaucoup augmenté, dit Dominique Brûlé, responsable de la cuisine collective. C'est maintenant 1$ la portion. Les récoltes vont nous aider pour un temps.»

Parce que tout ce qui pousse dans les jardinets est remis à la cuisine collective, gratuitement. «La première récolte de salade nous en a donné 23 kg, a indiqué Mme Brûlé. On a pu préparer 155 portions. Depuis, on a eu des carottes, des tomates, des concombres, au moins 10 kg de haricots et le fameux chou kale.»

Le kale, star des jardins collectifs, est un haut chou frisé vert et mauve, qui fait jaser les participants. «On en fait de bonnes chips au parmesan, c'est une recette de Josée Di Stasio, dit Alexandre Boucher, 32 ans, père de trois enfants. C'est notre récompense, la récolte. On sent qu'on fait quelque chose pour la collectivité, c'est très motivant. Venir ici nous énergise, à cause du contact avec la nature.»

Groupe en réinsertion

Un autre groupe d'adultes, en formation d'aide-cuisinier, participe aussi au projet. «Ils nous ont fait goûter des pestos qu'ils ont préparés avec les fines herbes qu'on fait pousser, a indiqué Myriam Lefebvre. C'était vraiment bon.»

Une aide financière de 10 000$ du ministère des Affaires municipales a permis la réalisation du projet, qui doit être renouvelé l'an prochain. Déjà, la cohorte de cet été a eu la piqûre. «La plupart se sont fait des bacs de balcon», a assuré Mme Brûlé. L'avenir du chou kale est assuré.