Livres de cuisine et émissions culinaires prolifèrent, signe d'un intérêt nouveau et marqué pour la gastronomie au pays du fish and chips, même si les Britanniques ont encore du mal à se mettre aux fourneaux dans leur propre cuisine.

Jamie Oliver, qui a démarré à la télévision en 1998 avec une émission de cuisine facile et devenu une vedette du petit écran, a vendu plus d'un million d'exemplaires en trois mois de son dernier livre («Jamie's 30-Minute Meals»).

Le livre propose une série de recettes réalisables en moins d'une demie-heure.

Le hic? Selon Martin Caraher, spécialiste d'alimentation à l'Université de Londres UCL, «les gens regardent les chefs à la télévision, mais ne mettent pas forcément ce qu'ils ont vu en pratique.»

Certes, «il n'y a jamais eu autant d'intérêt autour de la cuisine et on n'a jamais autant parlé de nourriture», mais «c'est un peu comme la pornographie, on regarde, mais on ne le fait pas forcément chez soi».

Les Britanniques mangent mieux, mais cuisinent-ils plus? Pour Martin Caraher, le côté pratique domine toute la culture culinaire britannique. «Même à la maison, il s'agit souvent d'ouvrir des paquets et non de partir du produit brut», observe-t-il.

Légumes épluchés, prédécoupés et lavés en sachets sont désormais la norme dans les supermarchés, tandis que les plats tout préparés à réchauffer, pourtant réputés trop gras et mal équilibrés, forment l'ordinaire de bien des Britanniques.

La Canadienne Marie Rayner compte sur l'austérité pour encourager les gens à se remettre aux fourneaux et à s'inspirer de la multitude de «téléchefs», comme Jamie Oliver, Nigella Lawson, Gordon Ramsay ou Heston Blumenthal, dont les émissions s'exportent désormais jusqu'en France.

Ils «nous montrent qu'on peut vraiment faire de la bonne cuisine sans beaucoup d'effort, et parfois à moindres frais», souligne-t-elle.

Quand cette Canadienne est arrivée au Royaume-Uni il y a dix ans, elle pensait trouver une nourriture «horrible» et croyait que les Britanniques ne savaient rien cuisiner en dehors du rosbif.

«J'ai trouvé la qualité de la viande et des autres produits exceptionnelle», témoigne-t-elle.

Ce cordon bleu de 55 ans tient aujourd'hui un des blogues culinaires les plus populaires (https://theenglishkitchen.blogspot.com) où elle s'efforce de «démontrer les clichés sur la cuisine anglaise».

Les «téléchefs» comme Jamie Oliver ont contribué à «rendre visible la cuisine britannique», estime pour sa part le Français Jean-Christophe Slowik, propriétaire depuis 2007 du restaurant londonien L'Absinthe, après avoir travaillé pendant vingt ans pour le chef Marco Pierre White, plus jeune «trois étoiles» britannique récompensé à l'époque par le Michelin.

«The Fat Duck», de Blumenthal et le restaurant «Gordon Ramsay», du chef écossais éponyme et présentateur irascible de l'émission «Hell's Kitchen», font partie des quatre établissements trois étoiles britanniques distingués mardi par le guide Michelin.

Pour Jean-Christophe Slowik, la gastronomie britannique a fait un «bond phénoménal» ces dix ou quinze dernières années, grâce notamment aux produits locaux que lui-même utilise à hauteur de 80 à 85% dans son restaurant français.

Reste les clichés sur la cuisine britannique, «un bagage dont il est bien difficile de se débarrasser», soupire-t-il.